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Les larmes noires sur la terre



Je pensais avoir lu tous les livres de @Sandrine Collette dont je suis une grande fan, mais je suis tombée à la bibliothèque sur Les Larmes Noires sur la Terre paru en 2017 et que je ne connaissais pas. Classé en RP, c'est plutôt un roman noir social d'anticipation. La jeune Moe à quitté son île pour suivre Rodolphe en métropole par amour. Mais elle va vite déchanter. Après de multiples humiliations, elle va le quitter avec son bébé et se retrouve à la rue. C'est là qu'elle va être arrêtée et conduite à La Casse, une espèce de bidonville carcéral où les gens vivent ou plutôt survivent dans des carcasses de voitures ou des roulottes, en s'épuisant aux travaux des champs.Dans cet environnement misérable et anxiogène elle va rencontrer un groupe de femmes fortes et solidaires aux passés douloureux qui vont lui permettre de surmonter la noirceur et la violence quotidiennes. L'auteur nous livre un roman oppressant avec des personnages attachants, tragique mais aussi avec des moments lumineux. Un excellent opus.
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Une trop bruyante solitude

Relecture salutaire.



Bohumil Hrabal est un écrivain tchèque tout à la fois très connu et confidentiel. Connu et souvent considéré comme "l'autre" grand écrivain tchèque de la fin du XXe siècle (à côté de Milan Kundera), et confidentiel parce qu'une grande partie de son oeuvre a été publiée initialement sous le manteau, qu'il fut interdit de publication (de 1970 à 1976 puis de 1982 à 1985, me souffle Wikipedia), que certains de ses ouvrages ont été pilonnés. Confidentiel également car, finalement assez peu connus sous nos cieux, les titres de ses livres, et surtout de celui-ci, se transmettaient il y a quelques décennies comme de précieuses confidences. J'ai ainsi eu connaissance de l'existence de cette Trop Bruyante solitude par une amie qui me donnait alors l'impression de se livrer plus que lorsqu'elle m'ouvrait les draps de son lit quelques semaines plus tôt... mais je m'égare. Je dois dire que cette première lecture, il y a environ vingt-cinq ans, m'avait laissé pour le moins dubitatif, et que l'étiquette de "chef d'oeuvre de l'auteur" me semblait pour le moins exagérée.



Qu'en dire aujourd'hui, après cette tardive relecture ? Une oeuvre complexe, imagée, dont il semble clair qu'elle est aussi (mais pas seulement) une attaque féroce contre un régime absurde. Toutefois, la dénonciation est en filigrane : ce n'est jamais simpliste, évident ou transparent, mais plutôt diffus, comme une ambiance qui naîtrait de la confrontation incessante entre une trivialité à la limite de la grossièreté et une poésie indéfinissable. Tous les chapitres ou presque commencent par la même accroche, mais tous apportent une nouvelle pierre à l'édifice, et nous conduisent à l'inéluctable conclusion. Les parallèlles abondent, et, si j'osais, finissent par se croiser, du destin des souris à la guerre des rats, des métaphores obscures à la sombre cave où Hanta, écrasé par son destin, illumine les recoins et quelques instants de ses précieuses trouvailles littéraires, philosophiques ou artistiques.



Inclassable, exigeant, mais aussi salutaire témoignage, ce livre mérite à mon sens le petit effort nécessaire à sa découverte.



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Les Hirondelles de Kaboul

Yasmina Khadra est un écrivain algérien fascinant et passionnant. Il fait même partie de ce club (très) restreint d'écrivains contemporains que j'apprécie et qui ne me déçoivent pas. J'en ai lu une petite vingtaine de ses romans dont, entre autres, le magnifique "Ce que le jour doit à la nuit".



Ici, Khadra quitte l'Algérie, théâtre habituel de ses romans, et se place résolument dans l'Afghanistan du milieu des années 90, lorsque le régime communiste soutenu par l'URSS s'effondre après une guerre meurtrière et dévastatrice. C'est dans cette période très troublée que les talibans prennent le pouvoir dans une capitale Kaboul, dévastée par les années de guerre, instituant un ordre moral féroce sur un fond de misère et de désorganisation de l'État.



La loi islamique impose une application rigoureuse de la "charia", qui définit, comme chacun sait, "le chemin qu'il faut suivre".



Un des aspects les plus visibles de ceci concerne les femmes confinées et invisibilisées à l'extérieur dans un tchadri, complètement soumises à un pouvoir masculin tout puissant et interdites de formation ou de travail. Mais au-delà de ça, nombreuses sont les interdictions pour tout le monde comme la musique ou le rire dans la rue. Même parler dans la rue est répréhensible aux yeux de la police des mœurs …



Le livre de Khadra évoque deux couples Atiq et son épouse Musssarat, Mohsen et son épouse Zunaira.



A la base, ces deux couples sont très différents. Mais en fait, ils sont ramenés à des conditions à peu près équivalentes. Le premier Atiq est un gardien de prison de femmes, dont le sort est pratiquement toujours la mort qu'elle soit par lapidation ou par pendaison ou par une balle dans la nuque suivant je ne sais trop quelle règle. Mussarat, est gravement malade. Un reste de morale et d'amour fait que Atiq ne se résout pas à faire ce qu'on lui conseille vivement, c'est-à-dire de répudier sa femme et de la mettre à la rue. En effet, Mussarat l'avait sauvé au temps de l'invasion soviétique …



Le second Mohsen était un fonctionnaire et Zunaira était avocate en des temps plus cléments. C'était un couple de gens aisés que la destruction de leur maison, la désorganisation de l'État et la loi islamique ont jeté dans la misère.



Comme toujours, le style de Khadra est intense et captivant pour réussir à nous plonger dans cette atmosphère accablante, effrayante et complètement anxiogène. D'une première lecture, on en ressort, indigné et révolté de ce qu'un pouvoir religieux est capable d'imposer à des femmes et des hommes par la contrainte. D'une deuxième lecture, apparaissent deux très beaux portraits de ces deux femmes de conditions très différentes mais qui n'ont rien perdu de leur personnalité et d'une certaine idée de la vie, malgré ces lois avilissantes. Elles sont porteuses d'un très fragile espoir. Il y a de la beauté dans le personnage de Mussarat et dans ce qu'elle va tenter par amour ! Et combien de respect doit-on porter à la révolte silencieuse de Zunaira !



En ce qui concerne Mohsen, Khadra analyse le pouvoir de la foule sur son comportement, qu'il ne comprend pas lui-même, lors de la lapidation d'une femme prostituée. S'il est bien entendu que ce pouvoir religieux refuse tout droit à la femme, en corollaire, il transforme insidieusement les hommes en lâches en leur accordant un pouvoir disproportionné qui les désolidarise des femmes. En d'autres termes, la femme ne peut même plus compter sur l'homme, son époux, pour la défendre.



Ce roman, écrit il y a plus de vingt ans, ne cesse malheureusement aujourd'hui, d'être cruellement et toujours actuel.
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