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Critique de bobfutur


C'est sans doute parce que l'éditeur José Corti, à l'image si particulière et au catalogue bien fourni, s'est décidé à publier, cent ans après son original chez Flammarion, une nouvelle version du livre issu de la première expédition maritime en Antarctique de Jean-Baptiste Charcot, que l'appétit du lecteur avide et curieux fut réveillé.
Riche en aventure, cette signature garantit également une certaine qualité littéraire, rendant la lecture de ce livre particulièrement enrichissante, alors que nous n'étions pas revenu croiser dans ces parages depuis le magnifique voyage de Jean-Paul Kauffmann à Kerguelen ( dans « L'arche des Kerguelen - Voyage aux îles de la Désolation » ).

Du bien bel ouvrage, dans le fond comme la forme, pour ce récit d'une expédition-modèle au doux parfum de terra incognita ; de son financement limité et laborieux à réunir, à son indéfectible équipage, on y suit toutes les étapes de sa préparation, à travers une longue introduction de l'amiral Fournier.

Le coeur de l'ouvrage en est bien-sûr son journal de bord, tenu de manière talentueuse et littéraire par Charcot lui-même.
Les annexes scientifiques de la première édition ont été remplacées ici par une longue postface contemporaine de Pierre Escudé, concentrée sur l'héritage littéraire que ce texte a engendré dans l'oeuvre de Jean Giono, achevant de justifier cette publication chez un éditeur si « marqué » par une certaine littérature… celle des contes et du symbolisme, et bien-sûr celle de Julien Gracq

Un cahier central reproduit plusieurs photographies de l'expédition de manière sobre et émouvante, renforçant la proximité et la sympathie pour cet équipage si soudé dans sa diversité, modèle de courage et d'abnégation devant l'hypothétique promesse de découvertes, elles n'entrainant que d'obscurs palmes académiques et l'occasion de nommer quelques tas de cailloux gelés.

Une véritable passion anime tous ces hommes, des machines jusqu'au pont, accompagnée cette fois-ci — plutôt rare pour l'époque — d'une farouche volonté de respecter, voire de préserver la Nature.
Le rapport qu'entretient le capitaine Charcot avec les différentes espèces de pingouins / manchots rencontrées là-bas dépasse la simple anecdote mignonne ; elle revêt un caractère quasi-central dans son récit, le naturaliste devant la tentation de l'ethnologue… Ils y représentent le peuple indigène avec lequel on fraternise, tentant de ne pas bouleverser leurs habitudes… l'anthropomorphisme y servant avant tout sa plume…

On se prend à explorer les cartes de ces terres où l'on n'accostera jamais, prenant rendez-vous pour une prochaine aventure, retrouvant à cette occasion Rallier du Baty — élève de la marine marchande, alors promis à un brillant avenir sous le commandement Charcot — que nous saluerons quelques années plus tard pour ses aventures aux Kerguelen, enfantant d'un livre intitulé : « On peut aller loin avec des coeurs volontaires »

Ou comment une dose de romantisme, accompagnée d'un brin d'humanisme, permettent de garder un peu de confiance devant cette « folie » humaine que représente son besoin de tout explorer ( ou bien malheureusement de « conquérir » ? ), écho alpestre de ces « conquérants de l'inutile ».
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