Selon Proust dans Le Temps retrouvé : "Les vrais livres doivent être les enfants non du grand jour et de la causerie mais de l'obscurité et du silence." Et si les scènes de lecture ont pu donner lieu à certains des plus beaux portraits de l'histoire de l'art, c'est sans doute parce qu'elles permettent une évocation de l'intériorité, du silence de l'âme. (p. 3)
Les livres dans la peinture
« Le sentiment que nous éprouvons pendant que nous regardons un tableau n’est pas à distinguer du tableau, ni de nous-même. Le sentiment, le tableau et nous-même sommes réunis en notre mystère. » Cette définition de Magritte pourrait s’appliquer à chaque livre, à chaque lecture.
Faire entrer un livre dans un tableau c’est comme y inclure la possibilité d’un espace supplémentaire et vertigineux, un espace infini. Car peindre un livre ce n’est pas seulement représenter un contenant, une reliure de cuir, un dos avec un signet et un tranchefil, des cahiers blancs couverts de caractères, c’est aussi esquisser un contenu, imaginer une façon de lire, inviter à la lecture et à l’écriture. C’est aussi représenter le rapport du corps au livre : la position, assise ou couchée, le jeu du regard, les gestes de la main. C’est enfin saisir l’espace et le temps suspendu de la lecture.
Omniprésent dans la peinture occidentale, le livre est comme une minuscule mise en abîme, une toute petite nature morte qui symboliserait la sagesse, la dévotion, l'érudition, la culture, l'intelligence, mais aussi la subversion, le rêve ou le fantasme. Faire entrer un livre dans un tableau c'est comme y inclure la possibilité d'un espace supplémentaire et vertigineux, un espace infini.