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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Ce tome 20 des Tuniques Bleues est un peu à part dans le sens où il présente un aspect plus sérieux qu'à l'ordinaire, plus dramatique en somme. En effet, cette série est essentiellement comique même si elle se déroule dans un contexte difficile : la guerre de sécession. Pour autant, le travail de recherche des auteurs, s'appuyant souvent sur des faits authentiques, est à souligner, et on sent une réelle volonté de ne pas traiter ce contexte à la légère.

Avec Black Face, Raoul Cauvin va plus loin et choisit de regarder en face (sans jeu de mot) ce contexte en élaborant une histoire qui évoque les causes réelles de la guerre, dans ses aspects politico-économiques. On peut se demander pourquoi il fallut attendre le vingtième tome pour cela. Pour ma part, je trouve que le ton général de la série a évolué avec le temps, sans doute de façon concomitante aux ambitions des auteurs et c'est le temps qu'il fallait pour que l'idée arrive à maturation.

Rappelons que les nordistes font officiellement la guerre aux états du sud pour imposer l'abolition de l'esclavage. Dès le début de l'histoire, Cauvin balaye cet cause officielle et met en avant le réel motif qui est la volonté de certains politiciens du nord de s'emparer des richesses du sud. Il ne sombre néanmoins pas dans le cynisme le plus total puisque le général Alexander semble encore croire un peu à cette cause, une manière de nous dire que certains engagements ont pu être sincères. de plus, l'auteur a l'intelligence de mettre en scène, dans le rôle des pourris de service, les nordistes qui imaginent de se servir de Black Face (un des nombreux noirs engagés chez les yankees, employés aux basses oeuvres, bien que prétendument libres) pour fomenter une révolte des noirs sudistes, prenant ainsi l'ennemi entre deux feux. Mais, comme il est bien évident que l'on ne peut faire confiance à un "nègre", il sera accompagné d'une escorte, en l'occurrence Blutch et Chesterfield. Evidemment rien ne se déroulera comme prévu et lorsque Black Face décide que son combat l'opposera aux blancs, quels qu'ils soient, ce sont les yankees qui paniquent. Sentant la situation leur échapper, il décident d'employer une solution radicale pour en finir, s'enfonçant encore un peu plus dans le cynisme, certains diraient peut-être le "pragmatisme" en temps de guerre. L'évolution de Chesterfield, au cours de l'intrigue, est remarquable, lui qui a le don pour faire sien le discours officiel. Mais chacun sait que ce n'est pas la mauvais bougre et que, bien aidé par les piqûres de rappel de Blutch, il sait évoluer dans le bon sens.

Black Face est donc une évocation douce amère de l'imbrication du politique et du militaire en temps de guerre, tout autant que du racisme en général et des discours bien pensants qui le masquent. Un tome avec un peu moins de gags qu'à l'accoutumé mais qui nous offre une belle confrontation entre deux êtres que tout sépare (Chesterfield et Black Face) en forme de métaphore de la difficulté à remettre en cause les préjugés.
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Sans doute le tome le plus sérieux, le plus tragique et le plus fort de la série, Black Face revient sur la place des Afro-Américains pendant la guerre de Sécession. Si aucune date n'est indiquée, l'histoire se déroule sans doute entre la Proclamation d'émancipation du 22 septembre 1862 par Lincoln et son renforcement le 1er janvier 1863 par un texte additionnel qui entérine la création officielle des premières unités dites “de couleur” (United States Colored Troops), bien qu'il existât déjà quelques formations improvisées commandées par officiers blancs, réputés hauts en couleur eux aussi, à leur façon. Or dans cet album, aucun combattant en vue, les Noirs en sont encore à leur rôle subalterne initial d'ouvriers, terrassiers, fossoyeurs : libres mais pas trop.
Le grand mérite de cet album est de donner de la guerre civile une image plus proche de la réalité que le peu qu'on en connaît. Pas étudiée à l'école, on la voit en France comme le conflit entre les gentils Nordistes contre les vilains Sudistes. On en est loin, hein. Si l'abolition de l'esclavage est le motif principal de la guerre, d'autres s'y greffent, économiques, politiques, sociaux, culturels, pas tous idéalistes ni reluisants. Quant aux Yankees épris de liberté envers les Noirs à rendre jaloux Martin Luther King, le compte n'y est pas. Abolir l'esclavage est une chose, l'égalité de droits en est une autre, avec une grosse, une énorme, marge entre les deux. Rappelons que suite à la victoire des preux et sympathiques Unionistes, il faudra attendre encore quelques années pour voir les amendements sur la citoyenneté (1868) et le vote (1870) des anciens esclaves inscrits dans la Constitution, ce qui n'empêchera pas une bonne partie des États-Unis de rester sous un régime juridique de ségrégation raciale jusqu'aux années 60. Celles du XXe siècle, soit un siècle après la guerre de Sécession.
Cet album a aussi un gros défaut : j'avais souligné sur d'autres volumes le peu de présence des rôles-titres, ici, c'est l'extrême inverse avec un personnage de Black Face aux traits forcés outre mesure. Sa révolte autant contre un Sud esclavagiste que contre un Nord qui ne lui offre qu'une semi-liberté en le considérant comme un inférieur, on la comprend. Il n'y a pas de colère plus légitime que la sienne. Mais elle vire à l'excès inverse, à un extrémisme qui trouve on ne peut plus normal de massacrer civils, femmes et enfants, tout aussi indéfendable que les positions de ses opposants. Parce que c'est la même position raciste.
Ce choix d'écriture torpille le personnage : toute juste que soit sa cause, on ne peut adhérer à ses méthodes. La fin ne justifie pas les moyens, n'en déplaise à tonton Machiavel. Après… C'est aussi un choix d'écriture qui fonctionne en donnant une profondeur supplémentaire au message : le comportement des officiers nordistes, déjà bien cynique, immoral et peu reluisant dans les albums précédents, touche ici à l'abject et y saute même à pieds joints. Les monstres engendrent des monstres.
Lien : https://unkapart.fr/les-tuni..
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Un très bon opus, plus sérieux que la moyenne des épisodes avec des thèmes bien traités. Pas de manichéisme ou d'idées toutes faites mais plutôt un album qui fait réfléchir. On y apprend que la guerre de sécession est plus destinée à enrichir les politiques qu'à supprimer l'esclavage (Ha bon ?) et que les noirs ne sont pas beaucoup mieux traités chez les nordistes que chez les sudistes. Un conflit éclate entre noirs et blancs (de tout bord) qui n'est pas sans rappeler celui qui enflait dans les années 60 aux USA avant l'assassinat de Martin Luther king qui mit le feu au poudres. Très intéressant...
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Un excellent tome des Tuniques bleues !

Ici, pas de gag mais une grande histoire derrière L Histoire : la place des noirs pendant la guerre de Sécession. le sujet est traité sans manichéisme et les "magouilles" du Nord et du Sud sont mis en avant, sans politiquement correct.

Les auteurs ont réussi une très belle aventure, prenante et passionnante !

Même nos héros ne vont pas en sortir indemne.

Bref, une BD qui traite un sujet avec justesse et qui mérite d'être lu.
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Un album atypique le sujet du racisme y est traité sur un ton grave et intressant de mon point de vue
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Les auteurs de la série « Les tuniques bleues » ont toujours observé une certaine neutralité envers les belligérants de la guerre de Sécession. A travers les personnages du sergent Chesterfield et du caporal Blutch, le regard porté sur l'ennemi confédéré est souvent plein de bienveillance. Dans le même temps, Cauvin et Lambil ne se privent pas de critiquer gentiment l'Union, histoire d'équilibrer la balance. Cette guerre civile est moche pour les deux camps.

« Black Face » met l'accent sur le sort peu enviable des noirs au sein même de l'Union. Bien sûr, comparés à leurs frères esclaves du sud, les noirs nordistes sont libres. Mais libres d'aller où on leur dit d'aller et pas ailleurs, libres à condition de respecter les blancs, de brosser leurs bottes, de creuser leurs latrines ou d'enfouir leurs morts et tout cela pour un salaire de misère, juste de quoi ne pas crever de faim…

Black Face, un soldat noir de l'Union, cantonné aux basses besognes comme beaucoup des siens, est envoyé chez l'ennemi dans le but de pousser les esclaves noirs du sud à se soulever contre les Confédérés. Comme l'Union a peu confiance dans ses soldats de couleur, il est escorté (et surveillé) par le sergent Chesterfield et le caporal Blutch pour mener à bien sa mission. Mais Black Face va au-delà de ce qui lui est demandé en s'attaquant aux civils propriétaires des plantations. Pire, lui et sa bande armée se retournent contre le camp yankee ! En fait, Black Face mène sa guerre contre les blancs quels qu'ils soient !

L'humour est toujours présent avec nos deux compères contraints une fois de plus de se déguiser en civils pour passer inaperçus derrière les lignes ennemies. Il faut les voir en médecins amenés au chevet d'un colonel confédéré pour le guérir, sur les supplications de sa fille…

Le plan imaginé par l'état-major de l'Union pour rendre les soldats de la Confédération responsables de l'issue tragique du siège contre les mutins n'est vraiment pas glorieux. Heureusement, c'est sans compter l'humanisme de nos deux protagonistes…

Cet album dégage pas mal d'émotions notamment avec les relations viriles mais finalement saines entre le sergent Chesterfield et Black Face. A ce sujet, on verserait presque une larme en lisant les deux dernières cases de l'album.

Une fois de plus, les dessins de Lambil, à la fois tout en rondeur (pour les deux héros) et réalistes, illustrent parfaitement la série.

« Black Face » est un album indispensable pour tout amateur des « Tuniques bleues » qui se respecte.
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