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Critique de Isacom


Le mot "génocide" a un sens.
Le même sens que dans herbicide, insecticide... Il s'agit d'éradiquer, d'anéantir, de faire disparaître de la surface de la Terre.
Sauf que dans "génocide", il s'agit d'êtres humains.
Boubacar Boris Diop leur donne un visage : roman choral où s'expriment, par bonds chronologiques, l'endeuillé, le rescapé, le mis-à-l'abri, la combattante ; mais aussi le génocidaire.
Ainsi que l'officier français qui a armé, ou encouragé, ou laissé faire.
Il n'est pas dans l'allusion, Diop : il livre une description crue des massacres et des cadavres.
Il donne la mesure de l'énormité du crime : dix mille morts par jour, pendant cent jours ; un million de personnes. En trois mois.
Dans sa postface de 2011, il se pose "la lancinante question de la légitimité d'une mise en fiction du génocide", comment il a cherché à "faire ressentir au lecteur le choc et l'effarement de la découverte d'une horreur défiant l'imagination".
Mais il parle également de "la capacité de résilience d'un pays assez confiant en lui-même pour abolir le 25 juillet 2007 la peine de mort."
Résilience incarnée par ses personnages, de retour à Murambi des années après.
Je ne sais pas quoi penser de ce livre : oui, bien sûr, il est important. Mais, lu après "Petit pays" et "Tous tes enfants dispersés", il m'a semblé moins puissant. J'ai été gênée, justement, par les procédés littéraires : sauts dans le temps, polyphonie (je n'ose pas dire "tout ce qui est tendance", mais...)
Je le comparerais à "Nuit et brouillard" : en évitant systématiquement le mot Juif (ce qui lui a été reproché), Alain Resnais donne au génocide une dimension universelle ; il fait de nous tous et toutes, des victimes potentielles. Il dépasse le "c'étaient des Juifs, c'était pendant la guerre..."
Dimension que, pour ma part, je n'ai pas retrouvée dans ce roman.
Je l'ai trouvé trop court, peut-être.
Les racines du mal (au sens que lui donne Hannah Arendt) sont davantage explicitées dans la postface, notamment le poids écrasant du passé colonial et le rôle déshonorant des autorités françaises.
Bref, lisez-le et faites-vous votre propre opinion.
Challenge Globe-Trotter (Sénégal)
LC thématique de juin 2022 : "Titres à rallonge"
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