Mes filles, qui ne manquent de rien, doivent savoir ce qu'il en coûte de quitter sa terre pour bâtir ailleurs une vie nouvelle...
Le pont est construit selon le même procédé que la tour Eiffel à Paris. Malgré ses trois cents mètres de hauteur, elle ne s’est pas encore écroulée !… J’espère que l’on me confiera un jour cette ligne. On doit éprouver une étrange sensation en franchissant le Viaur sur une machine à vapeur.
Pour la première fois, après avoir pesé la farine, elle m’offrit un verre d’eau de noix. Dans la cuisine, tout en cherchant les verres à liqueur et la bouteille verte, elle répétait :
— Il va nous revenir !
Dès lors, il me tarda de le revoir. Les jours me parurent longs ! Chaque matin, depuis la fenêtre de la souillarde, je surveillais la route, sans pour autant apercevoir sa silhouette.
Mon père préférait l’emploi de terrassier à celui de mineur dont il conservait de mauvais souvenirs. Par chance, il retrouvait dans son équipe les deux Espagnols partis de Decazeville en même temps que nous. Un Catalan de Porta les avait rejoints. Ces hommes formaient un cercle uni et solidaire : ils parlaient la même langue et partageaient les mêmes dangers.
Dans l’âtre, le feu n’était pas très gaillard, étouffé par un ciel bas et gris que n’agitait aucune brise. Je tentai de le ranimer, soufflai sur les braises pour permettre aux flammes d’attaquer les bûches. Je ne soulevai que des cendres, recrachées par mes poumons qui n’appréciaient guère cette farine noire. Je me démenai tant et si bien qu’à l’heure du repas les légumes baignaient toujours dans l’eau sans avoir mijoté. La honte me gagna.
Un tourbillon de mondanités marqua notre retour en France. Le patron nomma François au poste de directeur-adjoint et le chargea de représenter la maison au conseil d'administration du syndicat de la Meunerie française.
Au petit matin, embrassant Geneviève et Isabelle qui titubaient de sommeil, je retins mes larmes à grand-peine. Ce jour-là il pleuvait. Dans la voiture, François prit ma main et la serra tendrement.
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En cours d'après-midi, l'ordre de mobilisation générale éclata comme un coup de tonnerre. Jules Artus, le pharmacien et adjoint au maire, frappa chez nous vers six heures en criant :
- C'est la guerre ! C'est la guerre !
(p.206)
Emile tint ses promesses. Un dimanche d'octobre, il arriva au bras de Catherine, une demoiselle aux traits fins, aux cheveux châtains tressés en nattes qu'ornaient deux petits rubans.
(p.176)