Thor, tome 1 : God of Thunder Reborn

Ce tome fait suite à Mighty Thor Vol. 5: The Death of the Mighty Thor (épisodes 700 à 706, numéro spécial At the gates of Valhalla) qu'il faut avoir lu avant. Il comprend les épisodes 1 à 6 de la série mensuelle suivante, initialement parus en 2018, écrits par Jason Aaron. Les épisodes 1 à 4 ont été illustrés par Mike del Mundo, les épisodes 5 & 6 par Christian Ward, ces artistes travaillant en couleur directe à l'infographie. Ce recueil contient également les couvertures variantes réalisées par Esad Ribic, James Harren, Christian Ward, Jack Kirby, Kaare Andrews, Russel Dauterman (*2), Mike Deodato, Ema Lupachino, Richard Isanove.

Épisodes 1 à 4 - Odinson (Thor) se trouve en Thaïlande, toujours avec son bras gauche remplacé par une prothèse métallique, et un marteau forgé par le nain Screwbeard, un marteau qui n'est pas Mjolnir. Il accomplit une mission : retrouver et défaire Juggernaut (Cain Marko) pour récupérer l'Oeil du Sorcier, un artefact magique. Dès le premier assaut, le marteau de Thor se brise sur l'armure de Juggernaut. Une fois le combat mené tant bien que mal à son terme, Odinson se rend sur la vieille Asgard où il échange quelques mots avec Heimdall, puis avec Odin. Il se rend ensuite sur Terre, où il retrouve Roz Solomon qui gère l'afflux de réfugiés en provenance d'Asgard. de manière inopinée, au port de Newark, Odinson reçoit l'offre d'aide de Loki en personne. C'est ainsi qu'ils se retrouvent en Niffleheim devant le roi Balder, Karnilla et Skurge pour leur prêter main forte dans leur bataille contre Sindr et son armée.

Le tome précédent portait dans son titre l'annonce d'un changement pour le titulaire du poste de Thor, avec des événements tels qu'Odinson ne pouvait pas juste réendosser l'habit de Thor comme au bon vieux temps. La couverture de ce nouveau tome montre qu'Odinson est de retour, mais, en prêtant attention aux détails, il y a quelque chose de bizarre dans le marteau qu'il fait tournoyer, et son bras gauche est toujours métallique. Dans le premier épisode, le lecteur découvre donc le statut exact d'Odinson : il n'a toujours pas récupéré son marteau Mjolnir, et il est obligé de servir d'ersatz. Dans un premier temps, il doit récupérer des artefacts magiques disséminés lors de la destruction d'Asgardia, puis il se retrouve à Niffleheim, prenant part à l'une des batailles de la Guerre des Royaumes. L'intrigue se nourrit de différents fils narratifs développés au cours des épisodes précédents, Jason Aaron se montrant très élégant dans la poursuite de cette tapisserie. Il entremêle l'attaque de Sindr avec la situation de Balder responsable de Hel, le retour de Hela, la présence de plusieurs fils d'Odin au même endroit, et des personnages secondaires comme le chien Thori. de manière très légère, le récit s'enrichit de tous ces éléments, les actions des différents personnages ayant des conséquences sur celles des autres, dans une interdépendance sophistiquée et naturelle. le lecteur se délecte aussi bien de savoir qui va remporter la bataille que du comportement de Thori et de ses expressions limitées.

Du fait des événements du dernier tome et du retour d'Odinson au premier plan, les responsables éditoriaux ont choisi de lancer une nouvelle série, pour marquer le début d'une nouvelle saison, même s'il s'agit bien de la suite de l'histoire racontée par Jason Aaron depuis le début. C'est aussi l'occasion pour Russel Dauterman de quitter la série et de voir arriver un nouvel artiste. Mike del Mundo avait déjà illustré une histoire de Elektra écrite par Haden Blackman. Cet artiste réalise ses dessins avec une approche globale, puisqu'il dessine à l'infographie, avec une forme de couleur directe pour 80% des éléments dessinés. Il met en oeuvre de savants camaïeux pouvant aussi bien rendre compte des couleurs de manière naturaliste, qu'établir une ambiance sur la base d'une teinte dominante, qu'enrichir chaque surface avec des nuances qui rehaussent son relief ou intègre une texture. Par exemple dans la première page, le métal du casque et celui du bras de Thor miroitent, le tissu de sa cape est lourd au vu de la manière dont elle se déploie, les ruines sont nimbées d'une lueur verte, les personnages avancent dans une sorte de brouillard grisâtre diffus, des nervures courent le long du tronc d'un arbre, etc. le tout reste facilement lisible tout en contenant une forte densité d'informations visuelles. Ainsi au fil des pages, le lecteur est régulièrement impressionné par des compositions où les couleurs apportent la majorité des informations : l'énergie qui parcoure les multiples marteaux déployés, le tourbillon des flocons de neige, la consistance de feu des soldats de Sindr, le pelage soyeux de Fenris, le halo de lumière dans lequel baigne l'accès au Valhalla, etc.

Pour autant, la narration graphique ne repose pas que sur de jolies couleurs agencées de manière sophistiquée dans toutes les cases. Mike del Mundo sait raconter une histoire, introduire des éléments visuels inoubliables, faire exister des personnages sur la page. Il sait concevoir une mise en scène adaptée à la situation, que ce soit pour suivre facilement le déroulement d'une scène de bataille, ou pour montrer la tension entre 2 personnages lors d'une discussion. Dans un premier temps, le lecteur est surtout sollicité par le chatoiement des couleurs et le plaisir esthétique qu'elles génèrent. Il ne tarde pas à remarquer que l'artiste ne se contente pas de tout recouvrir de jolies couleurs. Il apparaît régulièrement des éléments visuels inattendus et mémorables : la diversité des formes de marteau, un seau en carton contenant les os d'une divinité, un train progressant sur une voie ferrée enneigée avançant dans les montagnes, l'apparition saisissante de Fenris, le véhicule improbable utilisé par Balder, etc. de même les personnages imposent leur présence sur la page, dégageant une forte personnalité : Thor en tant que guerrier courageux qui s'avance vers son opposant, Thori en chien hargneux, Sindr littéralement tout feu tout flamme, Héla à la silhouette sombre qui impose le respect, Loki entre facétie enfantine et roublardise matoise. le lecteur note à peine la baisse d'intensité d'informations visuelles dans l'épisode 4, l'artiste devant éprouver des difficultés à tenir le rythme de parution mensuelle.

Même s'il regrette la mise à l'écart de Jane Foster, le lecteur apprécie de retrouver Odinson dans le rôle principal, alors même que Jason Aaron continue à ne pas lui faire de cadeau. La tendance à foncer dans le tas et le léger sentiment de supériorité perdurent, apparaissant cette fois plus comme un trait de caractère que comme un défaut insupportable. Alors même qu'il attaque la dernière phase de son récit pour Thor et que l'intensité dramatique augmente, le scénariste sait faire preuve d'un humour un peu facétieux de manière organique, comme le comportement de Thori, ou le retour du mari d'Hela. le lecteur suit donc avec un grand plaisir les épreuves affrontées par Odinson, loin d'avoir retrouvé sa superbe.

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Épisodes 5 & 6 (+ prologue en fin d'épisode 1) - Des éons dans le futur, le roi Thor et ses 3 filles Atli, Frigg et Ellisiv ont réussi à ramener la vie sur Terre, avec un nouveau couple initial Jane & Steve. Thor se rend au chevet de Jane qui rend son dernier souffle. Il annonce ensuite la nouvelle de sa mort à ses enfants et grands-enfants. Peu de temps après, Mjolnir atterrit sur Terre et Thor écoute ce qu'il a lui dire. Peu de temps après, il s'envole dans l'espace et se retrouve face une entité cosmique ayant investi un nouvel hôte qui s'avère agressif et bien déterminé à tuer Thor pour mettre un terme à la renaissance de l'humanité sur Terre. Thor s'engage dans un combat mortel contre son adversaire pour la survie de l'humanité renaissante. Pendant ce temps-là, la planète Ego dotée de conscience et augmenté par le pouvoir de All-Black doit se battre contre un ennemi redoutable : un ver posé à sa surface. Alors qu'il a pu revenir sur Terre, Thor doit faire face à 4 monstres : Gorgilla, Monstrom, Goom et Fin Fang Foom. Ce dernier explique qu'ils viennent comme héraut de leur maître.

Dès sa première histoire sur la série en 2013, Jason Aaron a fait évoluer sa série aussi bien dans le futur que dans le passé. le lecteur n'est donc pas surpris de retrouver Odinson étant devenu le roi Thor, et ses 3 filles, à la fois parce que ce fil narratif bénéficie d'un prologue de 10 pages dans le numéro 1, à la fois parce qu'il s'agit d'une partie intégrante de l'intrigue depuis le début de la série, même s'il se demande bien quel pourra être l'incidence de ce développement sur la Guerre des Royaumes. Il prend donc l'intrigue comme elle vient : une sorte de nouvel Eden qui a son dieu sous les yeux (Thor) et une nouvelle mission qui le force à combattre un ancien camarade de beuverie, allié à une force cosmique bien connue. Ces éléments n'arrivent pas comme un cheveu sur la soupe, car le scénariste les a également développés dans un tome précédent avec la version féminine de Thor. L'intrigue progresse rapidement. Comme pour l'intrigue principale au temps présent, elle s'avère fort riche d'ingrédients intégrés précédemment. Christian Ward réalise également ses planches à l'infographie, avec des dessins semblant un peu plus légers que ceux de Mike del Mundo, des couleurs plus vives et des camaïeux plus intenses. La narration visuelle raconte une histoire plus spectaculaire en surface, en phase avec les forces cosmiques déchainées. La révélation contenue en dernière page donne un indice sur la manière dont ce fil narratif est susceptible de se rattacher au temps présent.

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S'il est habitué des comics, le lecteur savait d'avance que la série reviendrait tôt ou tard au statu quo habituel, avec Odinson maniant le marteau. Mais en fait, Jason Aaron se montre plus subtil que ça en conservant les défauts de caractère d'Odinson, en ne revenant pas au statu quo basique, en mettant à profit les différents personnages, les différentes époques, avec un humour en retenu, découlant naturellement des personnages et des situations, une preuve de son implication et de son amour pour eux et leur mythologie.