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Critique de Lililaluize


Existe t'il plusieurs familles de lecteurs ? Plusieurs sortes de passionnés ? Subsiste t'il encore des personnes qui vivent dans une bibliothèque ambulante et qui s'octroient le droit au quotidien d'en sortir des livres qu'elles traînent à chaque coin de rue, au bureau, dans un train ou salle d'attente ?
Nous sommes sûrement un certain nombre parmi la population, mais dans cet entre-nous, sommes nous tous similaires ?
Avons nous la même définition du livre, de l'écriture, des auteurs ? avons nous le même idéal ou encore une approche commune à la littérature ?
Jusqu'où le livre délimite nos contours et nous façonne ? habitez vous en eux ou est ce eux qui logent dans votre âme ?
Êtes vous le taiseux dans une librairie qui s'imprègne et ne supporte une parole par peur d'être sorti de sa communion avec le papier ou celui qui parlemente au milieu des milliers de murmures enfermés dans des couvertures ?

Enis Batur ne vous donnera pas la réponse à mes questions mais vous laissera par le pouvoir de ses mots enivrés et son oeil esthète entrevoir sa propre interprétation de la folie livresque, du bibliophile habité et dévoré par les mots.
Dévorés nous pouvons l'être pour certains. Dévorés pour naître à chaque fois une nouvelle fois différents et tiraillés par divers raisonnements , riches en se sentant si pauvres , abasourdis ou émus par la beauté ou l'étrangeté d'un tête-à-tête singulier . Qu'il soit refuge ou prison inquiétante, aucun livre ne devrait être écrit ou lu pour s'oublier ou omettre notre condition ou horizon, il est le reflet de la vie non un miroir sans teint floutant l'essentiel, l'essence même qui construit nos sens.

Et c'est en héritant de "la maison aux livres" qu'un écrivain reconnu ( un proche autoportrait de l'auteur) vagabonde tel un pèlerin sur son chemin de croix dans les sinuosités de son esprit lettré dans lequel apparaissent son amour presque divin pour les livres et son hymne aux auteurs exaltés tels Virginia Woolf, Umberto Eco, Jean Cocteau, Borges et j'en passe...

C'est boire du petit lait que de lire les mots d'Enis Batur évoquant la découverte d'une bibliothèque de verre, allant des ouvrages aux classements, ses pérégrinations littéraires des plus pointues aux plus insolites ; totalement embarquée par la magie effervescente et excentrique de ce lieu où je me tenais, noyée par ce plaisir indescriptible de partager cette adoration commune ; j'ai croqué dans la convoitise et la luxure pour mieux m'y perdre, quel court et intense bonheur que ces pages.

Certes, certains y verront un style pédantesque quand d'autres, à mon image, observeront un langage architectural esquissant chaque contour d'une passion consubstantielle à une entité propre.

Extrait :" J'ai lu les livres en profondeurs. J'ai aimé leurs secrets, leurs clés, leurs puits d'ombre. Quand à leurs promesses, j'ai toujours su qu'il suffisait pour y croire de ne pas se résigner au désespoir humain. Personne n'accepte de vivre sans explication, en suspens au milieu d'un désert sans signification. J'ai parfois pensé que si je m'étais mis à écrire un livre qui promettrait une vie meilleure, j'aurais eu des lecteurs pour me suivre. Mais jamais je ne me serais autorisé pareille tentative, je n'ai jamais laissé entrer dans ma bibliothèque un auteur capable d'écrire pour simplement distraire les gens, les tromper et les détourner de leurs problèmes. "

Un livre captivant pour les amoureux de littérature et les épris du livre. Réconfortant, il l'est aussi de par son érudition et l'éclat des écrits d'Enis Batur à l'heure où le "feelgood" envahit les immenses gondoles des lieux sans âme, visant à étourdir, divertir les esprits et en allant donc à l'opposé de tous les aspects abordés.


Un éloge aux livres, à l'élégance littéraire et aux bibliothèques.
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