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Critique de candlemas


Je ne suis pas un militant des droits des animaux, mais le sujet m'attirait depuis longtemps; et son approfondissement m'est apparu comme un nécessité morale personnelle, depuis que ma fille est devenue végane, générant de nombreux débats familiaux sur cette évolution...

Indéniablement, je retire de ce livre deux idées très positives et complémentaires :
primo, le sujet mérite vraiment d'être creusé (et je poursuivrai), car il m'est apparu évident à sa lecture que le sujet a été trop longtemps oublié, occulté, dans la philosophie -et la pensée en général- dominante, alors même que la nature de l'animal (être ou objet, sensibilité, raison, sociabilité, essence matérielle et spirituelle...), apparaît indissolublement liée au questionnement philosophique (et même métaphysique) de base sur la nature de l'homme et le sens de la vie. On y redécouvre chez de nombreux penseurs, de Mill et Bentham à Schopenhauer, en passant par Yourcenar, Lévy-Strauss et Derida, que la réflexion philosophique ne peut en faire l'impasse, sauf au prix d'une mauvaise foi évidente, que seule -et Cyrulnik, E. de Fontenay, et SInger semblent s'entendre sur ce point-, la tradition chrétienne occidentale a pu se permettre durant des siècles.
secundo, le sujet est d'une réelle actualité, et le veganisme relève d'un mouvement de fond de notre société, et non pas d'un phénomène de mode, comme j'avais pu le penser au départ. J'ai acquis en effet à cette lecture la conviction que la réintégration de l'animal comme sujet, juridique et éthique, est une évolution de notre temps, s'inscrivant dans une prise de conscience environnementale, d'un humain relativisant enfin sa toute-puissance.

Je serai en revanche plus critique sur deux points:
Très riche par ailleurs, ces trois entretiens m'ont semblé très inégaux, allant de la discussion de café aux thèses les plus passionnantes, en passant par le détour d'imbroglios philosophico-déconstructivistes qui égarent. "Les animaux révélés" à travers le prisme très particulier de Boris Cyrulnik m'ont grandement intéressé, et encouragé dans ma volonté d'approfondir ma connaissance de cet auteur. "Les animaux libérés", tels que revendiqués par Peter Singer, m'ont semblé d'une grande honnêteté et d'une grande fraîcheur, que l'on adhère ou non à ses thèses anti-spécistes basées sur le vieux critère anglo-saxon de la sensibilité et du plaisir dans l'utilitarisme. Quant aux "animaux considérés," selon E. de Fontenay, ils sont riches de considérations philosophiques générales, mais l'entretien m'est apparu comme un dialogue de sourds avec Karine Lou Matignon. Cela nuit à la bonne compréhension d'un thèse claire sur le sujet, à moins, comme l'explique E. de Fontenay, qu'il s'agisse d'une démarche volontaire de "liberté", certes louable, mais du coup peu éclairante pour le lecteur.

Enfin, je m'associerai à Michel Onfray (dont je recommande le cycle de conférences à l'Université des Savoirs de Caen, sur le même sujet) pour estimer que le procédé mise en oeuvre par Karine Lou Matignon, consistant à interviewer par des questions très clairement orientées chaque intervenant, comme dans un débat télévisé, est extrêmement désagréable, car faisant appel à de vieilles ficelles rhétoriques prenant, à mon sens, un peu le lecteur pour un idiot... dommage, le propos et la "cause" méritaient d'être mieux servis...

Un sujet passionnant donc, que j'approfondirai certainement ; d'autant plus que nos échanges avec ma fille me donnent chaque jour l'occasion de creuser cette question, avec intelligence et intérêt. C'est en tous cas ce que me laisse espérer l'application de cette citation de Boris Cyrulnik : "notre culture ridiculise cette souffrance, culpabilise et rend honteux celui qui pleure la bête disparue. La honte est l'arme du conformisme et des dictatures sociales"... merci donc à tous les confomistes (dont j'ai pu faire partie parfois) qui ont poussé ma fille, depuis des années, dans ses retranchements, par des arguments plus ou moins intelligents et hypocrites, et l'ont ainsi amenée à pouvoir argumenter avec cohérence et pondération une position qui, même si trop radicale à mon goût à bien des égards, a le grand mérite d'être mise en pratique... contrairement à Michel Onfray et moi-même, qui n'avons que le courage d'y penser, en bons disciples de Dutronc... "j'y pense et puis j'oublie, c'est la vie c'est la vie"...



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