J'ai eu l'occasion de voir une interview d'
Annick Cojean pour un petit magazine après le JT d'une chaîne télé belge. J'ai été happée par ce qu'elle a raconté sur son livre et ça m'a donné envie de le lire.
Je l'ai dévoré.
Ce livre, je ne l'ai pas aimé. On ne peut pas vraiment dire qu'on aime ce genre de livre. Ce n'est pas un coup de coeur, non. C'est un coup de poing. En plein visage. Un aller-retour qui ne vous laisse pas indemne. On peut y lire l'impensable, l'insoutenable.
Adulés par beaucoup, craint par d'autres et détestées par celles que l'on nomme les amazones ou les filles de Khadafi. Quoique. Certaines, hélas, n'ont pas su sortir de ce carcan charismatique qu'on lui a souvent prêté. Il était un Guide pour beaucoup mais pour bon nombre d'entre elles, il était un bourreau. Leur bourreau et elles avaient beau vouloir fuir, elles revenaient car plus rien n'existait autour d'elles.
Le livre se construit en deux parties. La première expose le récit de vie de Soraya, l'une de ces femmes prises par Khadafi sous son aile sous des prétextes fallacieux. La seconde relate des témoignages qu'a pu glâner
Annick Cojean au fil de ses investigations en Lybie et ailleurs. Les deux parties sont fort différentes l'une de l'autre mais pas sans intérêts. La seconde vient en quelque sorte étayer encore davantage le témoignage déjà très prenant de Soraya. Ils se font écho, ils sont la continuité de leurs histoires respectives. Des soeurs étrangères de sang mais pas de drames.
Ce qui est dramatique dans ce livre est le constat effarant de toute la machination, toute l'organisation mise en place pour assouvir les besoins les plus abjectes du dictateur. Surtout la manière dont il repérait ces filles (généralement très très jeunes) pour ensuite les rejeter comme de vulgaires mouchoirs (pour celles qui pouvaient encore espérer un avenir). le plus surprenant sans doute est la question de l'honneur qui revient souvent dans le livre. L'honneur pour les lybiens est essentiel, parfois plus que la vie d'un membre de sa famille, surtout si c'est une femme.
Ce livre m'a bouleversée, chamboulée. J'ai dû m'empêcher de verser des larmes, surtout quand je le lisais à la pause au boulot tant les témoignages sont crus et criants de vérité. le viol comme arme politique, comme outil de pression. Une arme destructrive, qui a ravagé bon nombre de femmes et détruit leur avenir.
L'épilogue d'
Annick Cojean traduit bien ce qu'on ressent quand on finit cette lecture. Un malaise, une gêne, une rage, la colère qui vous noue le ventre et qui nous fait dire "mais comment peut-on laisser faire ça ? " le tabou n'a pas de frontières. le tabou est d'une puissance déloyale. Encore plus là-bas.
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