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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
tant que les lions n'auront pas leurs propres historiens, l'histoire de la chasse glorifiera toujours le chasseur"

proverbe africain

Chez les Ibos, on tient en grande estime l'art de la conversation, et les proverbes sont l'huile de palme avec laquelle on accommode les mots...

Chinua Achebe est donc le lion qui raconte l'arrivée de la colonisation britannique sous le règne de Victoria dans un village ibo de l'est du Nigéria.

Chinua Achede (1930 -2013) est un écrivain de langue anglaise mondialement reconnu. Ayant soutenu la sécession biafraise (1967 - 1970), il s'est exilé aux Etats Unis. Tout s'effondre a été publié en 1958.

le titre Tout s'effondre est tiré d'un poème de Yeats

Turning and turning in the widening gyre

The falcon cannot hear the falconer ;

Things fall apart ; the centre cannot hold

Mere anarchy is loosed upon the world

Okonkwo , le héros du roman, est un personnage influent du village, riche cultivateur d'ignames, polygame avec trois femmes, de nombreux enfants. Travailleur acharné, champion de lutte dans sa jeunesse, il a un caractère emporté et il peut être violent. Il est aussi très respectueux des coutumes et des dieux tutélaires et accepte les ordres des voyants et le bannissement quand il a transgressé les interdits. 

L'auteur raconte avec son style oral imagé la vie du village, les travaux des champs et le calendrier des semailles, des récoltes, les fêtes et l'alternance des saisons de pluie et de saisons sèches, la semaine de la Paix avant les brûlis et le défrichage de nouvelles terres. Respect des divinités et des cultures ancestrales dictent la conduite des paysans. Je lis avec curiosité et plaisir les techniques de culture de l'igname, richesse du village

L'igname, reine des cultures, était une souveraine trèsexigeante. Elle demandait pendant trois ou quatre mois une attention constante entre le premier chant du coq et le moment où la volaille va se percher pour la nuit. On protégeait les jeunes pousses de la chaleur du sol avec des couronnes de feuilles de sisal. Quand les pluies se faisaient trop fortes les femmes plantaient du maïs, des melons et des haricots entre les monticules. On soutenait ensuite les plants, d'abord avec des petits bâtons, puis avec des branches qu'on prenait aux arbres. les femmes venaient désherber trois  fois à des moments précis....

J'adore ces précisions techniques!

La fête de l'igname nouvelle est célébrée en l'honneur d'Ani, déesse de la fertilité de la Terre.

M'enchantent les récit des fêtes de mariages et de fiançailles où l'auteur détaille les plats qui seront présentés, et la quantité de pots de vin de palme. ...l'auteur raconte les visites chez les uns et les autres, comment est présentée et partagée la noix de cola...  Coutumes villageoises, rythme des saisons, croyances animistes,  les Ibos sont en harmonie avec la nature. Les cérémonies de retour des esprits me font penser à celles des Revenants que nous avons eu le plaisir d'assister au Bénin.

"Le pays des vivants ne se trouvait pas très loin de celui des ancêtres. Il y avait entre les deux de nombreuses allées et venues  surtout pendant les fêtes et aussi quand un vieil homme mourait, parce que les vieux étaient très proches des ancêtres. La vie était une succession de rites de transition qui le rapprochait de plus en plus de ses ancêtres "...

Société idéale? Pas vraiment, surtout si on se place du côté des femmes qui occupent une place très marginale, inférieure. La seule fille valorisée "aurait mérité d'être un garçon". A l'inverse, le fils qui déçoit son père est traité de femme. C'est aussi une société violente où la force physique est valorisée. 

C'est d'ailleurs ce dernier qui va adhérer aux christianisme. Pionniers de la colonisation, les missionnaires qui s'implantent d'abord auprès des faibles. Ils n'inquiètent pas les villageois dans un premier temps, temporisent. A leurs suite, après la construction d'une église, d'une école, les commerçants arrivent. Ce n'est que plus tard que se mettra en place une organisation, des tribunaux et que les notables perdront leur autorité.

"Le Blanc est très habile. Il est arrivé avec la religion, tranquillement et paisiblement. On s'est amusé de toutes ses sottises et on lui a permis de rester. Maintenant, il a conquis nos frères et notre clan ne peut plus rien faire; il  posé un couteau sur les choses qui nous tenaient ensemble et on s'est écroulés. "
Lien : https://netsdevoyages.car.blog
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Okonkwo, ancien champion de lutte, est un homme respecté par son clan, craint par sa famille. Mû par l'ambition de réussir là où son père avait échoué, et par la crainte de déchoir, il prospère, trouvant parfaitement son compte dans une Afrique claniste et animiste, régentée par le respect des ancêtres et des terribles et parfois cruels oracles. Tout irait pour le mieux pour ce notable patriarcal, dur avec ses enfants et épouses ; les affaires prospèrent grâce à beaucoup de travail, le crédit de la communauté, des pluies abondantes. Mais par accident, Okonkwo commet un "crime féminin" (un homicide involontaire en Europe), suite à l'explosion accidentelle d'un vieux fusil.
Conformément à la loi coutumière, Okonkwo et sa famille sont bannis, pendant 7 ans, accueillis par sa belle famille à quelques lieues. Il y retrouve une certaine aisance matérielle, mais son prestige ternit.
De retour au village, le bannissement achevé, Okonkwo constate des changements ; Mr Brown, missionnaire, a entamé son oeuvre. Loin de heurter de front la religion locale, il va convertir, petit à petit, les "laissés pour compte", les exclus du système traditionnel. Tenant un discours non violent (son Dieu n'est il pas qu'un dieu d'amour, qu'il n'est pas besoin de craindre ?), il accepte de bon coeur le terrain "maudit" que lui cède la communauté, certaine de l'hostilité des esprits, qui ne se manifesteront jamais. Après l'église, le blanc va s'occuper de la justice (en recrutant notamment des auxiliaires originaires de régions éloignées), de l'école, de faire prospérer le commerce. Mais, Mr Brown est bientôt remplacé par Mr Smith, qui tient un discours nettement plus exalté, entraînant un villageois converti à commettre un sacrilège vis à vis des rites ancestraux : la tension monte au sein de la communauté maintenant divisée. Okonkwo, de son propre chef, en opposition avec son clan, prend une initiative malheureuse ; son peuple va bientôt devenir un simple objet d'étonnement exotique, voire d'études ....
Ce roman, écrit en 1958, décrit avec subtilité et nuances la "kulturkampf" ayant précédé le colonialisme en Afrique. Dans une lutte terrible et cynique, l'Occident a su déstabiliser une civilisation peut être un peu trop stable, qui a du mal à penser l'autre, qui peut être malintentionnée et qui peut venir de loin avec des intentions prédatrices.
Mais ce roman ne présente pas qu'un seul intérêt historique : les personnages ont une psychologie (la tradition laisse la place néanmoins aux doutes, aux ambitions personnelles, aux sentiments, à la ruse même), la description des phénomènes naturels est magnifiquement écrite (les sauterelles, les pluies, la chaleur ...).

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QUELQUES REPÈRES DE LECTURE
Tout s'effondre de Chinua Achebe.

Le Nigéria - Pays le plus peuplé d'Afrique, avec 180 millions d'habitants, le Nigeria représente la deuxième économie d'Afrique, derrière l'Afrique du Sud.
Les Ibo (ou Igbos) résident dans le Sud-Est du Nigéria. Chinua Achabe est élévé dans cette culture. Il y place son roman.
La fin du XIXème siècle, le début du XXème siècle, c'est la période choisie pour le roman. Une grande première partie nous permet d'accompagner des personnages dans la vie du village et des villages voisins. Achebe nous les présente comme ayant une compréhension stable de leur environnement, tant naturel que familial, politique ou religieux. Achebe tente de faire sentir comment, presque insidieusement, "tout s'effondre" avec l'arrivée des blancs, fonctionnaires et missionnaires, pourtant peu nombreux.
1930, naissance de Chinua Achebe - Son père travaille pour les missionnaires. L'enfant est aidé par des bourses pour ses études. Il connaît donc le bénéfice d'être proche des anglais. En même temps, il peut avoir une connaissance de ce qu'était (ou est encore) la société traditionnelle.
1958, publication de "Tout s'effondre" - le Nigeria obtient son indépendance en 1960. C'est un mouvement puissant qui concerne tout le continent (et au-delà). Pour se tourner vers l'avenir, les africains ont besoin de s'approprier leur propre histoire. Par son roman, Achebe partage l'histoire de son pays, avec ceux de son pays, ceux de son continent, et avec le monde.
Le besoin d'une littérature africaine, écrite par des africains et pour des africains - « Tant que les lions n'auront pas leurs propres historiens, l'histoire de la chasse glorifiera le chasseur » . Chinua Achebe aimait citer ce proverbe. Il traduit bien le sens qu'il donne à son écriture.
Tout s'effondre porte le numéro 1 de la collection "Africain Writers". le livre est traduit en cinquante langues environ, et les 50 ans de sa publication ont donné lieu à de nombreuses commémorations. Fondée en 1962 à partir de seulement quatre titres, la collection britannique "Africain Writers" va contribuer à la création d'une littérature africaine représentative du continent. Chinua Achebe s'investit fortement dans l'aventure. C'est aussi à ce titre qu'il est considéré comme le père de la littérature africaine moderne.
Lien : http://www.traverseesafricai..
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Ce livre vaut véritablement le détour. C'est une des premières plumes à avoir écrit en 1958 sur le prosélytisme missionnaire -en l'occurrence anglican- et le colonialisme vus de l'intérieur. C'est simple, émouvant et beau ! Je recommande !
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Un magnifique texte qui nous offre une vision véritable et beaucoup plus nuancée sur la colonisation, bien loin des débats tranchés sur le sujet. Et qui nous interpelle inévitablement sur notre vision du monde et la question de l'Autre.
La pierre angulaire de ce roman est le paradoxe de l'intersubjectivité, à savoir que ce qui nous lie est aussi puissant que fragile. Puissant du fait de la force des tabous, rites, et croyances des populations pré-coloniales du Niger, qui ont donné à la vie et aux événements un caractère profondément immuable. Mais très fragile dans le même temps, car il est déconcertant de constater avec quelle rapidité un tel système séculaire a pu s'effondrer face à l'inattendu, un cygne noir, l'arrivée des missionnaires et des colons européens.
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Tout s'effondre est un pamphlet puissant contre la colonisation, certes, mais en réalité, il est bien plus que ça.

Déjà parce que l'homme blanc n'arrive qu'à la fin du roman. Avant cela, Chinua Achebe nous raconte la vie d'un village igbo à la fin du XIXe siècle : son système politique, ses croyances, sa vie sociale... La langue est simple mais précise, terriblement suggestive. Derrière les mots, on devine l'hommage à cette culture complexe, mais pas seulement.

Car la culture igbo nous est aussi décrite comme violente, injuste, absurde. le personnage d'Okonkwo est peut-être celui qui l'incarne le mieux : il est digne et courageux, mais il bat ses femmes et ses enfants, il fait preuve d'une brutalité glaçante, jusqu'à tuer de ses propres mains son fils adoptif. En somme, la plume de l'auteur, lui même Igbo de naissance, nous permet de sortir des visions européennes de l'Afrique, complément cloisonnées entre mépris et idéalisme. Et c'est là que le roman prend un tournant génial.

Car au final, ce que Chinua Achebe dénonce, ce n'est pas seulement la colonisation, c'est le pouvoir, c'est la religion, c'est la violence patriarcale dans son ensemble. Ce n'est pas pour rien qu'un des passages les plus poignants du roman est la course effrénée d'Ekwefi, une mère qui veut sauver son enfant de l'oracle du village. Ce n'est pas pour rien qu'Okonkwo admire les qualités "viriles" de sa fille. Ce n'est pas pour rien que son fils montre déjà des signes de révolte. Au fond, la jeunesse igbo n'avait-elle pas tout ce qu'il faut pour initier par elle-même une métamorphose ?

Mais attention : Chinua Achebe ne tombe pas pour autant dans un relativisme historique abject. La fin du roman ne rate pas son coup. À l'arrivée des blancs, le lecteur, tout comme Okonkwo, est pris dans un sentiment d'injustice, d'amertume, de vertige. Autrement dit : tout s'effondre, et le message du roman est bouclé.
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Chinua Achebe est un écrivain nigérian. Il raconte une histoire terrible dans une afrique précoloniale. Les moeurs, les codes, les coutumes, les dieux y sont d'une étrangeté absolue et d'une grande cruauté. C'est un monde qui se trouve confronté brutalement à l'arrivée des colonisateurs qui imposent leur religion, leurs tribunaux, leur vision folle et fourbe des rapports humains. le début du livre est assez difficile à lire car il y a beaucoup de répétitions et les noms des personnages est assez compliqué à retenir mais ensuite le récit prend son envol. On pénètre dans la mentalité des fermiers d'umofia, des rapports familiaux, des drames qui se jouent. Ce livre a une force incroyable et laisse une empreinte durable.
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Magnifique roman qui n'a pas pris une ride pour peu qu'on le transpose dans un autre pays.

Tout y est dit : la vie simple et sage d'un village, de ses maîtres et croyances, un monde fait de rites et de traditions.
Et l'arrivée des colonisateurs, ceux-là mêmes qui vont imposer leurs lois au mépris de toute empathie, de toute humanité.
Cela débute par les missions d'évangélisation, mais cela est bientôt d'une autre époque. C'est principalement la prise de pouvoir par les autorités étrangères qui heurte.

J'utilise rarement le "je" dans ne critique mais là, je me lâche ! Comment peut-on imposer sa loi de telle manière à un peuple qui ne demande rien, si ce n'est de vivre selon des préceptes ancestraux qui leur conviennent tout à fait ?

Battre, emprisonner dans tous les sens du terme un peuple innocent sous couvert d'une dictature de couleur, de pensée, cela reste et restera inadmissible.

Je relirai donc sans doute ce magnifique texte à la lueur de l'une ou l'autre actualité mondiale.
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"Tout s'effondre", c'est la chute d'un homme et la fin de son monde, celui des Igbos. Nous sommes dans le sud-est du Nigéria, à la fin du XIXe siècle au moment où débute la colonisation. L'homme, c'est Okonkwo, un père de famille bourré de défauts mais respecté car respectueux des traditions de son clan. Il est dur et abusif envers les siens, il a très peu de patience ou de tolérance pour les faibles, il est très ambitieux et a soif de reconnaissance. Bref, il est l'incarnation du méchant chez Disney. Pourtant, Achebe ne va, dans son livre, ni traiter l'impérialisme en noir et blanc, ni simplifier à l'extrême le caractère humain. "Tout s'effondre" est un roman qui brouille ces vues simplistes et la juxtaposition des oppositions crée inévitablement une tension qui traverse toutes les pages du roman et le rend si fascinant. Dans une première partie, il nous décrit la société traditionnelle igbo, sans lyrisme, ni lourdeur, de manière factuelle, sans interpréter, ni juger. Il montre les aspects humains et inhumains de cette culture, sa tranquillité et sa violence, les croyances et les superstitions qui peuvent entrainer des sacrifices humains, les liens qui unissent les membres, présente les rituels religieux ou agricoles qui rythment la vie des gens, explique le règlement des conflits comme par exemple une expédition punitive dans un autre village pour réparer un crime. Tout cela dresse un tableau riche et vivant de ce monde imparfait et violent mais cohérent. Dans les deux parties suivantes, on assiste au choc inévitable entre ce monde et celui des occidentaux qui viennent coloniser et civiliser selon leurs règles. Mais là encore, Achebe traite ce conflit de façon nuancée. L'activité missionnaire est présentée comme source d'espoir pour les exclus ou les malheureux de la société igbo. Et pourtant, en fournissant un exutoire au mécontentement, elle détruit les liens qui unissent le peuple igbo. Un nouveau pouvoir et une nouvelle soumission s'installent, se substituant à ceux d'un monde ancien condamné à disparaitre. Achebe dit que ce qui a été perdu pour les Igbos, c'est la dignité, soit la pire chose qui puisse arriver à tout peuple. le devoir de l'écrivain est de les aider la retrouver en montrant en termes humains ce qui leur est arrivé. Achebe réussit brillamment. Il décrit douloureusement et tragiquement la tragédie qui peut survenir lorsque l'unique mode de vie qu'un homme a connu commence à s'effondrer.
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Immersion dans le Nigeria précoloniale, dans une tribu Ibo
J'ai découvert une culture africaine intéressante, élargissant un peu plus ma vision du Monde.
La première partie représente la vie clanique surtout l'histoire d'un homme prénommé Okonkwo banni de son clan, qui a son retour, "fera connaissance d'occidentaux ayant soif de conquête territoriale avec comme "bannière" le christianisme, mais aussi la justice qui diffère de celle des autochtones.
Les missionnaires proposent au début de construire une église, les ibos acceptent qu'elle soi construite dans le bois des ancêtres, un bois hanté.
Les ibos, pensent qu'ainsi les missionnaires seront punies par les défunts.
Les villageois remarquant que rien ne se passe, dès lors, ils fréquentent l'église.
C'est un ainsi qu'Okonkwo fera tout son possible pour raisonner ses camarades pour un retour à leurs anciennes pratiques séculaire et non séculière des missionnaires.
Ce roman est un classique méconnu.
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