Le corps des femmes

Les femmes artistiques furent les plus souvent en première ligne des combats civiques.

Une oeuvre du XVe siècle m'est contemporaine puisque je la regarde aujourd'hui. Et certaines oeuvres d'antan me semblent si vivantes qu'elles sont aujourd'hui mes contemporaines, puisque je les regarde. La peinture est toujours anachronique par rapport à son propre temps ; elle ne se contente pas de montrer, elle pense et elle nous fait penser.

Faut-il décrocher des murs des musées les femmes nues de Gauguin, les petites filles de Balthus dévêtues, l'Olympia de Manet ?
Le débat fait rage et il est passionnant et profond. Il est interdit d'interdire et la contextualisation et la profondeur de champ d'une histoire des mentalités sont indispensables pour pouvoir apprendre à regarder.
Tout est à regarder, rien ne doit être censuré.

Pour les artistes femmes, le combat pour la visibilité de leur travail est loin d'être gagné, même si leur statut s'est amélioré et leur inclusion [...] semble aujourd'hui faire consensus. Elles ne font plus exception. Elles ont droit à. Elles sont à égalité avec. En apparence. Et malgré le statut de reconnaissance incontestable dont peuvent se prévaloir une Louise Bourgeois, une Annette Messager ou un Joan Mitchell, combien d'artistes, vivantes et mortes, restent encore aujourd'hui inconnues du public ?

On sacralise la femme pour mieux la salir ? Pour mieux la détruire ? Parce qu'elle provoque de la peur ? Parce qu'elle est sorcière ? Parce que sa puissance sexuelle semble illimitée ?
Les fantasmes conduisent à l'asservir, à la soumettre, à la nier.

L'art ou la vie. L'art pour permettre de continuer à vivre l'enfer d'être sur terre. Sortir de son corps pour éteindre les souffrances.

Soit belle d'abords. Sois belle et tout en découlera. Sois belle et ton avenir sera assuré.

Ce n'est pas seulement du sexe de la femme comme sujet que s'emparent des peintres comme Ingres, Courbet, Manet... mais aussi d'une certaine idée de la sexualité féminine comme puissante, complète, n'ayant pas besoin de l'homme pour s'accomplir. Le corps de la femme comme une totalité. Le corps de la femme comme un monde en soi, qui n'appartient plus à l'autre sexe.