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Citations sur Faux nègres (9)

Le trait d’union ne relie plus personne .Reste l’élan mystique, le poids des corps morts, l’élévation des âmes, les mots d’une histoire que nous forgeons sans y penser
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Mais silence, le président à tête de chérubin va parler. Il commence. "Chères Françaises, chers Français, il faut... il faut... il faut." A mille kilomètres de là, un conseiler d'Angela Merkel croit entendre : "Hilfe... hilfe... hilfe..." (A l'aide... à l'aide... à l'aide...") (p.307)
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L'aube, à l'heure où blanchit la campagne, n'est pas celle de Hugo, ni celle de Rimbaud, sa bonne pensée du matin, encore moins celle de Verlaine, cette aube qui grandit. L'aube d'ici (trois lettres comme une île) n'attend rien, ne provoque pas grand-chose. Elle arrive et c'est tout, c'est le réveil.
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Chemins parcourus : l'un qui ne bouge pas, pieds dans la terre domestique, l'autre qui s'évade d'un monde sauvage qui ne le retenait pas. Au final ,des idées différentes : celui qui refuse l'étranger par méfiance familiale, vieux souvenirs d'invasions séculaires, et l'autre, presque vingt années à parler d'autres langues, à traverser d'autres paysages au point de, revenu par inadvertance au pays natal, ne plus rien comprendre et d'endosser par erreur un costume de journaliste de pacotille. Même la question du rédacteur en chef (pourquoi les gens d'ici votent à l'extrême droite ?) lui demeure obscure. Son seul souvenir avant de partir, il grattait à la truelle des affichettes qu'un quidam s'évertuait à coller sur le poteau EDF en face de l'immeuble familial. C'était au début des années quatre-vingt dix, juste avant qu'il ne quitte le pays. L'extrême-droite était alors à l'image de ces flammes bleu, blanc, rouge, engluées par des colles nauséabondes, dispersées au hasard d'un espace public disjoint, armoires électriques, feux tricolores, abribus, poteaux indicateurs, cabanes de chantier, piles de pont. Prospectus de mauvais papier, limités aux maisonnettes de cantonniers, balancés sur le plastique des balançoires des jardins publics, à la manière d'un exotisme revanchard, marquant l'incongruité d'un discours alors dépassé. A son arrivée à l'aéroport, sur le titre des quotidiens, sur les périodiques des salles d'attente des hôpitaux, dans les premières heures de son retour, cette nouvelle notoriété de l'extrême droite lui saute à la gorge, s'affiche à la une et aux places d'honneur d'un espace public devenu soudainement cocardier. Les petites affichettes, grattées à la truelle, ont maintenant le format de poster de music-hall, un Kärcher ne suffirait pas à les décoller. La télévision relaie un discours pétainiste, une droite décomplexée s'époumone. Il avait quitté son pays à la Ve République : on joue maintenant retour vers le futur dans un espace incertain qui ressemble aux atermoiements de la IIIe.
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Le premier pavillon de ce premier lotissement existe toujours. Il appartient à présent à un routier solitaire et les volets sont toujours fermés. Les autres occupants sont arrivés à la suite du premier avec les mêmes ambitions, avoir une baignoire, une chambre pour chacun des enfants. La plupart sont restés. À l’époque, faire construire était un aboutissement durable. Nous comptons maintenant deux veufs, trois veuves et quatre couples vieillissants. Ceux qui ne se sont pas brouillés au fil des années s’échangent à l’occasion les photographies des petits-enfants.
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Un enfant qui meurt ou la littérature, des histoires ou la chanson des morts : Que choisir ? Rien, ne pas choisir, laisser faire seconde après seconde cette illusion d'existence tenue en nous, cette impression de l'illimité. Pour la percevoir, nous avons balisé le temps, secondes, minutes, heures, années, siècles, millénaires, l'accélération à rebours nommé histoire, la séquence des dates, leurs proximités (30 septembre 1891 : mort du général Boulanger; 10 novembre 1891 : mort de Rimbaud) leurs éloignements (la fête négre du marchand Paul Guillaume le 10 juin 1919, quarante six ans après les faux nègres du poète). Leurs intervalles passées sous silence : entre la mort de Rimbaud et 1919, il y a l'affaire Dreyfus. Entre 1938, date à laquelle Saint-John Perse négocie les accords de Munich, et le 28 mai 1964, où Claude Simon apostrophe Jean-Paul Sartre, il y a trois guerres, une mondiale et deux petites, Indochine et Algérie. Ne pas choisir, laisser faire.
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Au royaume de l'aveugle, le borgne est roi. Au royaume des aveugles, nous ne voulons plus voir ces clandestins que la mer rejette en noyés sur les plages, en congelés de train d'atterrissage, en électrocutés d'Eurostar. On s'en lave les mains, et dans l'eau salée en plus. Cependant, à force, ça commence à chiffrer. Mon Panthéon est décousu, si ça continue, on verra le trou de mon Panthéon. (p.333)
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Aujourd'hui, c'est vide-greniers, vidons nos symboles, érigeons-les en une seule matière digne de nous ressembler, un passé de Gaulois, un coq arrogant, dressé sur ses ergots, l'ennemi ne passera pas, Maginot a des statues, des rues, des places, quand bien même il a eu faux sur toute la ligne. (p.388)
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Raconter le temps qui s'éternise à partir d'un cimetière n'a rien de morbide, nous le savons bien. Eglise, boulangerie, cimetière sont l'apanage de toutes nos villes et de nos villages, même si, dans certains coins, la boulangerie se réduit à une camionnette. (p.365)
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