Confiteor

Pour la vraie foi, la présence d'un hérétique est mille fois plus dangereuse que celle d'un infidèle. L'hérétique a été nourri des enseignements de l'Eglise et vit en son sein, mais en même temps, par sa nature empoisonnée et pestiférée, il pourrit les éléments sacrés de l'institution. A partir de 1941, la décision qui fut prise pour résoudre le problème une fois pour toute fut de laisser la Sainte Inquisition aux enfants de cœur et de programmer l'extermination de tous les juifs sans exception. Et là où il devait y avoir de l'horreur, que cette horreur soit infinie. Et là où il devait y avoir de la cruauté, qu'elle soit absolue, parce que maintenant c'était l'histoire qui prenait la parole.

L'art est inexplicable.... On peut tout au plus dire que c'est une preuve d'amour donnée par l'artiste à l'humanité.

Comment se fait-il que je sois incapable de m'agenouiller devant qui que ce soit et qu'en revanche, quand j'entends la Pastorale de Beethoven, je n'aie aucun scrupule à la vénérer?

Ce n'est qu'hier soir, alors que je marchais dans les rues trempées de Vallarca, que j'ai compris que naître dans cette famille avait été une erreur impardonnable.

Parfois, je pense au pouvoir de l'art et de l'étude de l'art et je prends peur. Parfois, je ne comprends pas pourquoi les hommes échangent surtout des coups alors qu'il y a tant de choses à faire. Parfois, je pense qu'avant d'être des poètes nous sommes mauvais, irrémédiablement. Le problème, c'est que personne n'a les mains propres. Très peu de gens, pour être précis. Extrêmement peu.

Tuer au nom de Dieu ou au nom de l'avenir, cela revient au même. Quand la justification est idéologique, l'empathie et le sentiment de compassion disparaissent. On tue froidement, sans que la conscience en soit affectée. Comme dans le crime gratuit d'un psychopathe.

(...) et toi, comment tu l'as trouvé mon livre? - La question, la seule question qu'un auteur ne peut pas poser impunément sans courir le risque qu'on y réponde.

Si bien que j'étais un enfant unique observé par des parents avides de voir leur fils intelligent faire des étincelles. Ceci peut être le résumé de mon enfance : la barre très haut. La barre très haut en tout, même pour manger la bouche fermée et sans mettre les coudes sur la table et sans interrompre les conversations des grandes personnes, sauf quand j'explosais parce qu'il y avait des jours où je n'en pouvais plus (...)

Le grain de sable, c'est d'abord une poussière dans l'œil ; ensuite, cela devient un agacement dans les doigts, une brûlure à l'estomac, une petite protubérance dans la poche et, si le mauvais sort s'en mêle, cela finit par devenir une lourde pierre sur la conscience. Tout commence comme ça, [...] la vie comme les récits, par un grain de sable inoffensif, qui passe inaperçu.

J'en ai pris conscience quand une mère m'a dit comment se fait-il que Dieu permette que ma petite fille meure dans de telles souffrances, mon père ; comment se fait-il que Dieu n'intervienne pas pour empêcher ça. Et moi je n'avais pas de réponse et je me suis retrouvé en train de lui faire un sermon sur la cause efficiente du Mal avant de me taire, honteux, et de lui demander pardon et de lui dire que je ne savais pas.