Elle savait qu'elle était à sa place en accompagnant Illian jusqu'à Valingaï. La force qui la poussait en avant et que, faute de mieux, elle appelait destin, le lui criait. Elle espérait simplement que cette force émanaitde l'affection qu'elle épouvait pour le petit garçon et n'était pas un courant l'entraînant vers l'avenir sombre qu'elle entrevoyait parfois. Elle revint vers le feu et s'assit près de Salim qui lui sourit et passa un bras sur son épaule. Elle se blottit contre lui. Elle avait conscience de ne pas toujours lui offrir ce dont il avait besoin, ce qu'il méritait, ces gestes, ces mots, ces regards qui sont le reflet de l'amour mais, là encore, elle ne se sentait pas totalement maîtresse de ses actes.
Alors il faudra qu'un jour je te parle de ces sentiments étranges qui bouillonnent en moi, de cet irrépressible besoin d'espace et de mouvement qui me pousse vers un avenir dont je sais qu'il ne se déroulera pas à Al Jeit. Je ne serai pas Sentinelle. Jamais.
- Espèce de succube inique, balbutia-t-il. Tu seras moins volubiles lorsque tu seras morte tandis que je chevaucherai encore les vents.
Ellana, qui n'avait pas daigné se lever pour l'invectiver, éclata de rire.
- Arrête, Riburn, je t'en prie ! Les seuls vents que tu connaisses sont ceux produits par tes intestins putrides. Laisse la poésie aux Marchombres et contente-toi d'être méprisable.
Sa chambre baignait dans la douce clarté diffusée par une fontaine placée juste sous sa fenêtre et dont l'eau luisait d'une lueur bleutée rassurante. Au plafond, une myriade de formes luminescentes reproduisaient avec une extraordinaire fidélité les volutes de la voûte céleste tandis que, de temps à autre, une étoile filante, générée par l'art du dessinateur qui avait créé les lieux, traversait la pièce en une harmonieuse parabole.
L'Imagination est une dimension. L'Amour en est une autre. Tellement plus grande.
Le compliment tira un sourire mi-figue, mi-raisin au vieil analyste. Erylis venait en une seule phrase de louer sa sagesse tout en lui rappelant qu'il avait l'âge d'être son grand-père !
Fluidité et Harmonie. Un marchombre ne recule jamais devant un adversaire, il entre dans son cercle, lui vole son centre, devient maître de sa force et de son équilibre. Un marchombre est eau devant le feu, feu devant le froid, vent devant le fort, fort devant le faible.
Un des paradoxes des marchombres, et non des moindres, réside dans le paradoxe entre notre individualisme viscéral et l'organisation exemplaire de notre guilde.
"Pour la première fois de sa vie, l'idée que tout était perdu envahit le maitre d'armes. "