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Citations sur Les cygnes sauvages (35)

Le 26 juin, Mao fit une remarque appelée à devenir une directive essentielle en matière de santé et d’éducation : « Plus on lit de livres, plus on devient bête. »
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« Les ouvriers et les paysans n’inquiétaient pas Mao.
Il ne doutait pas un seul instant de leur reconnaissance vis à vis des communistes qui leur avaient enfin permis de manger à leur fin et de stabiliser leur existence .
Il éprouvait par ailleurs à leur égard un mépris profond , estimant qu’ils n’avaient pas les capacités intellectuelles nécessaires pour défier son pouvoir .
En revanche, Mao s’était toujours méfié des intellectuels .
Ils avaient joué un rôle important en Hongrie, et ils étaient évidemment plus enclins que quiconque à juger par eux- mêmes . »
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Quand on veut condamner, les preuves sont faciles à trouver.
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[...] ... En 1989, un cadre du parti qui travailla jadis pour la campagne d'assistance contre la famine m'affirma qu'il estimait le nombre total des victimes à sept millions pour la seule province du Setchouan, soit environ 10% de la population globale de cette région, riche au demeurant. Pour l'ensemble du pays, le chiffre se situait aux alentours de trente millions.

Un jour de 1960, la petite fille de la voisine de ma tante Junying, à Yibin, âgée de trois ans, disparut. Quelques semaines plus tard, sa mère vit une enfant qui jouait dans la rue, vêtue d'une robe ressemblant à celle de sa fille. Elle s'approcha et l'examina avec attention. Elle aperçut une tache indélébile qui lui permit de reconnaître le vêtement à coup sûr. Elle fit part de sa découverte à la police. Il apparut bientôt que les parents de la fillette vendaient de la viande séchée ; ils avaient enlevé et assassiné plusieurs bébés qu'ils avaient dépecés pour vendre leur chair, en prétendant qu'il s'agissait de lapin, à des prix exorbitants. Le couple monstrueux fut exécuté et l'on étouffa l'affaire, mais tout le monde savait que les meurtres d'enfants étaient relativement répandus à l'époque.

Des années plus tard, je rencontrai un ancien collègue de mon père, un homme très doux et fort capable, qui n'était pas du tout d'une nature à exagérer. Il me raconta avec beaucoup d'émotion ce qu'il avait vu dans une commune populaire pendant la famine. 35% des paysans étaient morts, dans une région où les récoltes avaient été bonnes, bien que l'on n'eût pour ainsi dire rien ramassé, puisque la main-d'oeuvre avait été réquisitionnée pour produire de l'acier. Par ailleurs, la cantine de la commune avait gaspillé une portion importante de ce dont elle disposait. Un jour, un paysan fit irruption dans son bureau et se jeta à terre en hurlant qu'il avait commis un crime épouvantable et en le suppliant de lui pardonner. En définitive, il apparut qu'il avait tué son propre enfant pour le manger. La faim avait été une force incontrôlable qui l'avait poussé à brandir son couteau. Le visage inondé de larmes, le fonctionnaire ordonna l'arrestation du coupable. Par la suite, il fut fusillé, en guise d'avertissement contre les infanticides.

Les autorités expliquaient officiellement la famine en alléguant le fait que Khrouchtchev avait brusquement forcé la Chine à rembourser à l'URSS une dette colossale contractée pendant la guerre de Corée pour venir en aide à la Corée du Nord. Le régime jouait ainsi sur une expérience vécue par une grande partie de la population, composée de paysans dépouillés qui se souvenaient fort bien d'avoir été harcelés par des créanciers sans coeur réclamant leur loyer ou le remboursement de prêts. En évoquant l'Union soviétique, Mao créait aussi un ennemi extérieur au pays auquel incombait toute la faute, et contre lequel le peuple chinois pouvait se mobiliser. ... [...]
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Peu avant 3 heures, tandis que les hauts parleurs grésillaient et qu'on effectuait les derniers réglages, la secrétaire du parti de notre département s'installa devant l'assemblée. Elle leva sur nous un regard empreint de tristesse et d'une voix basse, altérée par l'émotion, elle bredouilla : " Notre Grand Leader, le président Mao, sa Vénérable Révérence, ta-lao-ren-jia, est ...
Tout à coup, je compris que Mao était mort.
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[...] ... L'été 1950 fut exceptionnellement chaud et humide, avec des températures proches de 40° C. Ma mère se lavait tous les jours ; cette hygiène lui valut aussi des remontrances [de la part de ses camarades du Parti]. Les paysans, en particulier ceux du Nord, d'où venait Mme Mi, se lavaient rarement, faute d'eau. Du temps de la guérilla, hommes et femmes faisaient des concours d'"insectes révolutionnaires" (de poux). La propreté était considérée comme anti-prolétarienne. Quand un automne plutôt frais succéda à cet été torride, le garde du corps de mon père concocta un nouveau grief contre ma mère : selon lui, elle se comportait comme une grande dame du Kuo-min-tang [= créé par Sun Yat-sen, il s'agit du parti nationaliste chinois, ennemi des rouges, à la tête duquel se retrouvera un jour Tchang Kaï-chek], car elle avait osé se servir de l'eau chaude inutilisée par mon père. Pour économiser du combustible, il avait été décidé que seuls les officiels auraient droit à de l'eau chaude pour se laver. Mon père faisait partie de cette élite, mais pas elle. Or, les femmes de la famille de mon père lui avaient fortement déconseillé d'utiliser de l'eau froide à l'approche de son accouchement. A la suite de la remarque de son garde du corps, mon père interdit à sa femme de se servir de son surplus d'eau chaude. Elle avait envie de hurler chaque fois qu'il prenait ainsi parti contre elle, lorsque l'on s'immisçait dans les recoins les plus intimes de son existence.

Cette intrusion systématique du parti dans la vie privée des gens était l'un des piliers d'un processus essentiel, appelé "réforme de la pensée." Mao n'exigeait pas seulement une discipline rigoureuse, mais une soumission absolue de tous les esprits, grands ou petits. Toutes les semaines, les révolutionnaires devaient impérativement prendre part à une réunion dite "d'analyse de la pensée." Chaque participant passait publiquement en revue ses mauvaises pensées et les soumettait aux critiques des autres. Ces assemblées étaient généralement dominées par une poignée d'individus pharisaïques et mesquins qui abusaient de la situation pour donner libre cours à leur jalousie et à leur frustration ; quant aux communistes d'humble souche, ils en profitaient pour s'en prendre à leurs camarades d'origine bourgeoise. La révolution communiste étant par essence d'inspiration rurale, on partait du principe qu'il fallait réformer les gens afin qu'ils ressemblent davantage à des paysans. Ce système puisait toute sa force dans le sentiment de culpabilité des classes intellectuelles, conscientes d'avoir connu des conditions de vie préférentielles.

Ces réunions constituaient pour les communistes un remarquable instrument de contrôle : elles occupaient le peu de temps libre qu'il restait à chacun et supprimaient toute intimité. La mesquinerie qui y régnait se justifiait par le prétexte que décortiquer la vie de chacun garantissait une purification de l'âme. En réalité, cette étroitesse d'esprit était une caractéristique fondamentale d'une révolution qui glorifiait l'indiscrétion et l'ignorance, et qui s'appuyait sur la jalousie pour assurer son contrôle. Les deux camarades de cellule [= cellule communiste, cela va de soi, et non cellule dans une prison] de ma mère la harcelèrent ainsi pendant des mois, en l'astreignant à d'interminables autocritiques.

Elle n'avait pas d'autre solution que de se plier à ce douloureux exercice. La vie d'un révolutionnaire perdait tout son sens s'il était expulsé des rangs du parti. Il se retrouvait à peu près dans la même situation qu'un catholique excommunié. Quoi qu'il en soit, ces pressions faisaient partie de la norme. Mon père avait dû s'y soumettre et les avait acceptées comme un élément indissociable de la révolution ; il en subissait d'ailleurs toujours. Le parti n'avait jamais caché qu'il s'agissait d'un processus pénible ; mon père expliqua à ma mère que son angoisse n'avait rien d'anormal. ... [...]
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Pendant toute la période de la Révolution culturelle, je fus témoins d'attaques contre des gens qui disaient "merci" trop souvent, une habitude taxée d'"hypocrisie bourgeoise". La politesse était en voie de d'extinction.
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我回想着二十六年走过的路。我享受过特权,也遭受过磨难; 有过勇气, 也有过恐惧; 见过善良,忠诚, 也见过人性最丑陋的一面。在痛苦,毁灭和死亡之中,我更认清了爱及人类不可摧毁的求生存,追求幸福的能力。

Je passai en revue les vingt-six années que j’avais déjà vécues. J’avais connu des privilèges mais aussi la dénonciation, le courage comme la peur, la gentillesse, la loyauté autant que les aspects les plus méprisables de l’âme humaine. Malgré les souffrances, la destruction, la mort, j’avais découvert la force de l’amour et l’inébranlable aptitude de l’homme à survivre coûte que coûte et à rechercher le bonheur.
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La philosophie de Mao n'était probablement qu'une extension de sa personnalité. Il me semblait qu'il était au fond, par nature, un insatiable générateur de conflits, fort habile qui plus est. Il avait un sens aigu des instincts humains les plus néfastes, tels la jalousie et la rancœur et savait s'en servir à ses propres fins. Il avait assis son pouvoir en poussant les gens à se haïr les uns les autres. Ce faisant il avait obtenu des Chinois qu'ils accomplissent un grand nombre de taches confiés ailleurs à des spécialistes. Mao avait réussi à faire du peuple l'arme suprême de sa dictature. Voilà pourquoi sous son règne, la Chine n'avait pas eu besoin d'un équivalent du KGB. En faisant valoir les pires travers de chacun, en les nourrissant de surcroît, il avait crée un vaste désert moral et une nation de haine.
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La plupart des paysans se passaient fort bien de l'école. "À quoi cela nous sert-il ? Disaient-ils. Il faut payer, on lit des livres pendant des années, et en définitive, on reste un paysan qui gagne sa vie à la sueur de son front. Le fait de savoir lire ne vous fait pas gagner un centime de plus. Pourquoi gaspiller notre temps et notre argent ? "
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