L'auteur Evan S. Connell retrace en 310 pages la vie de
Mrs Bridge, l'héroïne de ce roman éponyme. 310 pages, c'est à la fois beaucoup pour rentrer dans l'intimité de cette femme, et en même temps, si court pour relater une vie. le tableau s'annonce idyllique, paisible : celui d'un couple petit-bourgeois américains des années 1930.
Finalement, le lecteur termine ses 310 pages perturbé : il oscille entre un sentiment d'oppression et de soulagement. Ouf, c'est enfin fini! Quelle triste vie...
L'auteur a choisi de relater cette vie parfaite sous forme de très courts chapitres. Choix judicieux qui accentue la sensation de vie étriquée de notre héroïne. Toute tentative, celle de s'émanciper des codes sociaux, du regard de l'Autre, du modèle de la femme au foyer parfaite qui vit dans l'ombre de son mari et des enfants, est tout simplement vouée à l'échec. Dans un silence feutré, sans heurts. Cette femme ne peut que s'engluer un peu plus dans un quotidien certes douillet, mais totalement insipide.
C'est ainsi qu'elle abandonne le projet d'apprendre l'espagnol, ou de peindre, ou de s'affirmer tout simplement, de se poser juste les questions : qu'ai-je envie de faire de ma vie? Qui suis-je vraiment?.
Mrs Bridge se résigne, s'étiole. le roman se termine sur sa solitude pathétique : "Mais, personne ne répondit".
L'auteur peint avec justesse le portrait d'une Amérique aisée et en apparence épanouie, mais qui étouffe, souffre d un mal être terrible.