Voici une histoire de choses invisibles, de prophéties, d'oracles lares et de liberté ; une histoire qui traite du hasard et de la difficulté de décider, de choisir, d'aimer, de grandir et de mourir. C'est une histoire de famille et de silences ; une histoire sur les signes et sur la difficulté de les interpréter.
Certains souvenirs se cache à l'intérieur des choses, ou à leur surface. Il reste là pendant des années parfois, muets, posés sur une tasse, dans le repli d'une couverture de laine à carreaux bleu foncé et bleu claire. Ils attendent. Les choses s'imprègnent des personnes et, quand on les touche le souvenir se réveille.
En quechua, on dit que le passé est devant nous puisqu'on peut le voir. C'est l'avenir qui est derrière, caché dans notre dos.
Moi, je ne crois pas au destin. Mais si, d'aventure il existait, on devrait pouvoir le changer tous les jours.
Le sentiment de culpabilité, c'est quand tu te sens responsable de la tristesse de quelqu'un d'autre. Quand tu sens qu'une personne chère est malheureuse et que si elle va mal, c'est un peu ta faute. C'est un double noeud qui ligoté deux êtres..
Teresa, pour sa part, sentait le poids du toit de la ferme peser sur sa tête. C’était son panoptique, la prison où, de sa tour centrale, un seul gardien suffit pour surveiller toutes les cellules. Le prisonnier sait que le moindre de ses gestes peut être observé, mais il ignore à quel moment il est dans la mire du gardien. Il se peut qu’il n’y ait personne dans la tour, que tout le monde soit parti, mais le prisonnier croit qu’il y a toujours quelqu’un qui l’épie et le juge. Lorsqu’il comprend qu’il est devenu son propre gardien, il est trop tard.
Difficile de cacher l'amour quand il brille comme de l'or.
"Maman qu'est ce que ça fait quand on meurt?"
"Je ne sais pas ma chérie. On meurt et puis c'est tout".
Alors elle avait vu le visage de Térésa s'embrumer comme si elle savait bien, non pas ce que ça fait de mourir, mais ce qu'on éprouve quand meurt quelqu'un qu'on aime.
Note « C’est quoi, le sentiment de culpabilité ? avait, un jour, demandé Pilar, qui disait que, dans les montagnes péruviennes, une telle chose n’existait pas.
Le sentiment de culpabilité, c'est quand tu te sens responsable de la tristesse de quelqu'un d'autre. Quand tu sens qu'une personne chère est malheureuse et que si elle va mal, c'est un peu ta faute. C'est un double noeud qui ligoté deux êtres..
— C’est quand tu as survécu et que, du coup, tu décides de vivre le moins possible. C’est quand tu penses que ta vie ne vaut rien, moins que celle des autres, et que tu aurais mieux fait de leur laisser à eux la possibilité d’exister. C’est quand tu rétrécis chaque jour un peu plus, en espérant qu’un jour ou l’autre, on t’oublie et te pardonne. C’est quand tu te persuades que tu aurais pu faire quelque chose et que tu ne l’as pas fait, et que tu continues à vivre comme si de rien n’était. Le sentiment de culpabilité t’enferme dans la prison que tu as toi-même construite, en te faisant oublier qui tu es et ce que tu ressens. C’est quand tu sais que tu as fait un choix à la place de quelqu’un, aurais-je pu lui répondre. Quand tu te sens nulle, égoïste, incapable de tenir debout, et qu’alors, tu te fabriques toi-même, jour après jour, ta punition et ton malheur.
— C’est quand tu te laisses miner par les regards mauvais et par les paroles méchantes, que tu te persuades qu’elles sont justifiées. Quand tu imposes à ta bouche de rester muette face à la calomnie. Quand tu sais que ta tristesse est contagieuse, qu’elle blesse ceux que tu aimes, mais que tu n’y peux rien.
— Le sentiment de culpabilité, c’est beaucoup de tristesse ? aurait demandé Pilar.
— Oui, beaucoup de tristesse, mêlée à l’envie de disparaître.
Les mères et les filles se choisissent-elles librement ou se rencontrent-elles par hasard l'une de l'autre ?