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Le Passe-Murailles" est probablement la nouvelle la plus célèbre de
Marcel Aymé. Ironique, tendre mais implacable, elle raconte l'histoire de Dutilleul, obscur petit fonctionnaire que l'arrivée d'un nouveau sous-chef réduit à la condition du martyr.
Continuellement humilié par ledit sous-chef, Dutilleul trouve le courage de se révolter et, pour ce faire, trouve l'utilité d'un potentiel que, jusqu'alors, il n'avait pas jugé utile d'employer : pouvoir passer sans problème d'une pièce à l'autre en traversant les murs.
Pour tout dire, jusqu'à ce que l'affreux sous-chef le reléguât dans un placard poussiéreux, Dutilleul jugeait son étrange qualité comme superflue et même peu reluisante. Il s'en était plaint à son médecin, lequel, diagnostiquant du surmenage, lui avait prescrit un certain médicament à prendre régulièrement. Dutilleul avait absorbé un seul sachet puis, après avoir rangé le médicament dans un tiroir, l'y avait oublié. le point est d'importance : ne l'oublions pas.
Mais la trentaine d'apparitions que la tête de Dutilleul va faire, tout au long de ce mémorable après-midi, dans le bureau de son supérieur hiérarchique en s'affichant au mur de celui-ci, tel un menaçant et bavard trophée de chasse, va convaincre le petit fonctionnaire de l'importance de son "don."
Et aussi du plaisir qu'on peut goûter à traverser les murs et à démontrer ainsi, à l'univers tout entier, qu'on lui est supérieur ...
Bien sûr, Dutilleul va en abuser, de ce plaisir. Bien sûr, l'aventure tournera mal et, si vous voulez vous en convaincre, allez donc faire un tour place
Marcel Aymé, à Montmartre.
A cette nouvelle que vous citeront même ceux qui n'ont pas lu
Marcel Aymé, succèdent "Les Sabines" où, un peu à l'instar de Dutilleul, une malheureuse jeune femme se voit recevoir le don d'ubiquité ; "La Carte" et le "Décret", deux récits extrêmement grinçants qui traitent le premier du rationnement des "tickets de vie" pendant la guerre et le second, des solutions, pour le moins curieuses, apportées aux problèmes soulevés par l'heure d'été là aussi en temps de guerre ; "Le Proverbe", lui aussi très connu au sein de l'oeuvre de
Marcel Aymé ; la malicieuse "Légende Poldève" et "L'Huissier" où le romancier nous livre sa version personnelle du Paradis ; "Le Percepteur d'Epouses", dont le titre se passe de tout commentaire ; "Les Bottes de Sept Lieues" et Antoine, son attachant petit héros et enfin "En Attendant", autre récit évoquant les files d'attente de l'Occupation.
Un merveilleux petit recueil, drôle, émouvant, féroce, abominable même par moment mais qui ne donne qu'une envie : lire et relire
Marcel Aymé. ;o)
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