Olàfr pénétra vers le fond de la pièce. Il tenait sa hache devant lui. Et lorsque qu'il fut arrivé presque à l'estrade, il posa sur le plancher le bout du manche de sa hache et s'appuya dessus, mais personne ne le salua, tout le monde se taisait. En voyant que nul ne lui disait mot, il déclama une strophe:
S'agit en premier lieu de demander
Aux très taciturnes tenanciers
Pourquoi se taisent tous ici
Les vaillants arbres du bouclier;
On n'ajoute nul renom
Aux braves sans parole;
Longtemps me suis tenu ici,
Nul ne m'a salué.
Hàrvardr déclama une visa:
Nous en avons promptement abattu quatre
De ceux qui firent mourir ensanglanté
Le fils de Bjargey;
C'est, je le tiens, butin pour nous;
Hallgrimr dit qu'un de nos hommes
Est tombé; l'Eir des lances
Etait gonflée de chagrin,
Le serviteur fut assommé près des rondins.
Ils montèrent au hangar à bateaux. Leurs camarades étaient là et leur firent bel accueil.
Skarfr lâcha sa hache, mais Olafr avait brandi la sienne et frappa à la tête, si bien qu'elle s'enfonça aussitôt dans la cervelle. Sur ces entrefaites, Thorbjörn était parvenu à côté d'eux et frappa Olàfr entre les bras: cela aussi fut suffisant pour être une blessure mortelle et ils tombèrent tous les deux. Thorbjörn marcha alors sur Olàfr et le frappa en travers du visage en sorte que les dents et les mâchoires jaillirent. Vakr demanda: "Pourquoi fais-tu cela à un homme mort?" Il dit que cela servirait encore à quelque chose. Thorbjörn prit alors un linge, y déposa les dents qu'il garda.
Voici l'occasion de s'avancer
Pour les arbitres du soleil du fjord
Qui veulent assister le dompteur
Du cheval du feu du sillage ;
On dit que la peau des gens de l'Ísafjördr,
Leur forte magnificence,
A été abattue sans pitié
Pour le glaive des innoncents.
Point n'est venu sur mes yeux
Le sommeil depuis –
Le valeureux pointeur d'estoc
Du ski de la vague est mort
En moi sous les pointes des épées –
Que les arbres du sol de la charogne
Déchaînèrent rude bataille des glaives
Eux qui abattirent Öläfr innocent. (p. 40)