Une lecture avec des hauts et des bas.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que
Lucas Belvaux va rapidement dans le vif du sujet. En quelques brefs chapitres, les trois personnages principaux font leur entrée en scène.
Skender, vétéran de guerre, SDF, séparé de sa famille. Max, qui a fait plusieurs guerres avec Skender, aujourd'hui majordome de « Madame ». Les deux anciens amis se sont perdus de vue depuis une dizaine d'années.
Si après tout ce temps, Max renoue avec Skender c'est pour lui proposer un contrat avec Madame. Un pacte terrible, perturbant, totalement amoral, qui m'a fait craindre pour la suite du récit. Pas amatrice de récits qui prennent aux tripes, où le lecteur est maintenu sous tension dans une angoisse permanente, j'ai alors hésité à poursuivre ma lecture.
Et puis le récit, en se focalisant sur les six mois qui précèdent l'exécution du contrat, prend un virage plus centré sur les ressorts psychologiques. Reste une tension latente dans le récit à l'approche inexorable de l'échéance, mais l'analyse des tourments des personnages constitue le coeur du récit. Si j'ai suivi avec intérêt, parfois avec émotion, les points de vue de Skender et Max, j'ai eu plus de difficultés avec celui de Madame. Elle reste pour moi une énigme, et son pacte choquant, abject rend tout de même peu crédible toute cette histoire.
Le style vif et percutant de
Lucas Belvaux ne s'embarrasse pas de fioritures. Un staccato de mots qui donne au récit un aspect fragmenté, souvent déroutant.
« Un métier comme un autre. On mourait sans gémir. On tuait sans frémir. Comme ça. Ni chaud ni froid. On en parlait le soir en jouant aux cartes, en buvant de la bière. Pas normal, ça. Ça laisse des traces. Pas tout de suite. Après. Longtemps après. Quand ceux qu'on a tués viennent nous parler la nuit. Les spectres. Ceux qui marchent en traînant leurs boyaux, la tête sous le bras, ou qui la cherchent sous nos lits et la réclament. C'est leur vengeance. Ils y ont droit. Normal. Et nos nuits durent plus longtemps que leur agonie. »
A mesure que le récit avance, le texte prend plus d'ampleur et devient plus fluide, plus agréable à lire. Les personnages restent indécis et la tension monte progressivement, avant une fin inattendue et sans doute un peu trop précipitée.