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Critique de Patlancien


« On ne devrait lire que les livres qui nous piquent et nous mordent. Si le livre que nous lisons ne nous réveille pas d'un coup de poing sur le crâne, à quoi bon le lire ? » Franz Kafka.

« Ceci n'est pas un fait divers » de Philippe Besson fait partie de ces livres qui vous secoue et vous « uppercute » à sa lecture. L'auteur m'avait déjà interpellé une première fois avec son « Paris Briançon ». Il récidive avec son dernier roman. Une descente aux enfers dont on ne peut sortir indemne.

« Papa vient de tuer Maman ». L'histoire commence avec Léa, 13ans, qui annonce par téléphone à son grand frère que leur père vient de commettre l'irréparable. Un grand frère qui va vouloir nous faire partager par l'écriture, cet énième féminicide qui va faire exploser sa famille. Un meurtre comme il s'en perpétue tous les trois jours dans notre pays et qu'on ne veut pas voir classer au rang de simple fait d'hiver.

Philippe Besson va décortiquer tous les sentiments, les émotions que l'on doit éprouver quand on perd sa maman de 17 coups de couteau… On passe de narrateur à acteur dans un maelstrom de d'images et de flash-back qui nous emmène loin, très loin à la limite de ce que peut supporter notre humanité. La violence des scènes, la dureté des propos, la dramatique des personnages, tout est à cran et exacerbé. du chagrin à la culpabilité, de la tristesse à la colère, du désarroi à la folie ; le drame va déchirer et détruire ces deux enfants en les propulsant sur la scène des faits divers. le deuil doit se faire alors en public car il n'y plus de place pour cette famille ordinaire qui va devenir malgré elle médiatique.

L'écriture de Philippe Besson est ultra précise. Sa prose reste pourtant élégante et lisible. Il utilise pour cela une écriture à la première personne qui nous permet de rentrer dans l'intimité des personnages et ainsi mieux s'identifier aux protagonistes de ce drame. Les chapitres courts permettent de pénétrer rapidement dans l'histoire. Mais la force de cet auteur est de rester dans la sobriété en évitant le pathos. Une certaine forme d'austérité qui va nous protéger et nous aider à continuer la lecture comme ses personnages qui continuent à vivre malgré leur immense malheur. Il possède ce ton sobre et juste nécessaire à la lecture d'un tel drame sans voyeurisme.

Le roman de Philippe Besson veut redonner une place importante aux enfants victimes d'un féminicide. A ces vies qui sont brisées brutalement. Pour Léa et son frère , la vie ou ce qui en reste appartient désormais au fait d'hiver. Comme le dit l'écrivain : Elle relevait de la police, de la justice, et nous n'avions plus notre mot à dire.

Je remercie les Éditions Julliard et Babélio pour cet envoi. C'est un roman pas facile mais vrai qui sait nous remuer les tripes. Un roman utile et nécessaire sur un crime qui doit cesser d'être un simple fait d'hiver pour enfin mettre un terme au macabre décompte qui endeuille notre société moderne : le meurtre de femmes pour la simple raison qu'elles sont des femmes.

« Léa affectionne les balades sur la plage. Et peut-être qu'elle sourira, pour me laisser croire qu'elle va mieux. Ou improvisera un pas de danse, « comme faisait maman ». J'aimerais tant voir ma soeur qui danse. »
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