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Citations sur Le village pathétique (9)

Est-il possible qu'un commerçant rêve quelquefois, même si l'autorité des traditions littéraires le lui défend ?
Julien se demanda si de tels individus ne possèdent pas une imagination souvent supérieure à celle des rêveurs professionnels.
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Dans la rue, les chats se promenaient librement, profitant de la sieste des chiens.
Vers quatre heures une porte voisine s'ouvrit.
C'était Mathilde Blunay qui chassait son ivrogne de mari, un géant, qui s'étira un moment dans le soleil.
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Après le repas, Odile vint y trouver son mari qui montait à ce moment les rayons d'une roue de vélo. Elle le regarda travailler. Ses mains rencontraient chaque fois avec précision sur l'établi l'outil nécessaire. L'équilibre de la roue se révélait avec une lenteur méthodique.

– Je me demande pourquoi tu as fait des études.

– Je préfère ce travail, répondit-il, préoccupé.

Elle observa que depuis deux mois qu'ils étaient mariés, il n'avait pas ouvert un livre.

– J'ai abandonné tout à fait la littérature.

– Que veux-tu dire ?

– Que je n'écrirai plus pour aucun journal. Je me contenterai de composer quelques poèmes de temps en temps.

Odile pâlit comme si c'était l'annonce d'un désastre. Elle ne comprenait pas cette lubie, alors qu'elle était sûre que de vraies amitiés encourageaient Julien à travailler.

– Ta nonchalance est abominable.

– Est-ce que tu t'intéresses à la littérature ?

– Je me fiche de ta littérature. C'était du moins un effort vers quelque chose. Comment comptes-tu organiser ta vie ?

– Je n'ai pas de projets.

Odile insista sur ce fait qu'elle ne se résignerait pas à mener une vie attachée à un commerce de bicyclettes. A dix-neuf ans elle prétendait aimer tout ce qui s'apparente à la gloire, sinon la gloire elle-même et préférer encore toutes les défaites à un ennui oriental.

– Tu ne comprends pas, murmura-t-il, en continuant à faire tourner sa roue.

– Laisse cette roue. Il y a beaucoup de jeunes gens qui voudraient avoir ces possibilités que te donnent ta santé et ta chance.

Ils pensèrent aussitôt l'un et l'autre à Étienne. Ils prononcèrent son nom en même temps, lui avec ironie, elle d'un ton amer :

– Étienne. Je ne voulais pas parler de lui.

Julien haussa les épaules :

– Je sais ; il a la meilleure part, ton amitié. Pourquoi ne l'as-tu pas épousé ?
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Julien revoyait surtout cette cuisine parfaitement blanche où ils épluchaient ensemble leurs légumes.
En vérité tout cela avait toujours paru provisoire et à mille lieues d'une vie normale. C'était un décor qu'un changement d'éclairage avait pu disperser sans qu'il restât la forme d'un bibelot.

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La semaine précédent le mariage fut dominée par ce silence devant la fenêtre. Ils s'en souvinrent jusque dans la cohue des Galeries Lafayette.
Il y eut même une après-midi remplie d'une joie immense. En passant sur le boulevard Montparnasse, Julien acheta deux roses pour Odile qui lui proposa aussitôt d'aller prendre le train à la gare voisine, n'importe quel train. Leurs regards exprimèrent un accord immédiat. Il fallait dépenser sans retard l'enthousiasme, en le semant dans la plus grande étendue possible.
Un omnibus les conduisit à une petite gare entourée par un lotissement affreux. La plupart des arbres avaient été emportés par le vent.
Ils pataugèrent avec une extrême satisfaction le long d'une allée où trois modèles de villa se répétaient à perte de vue jusqu'à un arrière plan semé de meules échouées.

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Julien cueillit quelques noisettes. Une mélancolie profonde tombait sous les arbres. Il n'y avait pas un brin d'herbe. Des champignons étaient épars ça et là. Il y en avait des blancs et des orangés.

[André DHÔTEL, "Le Village pathétique", Gallimard, 1943, page 275]
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Odile ne rencontra personne. Elle éprouvait le désir de blasphémer,
tandis que les libellules se lançaient au-dessus des blés.
Un merle s’enfuit d’un tas de crottin et, se perchant sur un pommier,
il siffla un thème enregistré probablement lors de la naissance du monde.
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Odile ne rencontra personne. Elle éprouvait le désir de blasphémer, tandis que les libellules se lançaient au-dessus des blés. Un merle s’enfuit d’un tas de crottin et, se perchant sur un pommier, il siffla un thème enregistré probablement lors de la naissance du monde.

[André DHÔTEL, "Le Village pathétique", Gallimard, 1943 (réédition coll. "folio" : 1975)] (extrait choisi par le site "Esprits Nomades. Notes de passage, notes de partage" : LITTERATURE -- article "André Dhôtel. L’écrivain où l’on revient toujours")
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L'élan de certaines joies ‒ l'oubliera-t-on à jamais ? ‒ est limité le plus souvent par une sorte d'horizon, à la fois sombre et net : azur à contre-jour tranché comme une fin inéluctable, et mêlé de mort et de clarté.

[André DHÔTEL, "Le Village pathétique", éd. Gallimard, 1943 ‒ page 109]
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