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Citations sur Don Quichotte, tome 1 (95)

Aussitôt, tirant ses chausses en toute hâte, il resta nu en pan de chemise ; puis, sans autre façon, il se donna du talon dans le derrière, fit deux cabrioles en l’air et deux culbutes, la tête en bas et les pieds en haut, découvrant de telles
choses que, pour ne les pas voir davantage, Sancho tourna bride, et se tint pour satisfait de pouvoir jurer que son maître demeurait fou
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Mais il ne faut pas oublier le proverbe : derrière la croix se tient le diable.
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« Si la pierre donne sur la cruche, tant pis pour la cruche; et si la cruche donne sur la pierre, tant pis pour la cruche. »
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« J’ai remarqué par mille signes que mon maître est fou à lier, et moi non plus, je ne lui dois rien de retour, voire suis beaucoup plus fou, puisque je le suis et le sers, si le proverbe est véritable, qui dis : Dis-moi qui tu hantes, je te dirai qui tu es, et encore l’autre proverbe : Non pas avec qui tu nais, mais bien avec qui tu pais. Etant donc fou comme il l’est et possédé d’une folie qui bien souvent prend une chose pour une autre, et le blanc pour le noir, et le noir pour le blanc, ainsi qu’il le fit paraître le jour où il disait que les moulins à vent étaient des géants, et les mules des religieux des dromadaires, et les troupeaux de brebis armées d’ennemis, et tant d’autres choses de cette force, il ne sera pas fort malaisé de lui faire croire que la première paysanne qui passera par ici est madame Dulcinée. Et, s’il ne le veut pas croire, j’en jurerai, et si lui-même jure, je recommencerai à jurer. S’il conteste, je contesterai pareillement, et s’il s’opiniâtre, je m’opiniâtrerai plus que lui. [...]. Peut-être, par cette opiniâtreté, je ferai tant que désormais il ne m’enverra plus faire de pareils messages, voyant combien je lui en rends mauvais compte. Ou bien, il croira, ainsi que je l’imagine, que quelque méchant enchanteur de ceux qui, à son dire, lui veulent mal, aura changé la figure de sa dame pour lui faire déplaisir. »
Cette pensée mit en repos l’âme de Sancho Pança, de sorte qu’il tint l’affaire faite. Cependant, il s’arrêta là jusqu’à ce qu’il fut déjà un peu tard, afin que Don Quichotte crût qu’il lui avait fallu employer autant de temps pour aller et revenir du Toboso. Et cela eut un si heureux succès que, quand il se leva pour monter sur le grison, il aperçut aussitôt venir du Toboso vers le lieu où il s’était arrêté trois jeunes paysannes montées sur trois poulains ou pouliches : car l’auteur ne le précise pas, quoique au surplus l’on puisse croire que c’étaient des ânesses, cavalerie ordinaire des villageoises ; mais cela n’est pas de grande importance et il n’y a pas à s’arrêter pour le vérifier.
En conséquence, sitôt que Sancho découvrit ces paysannes, il retourna à grands pas pour quérir son maître don Quichotte, et le trouva soupirant et proférant mille complaintes amoureuses. Aussitôt que don Quichotte le vit, il lui dit :

« Comment vont les affaires, ami Sancho ? Devrai-je marquer ce jour-ci d’une pierre blanche ou d’une noire ?
- Il vaudra bien mieux, repartit Sancho, que vous le marquiez de vermillon, de même que sont les écriteaux des chaires de collège ; afin que le puissent bien voir ceux qui le verront.
- Donc, répliqua don Quichotte, tu m’apportes de bonnes nouvelles ?
- Si bonnes, répondit Sancho, que Votre Seigneurie n’a plus qu’à piquer Rossinante et à sortir dans la plaine pour voir la Dame Dulcinée du Toboso qui vous vient visiter, accompagnée de deux siennes damoiselles.
- O Dieu très saint ! s’écria alors don Quichotte. Que dis-tu, mon ami Sancho ? Prends garde à ne point me tromper, et craint de soulager par de fausses allégresses mes tristesses véritables.
- Quel fruit, repartit Sancho, retirerais-je de tromper Votre Grâce, et surtout quand nous sommes si proches de découvrir la vérité. Piquez seulement, monsieur, et venez, et vous verrez se diriger vers nous la princesse notre maîtresse, vêtue et accoutrée : enfin telle qu’elle est. Ses damoiselles et elle sont toutes reluisantes d’or, de chaînes de perles, de diamants, de rubis, et de toiles de brocart de dix épaisseurs. Leurs cheveux sont épars sur leurs épaules, et ce sont autant de rayons de soleil qui folâtrent au vent. Et surtout elles viennent à cheval sur trois cananées à robe pie, et je ne vous dis que cela.
- Haquenées, veux-tu dire, Sancho.
- Il y a pas de différence, répliqua Sancho, entre cananées et haquenées. Mais, qu’elles viennent sur ce qu’elles voudront, elles sont bien les plus galantes dames qu’on puisse désirer, et principalement madame la princesse Dulcinée, qui ravit les sens.
- Allons, mon fils Sancho ! dit don Quichotte. Et pour étrennes de ces nouvelles aussi bonnes qu’inespérées, je te donne la meilleure dépouille que je gagnerai à la première aventure que je rencontrerai, et, si cela ne te contente point, je te promets les poulains que mettront bas cette année-ci les trois miennes cavales qui, comme tu le sais, sont près de faire leurs petits au pré commun de notre village.
- Je m’en tiens aux poulains, répondit Sancho, car il n’est pas bien assuré que les dépouilles de la première aventure soient bonnes. »

Sur ce, ils sortirent du bois et découvrirent les trois paysannes déjà toutes proches. Don Quichotte jeta les yeux par tout le chemin du Toboso, et, comme il ne vit que les trois paysannes, il devint tout troublé, et demanda à Sancho s’il ne les avaient point laissées hors de la ville.

« Comment, hors de la ville ! répondit Sancho. Votre Seigneurie a-t-elle par hasard les yeux derrière la tête, si bien qu’elle ne voit point que ce sont elles qui viennent aussi resplendissantes que le soleil en plein midi ?
- Sancho, dit don Quichotte, je ne vois que trois paysannes sur trois baudets.
- Dieu me délivre maintenant du diable ! répliqua Sancho. Est-il possible que trois haquenées, ou comme on les nomme, aussi blanches que neige, vous paraissent des baudets ? Vive le Seigneur qui m’arrache cette barbe si cela est véritable !
Ami Sancho, dit don Quichotte, je te dis qu’il est aussi véritable que ce sont des ânes, ou bien des ânesses, que je suis don Quichotte, et toi Sancho Pança : pour le moins cela me semble être ainsi.
- Taisez-vous, monsieur, dit Sancho, et ne tenez point un tel langage. Au contraire, frottez-vous les yeux et venez faire la révérence à la dame de vos pensées, la voilà qui s’approche. »

Ce disant, il s’avance pour recevoir les trois villageoises, et, descendant de son grison, va prendre par le licou l’âne de l’une de ces trois paysannes, puis, mettant les genoux en terre s’écrie : « Reine, princesse et duchesse de la beauté, que Votre Hautesse et Grandeur daigne recevoir en sa grâce et bon vouloir votre esclave et chevalier, que voilà devenu pierre de marbre, tout troublé et sans haleine, de se voir en votre magnifique présence. Quant à moi, je suis Sancho Pança, son écuyer, et lui est le vagabond chevalier don Quichotte de la Manche, autrement nommé le Chevalier de la Triste Figure. »
En même temps, don Quichotte s’était pareillement agenouillé tout auprès de Sancho, et il regardait avec des yeux tout exorbités et d’une vue trouble celle que Sancho nommait reine et dame. Et, comme il ne voyait autre chose en elle qu’une jeune villageoise assez laide, la face ronde et le nez camard, il était tout suspendu et émerveillé, sans oser ouvrir la bouche. Les paysannes n’étaient pas moins ébahies, voyant ces deux hommes si différents à genoux et arrêtant leur compagne. Toutefois celle qui était ainsi retenue, toute fâchée et en colère, rompit le silence et dit : « Ouais ! Qu’on s’ôte à c’te heure du chemin, et qu’on nous laisse passer, car nous avons hâte. »
A quoi Sancho fit cette réponse : « O princesse et dame universelle du Toboso, comment votre cœur magnanime ne s’amollit-il pas, voyant ici en votre sublime présence la colonne et le soutien de l’errante chevalerie ? » L’une des deux autres, oyant ce discours, dit tout haut ces mots : « Attends un peu, je vas t’étriller, ânesse de mon beau-père ! Regardez un peu, je vous prie, comme les godelureux s’en viennent maintenant ici se moquer des villageoises, comme si on ne savions aussi bien qu’eux chanter pouille. Allez vot’chemin, et laissez-nous faire le nôtre, et bonsoir, la compagnie !
- Lève-toi, Sancho, dit alors don Quichotte, car je vois bien que la fortune n’est point assouvie de mon mal. Elle tient fermés tous les chemins par où il pourrait arriver quelque consolation à cette malheureuse âme que j’ai dans le corps. Et toi, ô trésor de toute perfection désirable, terme de la gentillesse humaine ! O l’unique remède de ce cœur affligé qui t’adore, puisque le malin enchanteur me poursuit, et a mis des nuages et des cataractes sur mes yeux, et que pour eux seulement, et non pour d’autres, il a changé et transformé ta beauté sans égale et ton incomparable visage en celui d’une pauvre villageoise, s’il n’a pas aussi changé le mien en celui d’un fantôme, pour me rendre abominable à tes yeux, ne laisse pas, je te supplie, de me regarder doucement et amoureusement. Considère que, par cette humble soumission et par cet agenouillement, je rends à ta beauté, ainsi contrefaite et déguisée, l’humilité avec laquelle mon âme t’adore.
- Figue de mon grand-père, repartit la paysanne, est-ce que j’étions venue ici pour ouïr des balivernes ? Otez-vous et laissez-nous aller, et grand merci vous fasse ! »

Sancho s’écarta et la laissa aller, tout content de s’être si bien tiré de son artifice. Mais à peine la villageoise, qui avait pris le rôle de Dulcinée, se vit-elle en liberté qu’elle piqua sa cananée avec un aiguillon planté au bout d’un bâton qu’elle tenait à la main, et la bourrique se mit à courir par le pré. Et, comme elle sentait la pointe de l’aiguillon qui la travaillait plus que d’ordinaire, elle commença à faire des ruades, de sorte qu’elle porta par terre la dame Dulcinée. Ce que voyant don Quichotte, il courut pour la relever, tandis que Sancho raccommodait et sanglait le bât qui avait aussi tourné sous le ventre de la bête. Le bât étant donc accommodé, et don Quichotte voulant relever et prendre entre ses bras sa dame enchantée pour la poser sur l’ânesse, la belle dame, en se remettant sur pied, l’ôta de cette peine : car, s’étant un peu reculée, elle prit de l’élan, mit les mains sur la croupe de la bête, et se trouva en même temps avec son corps plus léger qu’un faucon sur le bât et à califourchon, de même que si elle eût été un homme. Lors Sancho s’écria : « Par saint Roch, notre maîtresse saute mieux qu’un daim ! Elle pourrait apprendre à monter à cheval à la genette au plus adroit
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On sait que la beauté de la plupart des femmes a ses jours et ses époques ; que les accidents de leur vie la diminuent ou l'augmentent,et qu'il est naturel que les passions de l'âme l'élèvent ou l'abaissent,bien que d'ordinaire elles la flétrissent.
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La beauté , dans la femme honnête , est comme le feu éloigné , comme l'épée immobile ; ni l'un ne brûle , ni l'autre ne blesse ceux qui ne s'en approchent point.
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...quel terme fatal attend ceux qui , séduits par l'amour , se précipitent sans frein dans le sentier de perdition où il les entraîne.
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La raison de la déraison qu'à ma raison vous faites,affaiblit tellement ma raison , qu'avec raison je me plains de votre beauté.
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(...) ensuite, parce que le nombre des gens simples est plus grand que celui des gens éclairés, et que, bien qu'il vaille mieux être loué du petit nombre des sages que moqué du grand nombre des sots, je ne veux pas me soumettre au jugement capricieux de l'impertinent vulgaire, auquel appartient principalement la lecture de semblables livres. Mais ce qui me l'ôta surtout des mains, et m'enleva jusqu'à la pensée de le terminer, ce fut un raisonnement que je fis en moi-même, à propos des comédies qu'on représente aujourd'hui. Si ces comédies à la mode, me dis-je, [...] ne sont, pour la plupart, que d'évidentes extravagances, qui n'ont réellement ni pieds ni tête ; si pourtant le vulgaire les écoute avec plaisir, les approuve et les tient pour bonnes, quand elles sont si loin de l'être ; si les auteurs qui les composent et les acteurs qui les jouent disent qu'elles doivent être ainsi, parce qu'ainsi veut le public ; que celles qui respectent et suivent les règles de l'art ne sont bonnes que pour quatre hommes d'esprit qui les entendent, quand tous les autres ne comprennent rien à leur mérite, et qu'il leur convient mieux de gagner de quoi vivre avec la multitude, que de la réputation avec le petit nombre.
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— Qui pourrait-ce être, [...] sinon le fameux don Quichotte de la Manche, le défaiseur de griefs, le redresseur de torts, le soutien des damoiselles, l'effroi des géants et le vainqueur des batailles ?
— Cela ressemble fort [...] à ce qu'on lit dans les livres de chevaliers errants [...] mais cependant je m'imagine [...] que ce galant homme a des chambres vides dans sa tête.
— Vous êtes un grandissime faquin ! s'écria don Quichotte : c'est vous qui êtes le vide et le timbré ; et j'ai la tête plus pleine que ne le fut jamais le ventre de la carogne qui vous a mis au monde.
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