Citations sur Le prieuré de Crest (27)
Aurait-il pu dire autre chose, agir différemment? Cette question, le sous-lieutenant Benoit devait se la poser longtemps, très longtemps. Il se remémorerait cette scène dans les moindres détails, cherchant à savoir s' il aurait pu éviter les événements qui en découlèrent. A partir de ce jour, de cet instant, la vie du gendarme ne fut plus jamais la même et jamais plus on ne lui demanderait de s' occuper des contrôles routiers.
Cette nouvelle affecta le moral des troupes. Une femme retenant en otage une petite fille qui nécessitait une surveillance médicale de chaque instant était certainement le pire des scénarios auxquels ils pouvaient être confrontés.
Parce que je sais qui je suis et ce que je vaux ! Donc oui, au risque de vous paraître insensible ou de ne pas répondre à votre pathétique appel à la solidarité féminine, vos petits problèmes d'ego sont le cadet de mes soucis !
Et quand vous dites que "des vieilles se sont installées", qu'est-ce que vous entendez exactement par "vieilles" ?
Marchal savait qu'un conflit de générations allait naître à la prochaine réponse, mais la femme qui se trouvait sur le cliché, et que le facteur venait d'identifier, devait avoir tout au plus une quarantaine d'années.
- (...) Ne me dites pas que vous ne vous êtes jamais retrouvé confronté à des situations qui allaient à l'encontre de votre morale ! Combien de monstres avez-vous dû relâcher parce que la loi ne vous autorisait pas à les garder ? Combien de fois avez-vous estimé qu'une peine n'était pas à la hauteur du crime qui avait été commis ?
- Et vous pensez sincèrement que la vengeance est une meilleure solution ? Qu'il faudrait revenir à la loi du talion ? Pour être franc avec vous, je pense qu'il est impossible de réparer un tort, quel qu'il soit. Ce qui est fait est fait ! Une mère ne se remettra jamais de l'assassinat de son enfant, que son meurtrier soit enfermé à vie ou qu'il soit tué d'une balle dans le dos ! La justice ne pourra pas lui rendre sa raison de vivre, pas plus que la vengeance.
- Vous voulez dire que vous ne ne savez pas si Violette a été élevée
avec l'idée qu'elle était la meilleure ou si elle cache finalement un complexe d'infériorité qu'elle tente de surcompenser, c'est bien ça ?
- Je n'aurais pas dit mieux ! répondit-elle impressionnée. Je ne savais pas que vous étiez calé à ce point en psychanalyse.
- Quand on grandit avec quatre sœurs, on n'appelle pas ça de la psychanalyse mais de l'instinct de survie !
Les lieutenants furent étonnés de trouver du monde dans la salle d'attente alors qu'il était à peine huit heures du matin. Deux femmes patientaient en silence, installées dans des coins opposés de la pièce. La première était plongée dans la lecture de son livre. La couverture, toute en nuances de gris, était devenue trop célèbre pour qu'on ne la reconnaisse pas et Benoît ne put s'empêcher de sourire. Attaquer de bon matin par de la romance érotique avant un petit rendez-vous chez le psy, il se demandait comment pouvait bien se dérouler le reste de sa journée.
- Je pense qu'on a affaire à une femme très intelligente, dont l'autorité affective lui assure la confiance de celles qu'elle accueille. Je pencherais pour un profil narcissique. Elle aime avoir le rôle de la louve protectrice. Ça lui donne un ascendant matériel et psychologique sur ses pensionnaires, déjà émotionnellement fragilisées. Elle a conscience de l'aura bienveillante qu'elle dégage et dont elle tire avantage. Ses pensionnaires doivent certainement la percevoir comme une sorte de gourou. Si vous l'attaquez de front, elle se laissera emprisonner pour refus d'obtempérer. Pour elle, ce sera un moyen de faire briller un peu plus son auréole. Elle ne se positionnera pas en martyr mais en défenderesse de l'opprimé. S'en prendre aux femmes qu'elle protège serait encore pire. Elle ameuterait la presse pour crier à l'injustice et toutes les caméras seraient aussitôt braquées sur nous.
- Dupont de Ligonnès a disparus en laissant derrière lui le corps de sa femme et de ses quatre enfants, Huguet s'est contenté de laisser celui de son épouse, de sa belle-mère et du chien.
- Du chien ? répéta bêtement Benoit. Pourquoi tuer son chien ?
- J'en déduis que vous ne voyez pas d'inconvénient à ce qu'on puisse tuer sa belle-mère ! répondit le chef de brigade le plus sérieusement du monde.
Au moins, maintenant on sait que ce n'est pas un saint qui vient d'être jeté à la baille. Je ne dis pas qu'il méritait son sort mais, personnellement, ça me détend un peu les trapèzes.