Papa disait vrai: résister, c’est la grande affaire. Il n.y a pas d’avenir qui vaille sans ça. Résister au cynisme, cette maladie des gens fatigués de vivre, résister à l’insignifiance ambiante , au découragement, à l’argent qui dévore tout, à la violence et surtout au chagrin.
Une vie réussie est une vie dans laquelle il y a des enfants, des songes dont on sort difficilement, d’inconsolables peines, de la grandeur, des erreurs profondes comme des graines enfouies dans le sol, une tour, une rue paisible, de la clairvoyance et le sens de l’Histoire, assez de place pour le mystère, de la bonté et quelqu’un à qui parler. P.130
Humainement si prometteur. P.128
L’Art de l’oisiveté (…) ces mots d’Hermann Hesse: « S’il faut des hommes qui construisent des maisons et les abattent, qui plantent des forêts et les coupent, qui peignent les volets et sèment les jardins, i l faut bien aussi quelqu’un qui voie tout cela. » p.98
On répète partout aux gens de garder les pieds sur terre, mais à peu près jamais de se laisser enchanter. P.77
Kroutchev (…) Le Monde: « Il a réussi sa vie mais manqué son oeuvre. » p.75
Les abeilles (…). Leur vieillesse (…) n’est pas comme la mienne l’occasion de se retourner et de regretter le passé. Ce ne sont pas des créatures créées pour la nostalgie. Peut-être devrais-je tirer une leçon de ces existences si brèves et si parfaitement vouées au temps présent. Le passé est un phare, non un port. (…) Je ne déteste pas de temps à autre tenir compagnie à mes regrets mélancoliques. J’y rencontre des audaces, des révoltes, des austérités et mêmes des douleurs aujourd’hui disparues, que j’ai peut-être trop tôt transformées en dogmes, en espérances exagérées, en fausses clartés. P.69
L’innocence nous revient-elle jamais après nous avoir quittés? P.65
On dit souvent que les choses n’arrivent pas pour rien. Il m’apparaît au contraire qu’elle ne font que ça, arriver pour rien. Mais n’est-il pas formidable qu’il n’y ait derrière toute chose aucune motivation particulière, hormis peut-être le miracle de l’existence, ce très pur contrepoids de la mort ?
Un instinct étrange, inexploré, nous poussait à croire que cette épreuve si étroitement vécue auprès de maman allait plus tard nous aider à vivre, justement parce que nos petites âmes personnelles, appelées en renfort, intervenaient, s'unissaient secrètement contre l'adversité et la fragilité humaine