La perception est une chose bizarre. Surtout quand il est question de chance.
Une personne qui survit à un accident d'avion est considérée comme chanceuse. Mais est-elle chanceuse ou malchanceuse de s'être trouvée à bord de ce vol ? La malchance d'être assis dans un avion condamné annule-t-elle la chance d'avoir survécu ?
Je ne comprend pas qu'on puisse avoir de la chance de n'avoir perdu qu'un bras.
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Il y a deux bâches étalées par terre ; sur chacune repose un corps bien habillé dans un état de décomposition plus ou moins avancé. Une tente en toile a été dressée au-dessus pour les protéger des intempéries.
Quelqu'un a tendu autour de la tente un cordon jaune sur lequel sont inscrits les mots "ne pas franchir". Pour dissuader les macchabées de se faire la belle.
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Les faux espoirs sont cruels, mais peut-être pas aussi cruels que l'absence d'espoir. Il faut l'avoir vécu pour le comprendre.
Je regarde dans ses yeux. J'y vois du chagrin, je le reconnais et je le sens, et même s'il ne le sait pas, ce chagrin constitue un lien entre nous.
Pour moi c'est ça, la prison ou la cellule d'isolement : un monde où l'autonomie de mon moi diabolique serait réduite à néant. Un endroit où je ne serais plus libre de tuer et enterrer le premier venu, là où je n'oserais même pas l’imaginer, là où mon corps et mon esprit seraient complétement détruits. Là où mon moi serait perdu à jamais.
Les larmes ne me viennent plus autant ces temps-ci. La douleur fait désormais partie de moi. M'en débarrasser serait comme perdre un membre.
Puis c'est ma mère qui m'appelle, m'expliquant qu'elle m'a vu à la télé assis à l'arrière d'une ambulance et me demandant ce qui m'est arrivé. Il est clair que les flics n'ont pas aussi bien bouclé le cimetière qu'ils le pensaient. Je lui réponds que je suis tombé dans le lac, et que je suis toujours en un seul morceau. Elle me recommande d'être prudent, ajoute que je ne devrais pas me baigner tout habillé et qu'elle et mon père sont inquiets.
Il n'y a rien de pire que de se réveiller tard avec la gueule de bois. C'est une chose que tout flic connaît à un moment ou un autre. Peut-être que la différence entre un bon ou un mauvais flic est la fréquence à laquelle ça se produit. Mais même cela n'est pas vrai. Les bons flics boivent souvent beaucoup juste pour tenir le coup.
Les églises sont remplies de personnes qui prêchent une chose et font son contraire.
Quelqu'un a tendu autour de la tente un cordon jaune sur lequel sont inscrits les mots "ne pas franchir". Pour dissuader les macchabées de se faire la belle.