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Citations sur L'observatoire (27)

Quelqu’un a pris mon télescope.
Ne t’inquiète pas, les étoiles sont toujours là.
Je m’en réjouis.
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Le manoir de l’Observatoire était un cube de quatre étages, massif, d’inspiration néoclassique. Un cube d’une saleté repoussante. Des taches noirâtres suintaient le long de ses façades comme autant de plaies putrides, et ses murs gris étaient ornés de graffitis rouge et jaune, que des vandales anonymes bombaient à la faveur de la nuit. Dont le plus remarquable était : L’amour existe pour vous aussi ! Les seules caractéristiques intéressantes du bâtiment, hormis sa laideur et sa taille imposante, étaient les quatre colonnes qui soutenaient son portique. Des colonnes éraflées et fissurées, dont une surtout penchait dangereusement. L’immeuble possédait une autre bizarerie, le dôme posé sur le toit d’ardoises, juste au-dessus du hall d’entrée. Ce dôme, jadis, avait été un observatoire. Un observatoire aujourd’hui privé de télescopes, et qui s’était transformé en havre où les pigeons déposaient religieusement leurs déjections, leurs petits, leurs moribonds et leurs morts.
Autrefois en pleine campagne, le manoir de l’Observatoire était entouré d’un parc, de granges, d’écuries et de champs. Sournoisement, avec le temps, la ville avait gagné du terrain, recouvrant chaque année de nouvelles prairies, jusqu’à atteindre le parc qu’elle étouffa sous l’asphalte, et les dépendances, qu’elle finit par détruire. Seul le bâtiment principal, le cube gris et massif, resta debout. Les habitants élevèrent un mur circulaire de dix pieds de haut tout autour de l’immeuble, une barricade pour signifier que la ville n’irait pas plus loin. Mais la ville continua sa percée, bien au-delà de chez nous, en construisant encore plus de routes et plus de maisons. Au fur et à mesure que la ville progressait, les routes aux environs du manoir de l’Observatoire devinrent plus larges et plus fréquentées que jamais, un fleuve de plus en plus impétueux qui finit par former un bras mort au milieu duquel se dressait, tel un îlot retranché, le manoir de l’Observatoire. Un rond-point, un refuge oublié de la ville, mais prisonnier du tourbillon de son inexorable avancée.
J’imaginais souvent notre maison sous les traits d’un vieillard, robuste et chauve. Un vieillard assis, ses bras flasques serrés autour de ses genoux arrondis, fixant désespérément le ballet ininterrompu des voitures, les immeubles environnants, plus petits et plus modernes, et la foule qui se presse sur les trottoirs. Il soupire pesamment ; il n’est pas sûr de savoir pourquoi il vit encore. Il ne va pas bien, ce vieillard, il va mourir. Il souffre de maux innombrables, sa peau est décolorée, du sang s’écoule de ses organes et se répand dans tout son corps.
Ainsi était notre maison, et nous y vivions raisonnablement heureux jusqu’à ce qu’un appartement changeât d’occupant.

(Suite de l'incipit)
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Comment expliquer les histoires d'Emma? Elles étaient vivantes. Elles remuaient. Elles vivaient! Elles étaient un irresistible tourbillon de couleurs et d'odeurs virevoltantes. Elles changeaient de forme, s'imbriquaient les unes dans les autres, se contredisaient, n'avaient plus ni queue ni tête, partaient dans des disgressions inattendues comme des trains qui changent brusquement de rails, se précipitaient dans des directions imprévues, disparaissaient, réapparaissaient, les romances se transformant en tragédies puis en comédies avant de retomber sur leurs pieds. Un univers de princes et de princesses, de marâtres, d'ânes qui chiaient de l'or, de dragons, de royaumes enchantés, de monstres, de barbes bleues, de sorcières, de lutins, de gnomes et d'autres créatures fantastiques.
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La solitude n'a de prix que lorsqu'elle est vécue au milieu des autres.
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Le silence avait repris sa place. Les seuls bruits qui nous parvenaient, hormis ceux que produisaient nos corps solitaires quand nous vaquions à nos occupations dans nos appartements, étaient ceux du poste de télévision du troisième étage. Il est vrai que cet appareil générateur de bruit est destiné à nous réduire au silence.
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Prenez une feuille et tenez-la en l’air, en direction du soleil. Vous verrez la feuille dans ses moindres détails, tout ce qu’il y a à l’intérieur, toutes ses nervures, rien de cette feuille ne vous échappera. Anna ressemblait un peu à cela après que je lui eus parlé, ce soir-là. Son visage affichait une expression d’angoisse telle que je pus deviner tout ce qui se passait dans son cerveau et dans son corps ; combien elle était malade, combien il était facile de la soulever ou de s’en débarrasser.
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En ce temps saturé de souvenirs, le présent était difficile à percevoir.
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Quel volume d’objets un individu moyen accumulait-il tout au long de sa vie ?
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Que cette jubilation à faire des phrases vint à franchir le seuil du manoir de l'Observatoire, et nous allions vivre des temps difficiles. J'imaginais les portes s'ouvrant, les secrets s'étalant au grand jour. Il est bien connu que ce genre de conversation qui se déroulait sous mes yeux favorise la détente, et la détente est dangereuse. Détendus, nous baissons la garde. Surtout au beau milieu d'une conversation. La conversation détendue conduit à l'ouverture. Et dans ce cas, nous révélons souvent ce qui devrait rester caché.
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Je portais des gants blancs. Je vivais avec mon père et ma mère. Je n’étais pas un petit garçon. J’avais trente-sept ans. Ma lèvre inférieure était enflée. Je portais des gants blancs, pourtant je n’étais pas majordome. Je ne jouais pas dans une fanfare. Je n’étais pas maître d’hôtel. Je n’étais pas magicien. J’étais le gardien d’un musée. Un musée d’objets précieux. Je portais des gants blancs pour ne salir aucun des neuf cent trente-six objets de ma collection. Je portais des gants blancs pour ne rien avoir à toucher de mes doigts. Je portais des gants blancs pour ne pas avoir à poser les yeux sur mes mains.

(L'incipit)
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