Où la vie nous conduira

Chez moi, la télé est toujours invitée à table ; pire, c’est elle qui nous reçoit. Elle est le cinquième membre de la famille et le couvert est mis de telle façon qu’on peut tous apercevoir l’écran. Les chanceux qui se présentent dans cette fenêtre sont dotés de pouvoirs surnaturels, ils sont les célèbres, ceux qu’on peut évoquer avec sa boulangère ou ses collègues puisqu’ils ont leur entrée dans tous les foyers. Alors rien qu’imaginer la tête de ma mère si j’apparaissais dans la lucarne à une heure de grande écoute… voilà, merde, j’en ai les larmes aux yeux.

Car c'est une véritable erreur de traverser l'existence sans faire de pause. De se laisser emporter par un rythme imposé et de rejoindre l'ultime destination sans avoir choisi la route qui y menait.

Dans la famille, ce qui fait de nous un bloc, ce ne sont pas les directions que nous prenons, ce n'est pas la langue que nous parlons, ce n'est pas le métier que nous exerçons. Ce qui fait de nous un bloc, ce sont nos valeurs. Celles que nos parents nous ont transmises à travers une infinité de petites choses impossibles à détailler. Celles qui font qu'on sera toujours là pour les gens qu'on aime, comme ils ont toujours été là pour nous.
Et ce, quel que soit l'endroit où la vie nous conduira.

Tout est susceptible de créer un vide, et la télévision est là pour combler ce vide. Celui des téléspectateurs isolés, des malades, des asociaux, des voyeurs, de ceux qui fuient le réel, qui n'aiment pas ce qu'ils voient depuis leur fenêtre ou qui s'ennuient, au fil de journées qui n'en finissent pas. C'est pourquoi les émissions s'enchaînent sans faillir. Variées et complémentaires. Addictives surtout.

J'ai découvert qu'en les regardant sans préjugés, les gens étaient plus intéressants. Et surtout j'ai appris que je pouvais aussi être intéressant aux yeux des autres.

Parfois, je voudrais parler au monde entier, dire qu'il faut profiter de chaque moment, ne pas attendre. Respirer plus fort et laisser de côté les soucis. Garder le meilleur. Le présent. La vie est tellement fragile qu'on devrait la protéger davantage, en savourer chaque seconde.

... de là où elle est, dans cet âge qu'on hésite à appeler le dernier, elle pourrait bien leur glisser quelques conseils. Ou peut-être un seul, finalement : regarder avant de traverser. Car c'est une véritable erreur de traverser l'existence sans faire de pause. De se laisser emporter par un rythme imposé et de rejoindre l'ultime destination sans avoir choisi la route qui y menait.

Lui expliquer que c'est aussi ça, la vie. Des rencontres incroyables qu'on n'avait pas anticipées et qui nous changent, définitivement.

«  Ta Louise, mon gars, tu ne vas pas la garder,longtemps. À la ville, elle va se trouver un type qu’aura pas les mains dans la merde et un beau matin, terminé ! Envolé, ton bel oiseau !

Respirer plus fort et laisser de côté les soucis.