AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Étienne Moreau-Nélaton (59)


D'ailleurs, à 19 ans, Corot est un grand enfant, timide et gauche. Il rougit quand on lui adresse la parole. Devant les belles dames qui hantent le salon maternel, il est emprunté et s'enfuit comme un sauvage. Quand on lui parle d'une carrière, il ne répond pas. Il a acheté un album et s'applique à crayonner. Il dit vaguement : « J'ai envie de faire de la peinture. » Mais le père lui rit au nez.
Commenter  J’apprécie          00
La joie causée à Millet par cette lettre et son contenu a malheureusement été combattue par d'atroces souffrances, provenant d'une migraine d'abord, puis de la plus douloureuse des névralgies. Dans son affolement, le malheureux s'est précipité chez le médecin et l'a obligé à lui arracher cinq dents, l'une après l'autre. Sa mâchoire est massacrée, et le mal a tenu bon. Il a fallu s'armer de patience.
Commenter  J’apprécie          00
Mon cher Millet,
Je veux bien vous informer, afin que vous sachiez un tant soit peu de vos affaires, que, dès à présent, vous faites partie de l'Exposition Universelle. Il m'a plu qu'il en soit ainsi. Je n'ai pas d'autre raison à vous donner, et Sensier vous écrira plus au long. En ma qualité de Président du jury, c'est déjà beaucoup que votre personnalité m'ait occupé aussi longtemps. Je prends, de plus, comme ami, le temps de vous donner une bonne poignée de main et de vous prier d'embrasser pour moi M°" Millet et toute la famille, qui, j'espère, est en bonne santé.
A vous de coeur.
Th. ROUSSEAU.
Commenter  J’apprécie          00
... Je travaille à recueillir le plus de documents que je peux en fait de pays, car je n'ai rien fait ni d'après des figures, ni d'après des animaux. Il y a certainement ici de belles choses. Je ne sais si ce que je fais très à la hâte pourra faire soupçonner cela aux autres ; mais j'imagine qu'elles me seront un peu entrées dans la tête, à moi, et ce sera déjà quelque chose. Je ne peux sortir qu'un peu le matin; pas longtemps, car il faut toujours que je sois rentré à 9 heures. Tout le temps est morcelé par le traitement à suivre et par les repas, qui sont régulièrement à heure fixe. Puis, il fait si chaud dans le milieu de la journée qu'il n'y aurait pas lieu à sortir sans être malade. Je tâche de faire quelque chose le soir, mais on n'a pas le temps d'aller bien loin. Enfin, telles quelles, j'ai bientôt une cinquantaine de choses...
Commenter  J’apprécie          00
La moribonde expire au bout de peu de jours. Le 12 février, Millet accompagne sa dépouille au cimetière où reposent ses parents. Et puis, il rentre tout de suite à Barbizon. Gavet, à qui il a déjà livré trois pastels au début de l'année, en réclame d'autres à cor et à cri. Pendant deux mois, il ne travaille guère que pour lui. Le gourmand vient à Barbizon vers le 15 avril. Il ne remporte pas moins de sept pièces. A la vérité, la plupart de ces petits poèmes ne sont que des redites de sujets traités déjà à l'huile, au crayon, ou même au pastel. Mais Millet, on le sait, possède le talent de se répéter deux, trois, quatre fois ou davantage, en variant son thème de telle façon qu'il a l'air, sans cesse, de créer de l'inédit.
Commenter  J’apprécie          00
La poétique de Millet est celle du vieux classique. Classique lui-même dans l'âme, cet enfant chéri du destin chemine sur la route qui, en dépit de mille traverses et de tracas sans nombre, le conduit au triomphe et à la gloire. Phébus répond à sa voix; le galop ailé de Pégase l'emporte. Les cieux lui sont ouverts.
Commenter  J’apprécie          00
Malgré l'étonnement que lui causait l'art « spontané » de Corot, Millet n'était rien moins qu'un théoricien de la peinture. Les systèmes ne faisaient point son affaire. Il n'aurait sans doute jamais pris la plume pour discuter sur les principes qu'il s'efforçait d'appliquer dans la pratique de son métier si la lecture d'un ouvrage à prétentions didactiques ne la lui avait mise par hasard entre les mains. Barbizon comptait, parmi ses hôtes artistiques, un peintre d'origine helvétique, lié avec Diaz et Rousseau, qui s'appelait David Sutter. C'était un aimable compagnon, d'esprit enjoué, dont le goût pour les calembours avait fait de lui un rival de Tillot dans ce genre d'exercice, où ce dernier excellait.
Commenter  J’apprécie          00
Cette année 1859 débute presque aussi mal pour lui que les précédentes. Ne voilà-t-il pas qu'un de ses meilleurs amateurs, ce Letrône qui lui avait payé si largement autrefois ses tableaux, jette sur le marché toute sa collection. On la disperse à l'hôtel Drouot le 14 janvier. Les quatre toiles de Millet que l'on met aux enchères n'atteignent pas, en bloc, 1.500 francs.
Commenter  J’apprécie          00
Un travail moins courant se présente en même temps que celui-là. Il ne s'agit de rien moins que d'exécuter une Madone pour le pape. Un ingénieur français, nommé Ducros, chargé par le gouvernement pontifical de la construction de ses chemins de fer et du matériel roulant que ces voies ferrées comportent, s'occupe de faire confectionner, à l'usage du Souverain Pontife, un wagon sans pareil. Indépendamment du salon destiné à l'auguste voyageur, la voiture contiendra une salle de parade avec un trône pour les audiences en cours de route et, aussi, un oratoire. C'est l'architecte Trélat qui a pour mission de le construire et de l'orner. Il a commandé la décoration extérieure à l'orfèvre Froment-Meurice. La salle du trône, dont les parois latérales sont de grandes glaces, jouira,pour toute ornementation picturale, d'une frise, qui sera signée Gérôme. Quant à l'oratoire, il lui faut une Immaculée Conception. Les vues de Trélat, guidé, je pense, par Rousseau, se sont portées, pour cet objet, sur Millet. En tout cas, c'est Rousseau qui conduit l'affaire. Le morceau sera payé 500 francs.
Commenter  J’apprécie          00
Le hasard m'a conduit vers le fervent de Corot qui s'est appelé Alfred Robaut à l'heure où la défaillance de ses forces l'arrachait au monument destiné par lui à la glorification du maître bien-aimé qui, pendant quarante ans, avait occupé ses efforts. Gendre du peintre Constant Dutilleux,qui de bonne heure goûta le talent de son confrère encore méconnu et fut un de ses premiers acheteurs, initié par lui à une admiration qui tenait du culte, cet homme passionné avait consacré sa vie à sa religion artistique, partagée tout entière entre Corot et Delacroix.
Commenter  J’apprécie          00
Derrière Corot, en train de peindre au pied du château des comtes de Champagne, à deux pas de la maison de La Fontaine, un jeune homme s'est arrêté. Plein de déférence respectueuse, il regarde et se tait. Mais le maître a deviné un adepte à la flamme qui brille dans ses yeux. C'est lui qui l'aborde. « Vous êtes peintre, mon enfant ? Eh bien, venez me voir; nous causerons de notre affaire. » Voilà comment Léon Lhermitte apprit le chemin de la rue Paradis-Poissonnière. Corot aimait la jeunesse, et la jeunesse l'aimait à son tour.
Commenter  J’apprécie          00
Dans cet univers de Corot, le rêve ne vous fait, malgré tout, jamais quitter la terre. Vous respirez à pleins poumons; l'air circule sous la feuillée; les buissons légers invitent le pinson et la fauvette. Corot veut les entendre chanter dans son tableau. A quelqu'un qui lui demandait un paysage avec des arbres aux branches légères, comme il excellait à les peindre : Soyez tranquille, répond-il; je travaille pour les petits oiseaux.
Commenter  J’apprécie          00
Car il avait, pour tenir son ménage de célibataire, le dévouement d'une femme dont l'attachement à lui et aux siens remontait à un temps fort ancien. Depuis que la mère n'était plus là pour mettre, quand il dînait en ville, un faux-col de rechange au fond de son chapeau, c'était Adèle qui se chargeait de cette précaution. C'était elle qui gardait les clefs de la cave et qui, les jours où « Monsieur » traitait ses amis, limitait prudemment les bouteilles, que l'imprévoyante générosité de son maître aurait parfois sans elle prodiguées à l'excès. Tous les matins, à onze heures sonnant (car Corot, très exact lui-même, tenait à l'exactitude), elle déposait dans le petit cabinet contigu à l'atelier de la rue Paradis-Poissonnière, une soupière fumante, pour laquelle le peintre abandonnait séance tenante palette et pinceaux. Grâce à cette organisation, il ne perdait pas de temps en allées et venues. Le travail y trouvait son compte.
Commenter  J’apprécie          00
À partir de 1860, Dutilleux est venu se fixer à Paris. Il a cédé sa place comme chef de l'atelier d'Arras, en même temps que l'imprimerie lithographique qu'il dirigeait, à son gendre Charles Desavary. Cet événement, qui rapproche Corot de son ami, présente une conséquence fâcheuse pour son biographe. Sa correspondance devient plus rare et moins intéressante. En 1860, Corot est, en juin, avec Daubigny, à Auvers; au mois d'août, il voyage, en compagnie de ses confrères Dumax et Estienne, sur les côtes de Bretagne; il fait une série d'études à Saint-Malo, à Saint-Servan et à Dinan. Voilà les seuls points de repère que nous ayons pour cette année-là.
Commenter  J’apprécie          00
Millet commence l'année 1866 en se transportant par la pensée dans son cher Gréville. Le tableau qu'il destine à la prochaine exposition du Palais de l'Industrie reproduit un site de là-bas, qu'il a décrit dans les lignes, consacrées à son pays, que j'ai mises sous les yeux du lecteur en commençant le présent livre. Relisons le passage : Ce n'est qu'en arrivant par le bout qui est vers la mer qu'on a, tout d'un coup, en face de soi la grande vue marine et l'horizon sans bornes. Auprès de la dernière maison, on voit un vieil orme, qui se dresse sur le ciel infini. Depuis combien d'années ce pauvre vieil arbre est-il battu par le vent du Nord ? J'ai ouï dire aux anciens du village qu'ils l'ont toujours connu comme je l'ai vu.
Commenter  J’apprécie          00
Les travaux que mentionne, en dehors de celui-là, la correspondance de Millet avec ses amis au lendemain du Salon de 1853 ne renferment aucun symbole caché. Il s'agit de peintures et de dessins dont les sujets reproduisent sans arrière-pensée la vie courante de la campagne. Mme Millet servait communément de modèle à son mari pour un mouvement ou un détail de costume. Elle arborait bravement alors l'accoutrement d'une humble paysanne, endossait un caraco de grosse laine, enveloppait ses cheveux d'une « marmotte » nouée sur le devant de la tête, et donnait la pose requise avec une complaisance toujours docile. Campredon, de plus en plus friand des oeuvres de son ami, s'adjugeait en ce temps-là, moyennant la modique somme de 30 francs, un dessin représentant une couseuse, les yeux baissés sur son aiguille. Or, une note, qu'on lit derrière cette couseuse et qui émane de l'heureux propriétaire de ses charmes, nous apprend que c'était un portrait fidèle de l'épouse du peintre.
Commenter  J’apprécie          00
Le jour où la ville de Paris, cédant au juste orgueil de compter parmi ses enfants un peintre comme on n'en fait plus, s'avisera d'inscrire le nom d'Édouard Manet sur la maison où il est né, le n° 5 de la rue Bonaparte jouira d'un lustre qui lui revient. Le 2 janvier 1832, quand cet événement en faisait une demeure historique, la voie où l'immeuble a pris rang portait un autre nom; elle s'appelait la rue des Petits-Augustins. Mais, en dépit des vicissitudes onomastiques, le logis n'a point changé d'aspect depuis lors.
Commenter  J’apprécie          00
A de rares exceptions près, ses ennemis désarment. La presse entonne un concert presque unanime d'éloges. « Rien n'est plus intéressant, écrit Ernest Drumont, que de voir les artistes contestés en possession d'un indiscutable succès ; et ce succès, nous croyons que M. Manet le tient, cette année, avec son Bon bock. » Armand Silvestre va plus loin. Il affirme que Manet a conquis, une fois pour toutes, sa place au soleil qui fait mûrir les réputations. « M. Manet, dit-il, a accompli la dernière évolution de son talent chercheur et parfois inquiétant. Il pourrait s'en tenir à cette page qu'il serait sûr de laisser le nom d 'un peintre. » Paul Mantz lui-même, dont on se rappelle la désinvolture méprisante à l'égard du peintre de Lola de Valence et de la Chanteuse des rues, a trouvé son chemin de Damas.
Commenter  J’apprécie          00
Dans le courant de 1872, Manet a fait un voyage en Hollande. Il en a rapporté un canal avec des moulins et des bateaux, qu'il vend la saison d'après à Durand-Ruel (Fig. I64). Mais ce n'est pas le seul profit qu'il a tiré de l'escapade. Il en revient avec le pinceau de Franz Hais entre les mains. Cette inestimable conquête se révèle dès le Salon de 1873, dans une toile intitulée le Bon bock. L'oeuvre lui est venue en tête au café Guerbois, en face d'un habitué du lieu, qui pratique la gravure et se nomme Belot. Ce Belot est un buveur de bière forcené. Il passe le plus clair de son temps à vider des bocks en culottant des pipes. Sa grosse figure rubiconde, encadrée d'une barbe inculte déjà grisonnante, et coiffée d'un bonnet de loutre, exprime une béatitude un peu lourde, que ne dément pas sa corpulence épaissie dans le farniente. Le héros s'est prêté avec complaisance à la fantaisie du peintre.
Commenter  J’apprécie          00



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Étienne Moreau-Nélaton (2)Voir plus

Quiz Voir plus

Culture russe

En russe, que veut dire "vodka", mot à mot ?

petite eau
alcool
boisson
petite goutte

15 questions
71 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}