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Citations sur Tempêtes et brouillards (24)

Dans Le Roi Lear comme dans toute existence : l’enfant mal aimé souffre. Quels que soient les biens matériels qu’il reçoit, un château, la moitié d’un royaume, tout un trésor d’argent, l’enfant mal aimé souffre. Et c’est cette souffrance qui, à défaut de ressources protectrices, menace de l’engouffrer dans la carrière du mal. 
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Peu à peu, je commençais un nouveau roman. Par respect pour ma profonde nécessité, écrire – mener cette aventure qui me permettrait, peut-être, d’accéder à ce qui jusqu’ici m’était resté caché. Puisque l’écriture est une exploration. Puisque l’écriture interroge. Puisque l’écriture dévoile. Ce qui n’es pas la même chose que de donner des réponses. L’écriture ne fige aucune croyance. Elle oriente les faisceaux. Eclaire les questionnements. Et j’explorerais, et je questionnerais, ce dont je pensais avoir manqué, en chemin. Je fouillerais. Jusqu’à voir, peut-être, qu’il n’y avait pas eu, dans l’enfance, que des gestes violents. Jusqu’à retrouver les accolades chaleureuses, les regards plein de fierté. Jusqu’à déblayer les noirceurs. Non pas les effacer. Les effacer eût été impossible. Il fallait au contraire continuer à avoir conscience des crimes afin d’éviter, plus que tout, qu’ils ne se reproduisent. Les regarder en face, ces crimes – ne jamais les oublier. Les archiver, enfin, pour qu’ils ne prennent plus toute la place. Libérer de l’espace pour les souvenirs heureux, d’où qu’ils viennent. Ainsi découvrir un ciel de ressources. Les ressources de la tendresse. De la douceur. De la consolation. Un ciel bleu. Bleu comme un tableau d’Yves Klein, peut-être, une représentation sensible de l’âme. Beau comme une œuvre d’art devant laquelle venir prier, les jours de gouffre.
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Bien sûr, nous savions qu’il y avait peut-être quelque chose de mal à nous opposer au choix conscient de notre père, à sa volonté de favoriser Asma, de la protéger, elle. Mais un homme qui déshérite ses enfants, cela pouvait-il vraiment n’avoir aucune conséquence ? Je repensais à la tempête terrible qui se déclenche, dans Le Roi Lear, après que Lear a déshérité Cordélia, ce que certains analystes nomment sa « faute ». Soudain le monde se retrouve aux prises avec la tyrannie d’un ciel noir, jeté dans le chaos. A travers la question de l’héritage, n’est-ce pas l’ordre du monde que l’on interroge ?
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Ma violence. Comment remonter à sa source ? Comment rejoindre l’origine de ce fleuve de lave creusé en moi ? Est-il possible de l’étancher ? Peut-on assécher sa propre sauvagerie ? J’en observe l’ébullition et je vois : une maman qui s’éloigne, des enfants que l’on fouette, un canapé kaki, velours en lambeaux, espace de sévices. Et puis il y a ce que je vois, et il y a ce que je ne vois pas. Ce qui fourrage, sous le lit, de l’autre côté du sol, au fond du fond, dont on ignore la nature. Occulte. Ce qui tue.
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- Je ne crois en rien, avait-il dit.
- Je ne vais pas arrêter de boire du vin ni de manger du saucisson si c’est ça qui t’inquiète, avait-il dit.
Pourtant.
Son choix, j’en souffrais comme s’il n’était rien d’autre qu’un nouvel abandon, une réplique d’abandons très anciens, résonance de la source de mes plus profondes blessures.
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Ce qui n’est pas nommé n’existe pas.
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Le départ
Hiver 2005
Un désir de roman m’avait réveillée avant l’aube et j’avais commencé à écrire, pendant des heures obscures, à lutter pour trouver un sens à l’informité de mes idées. L’incipit me résistait. Cent fois effacés, cent fois récrits, les mots enfant, mère et absence se blessaient dans la même phrase, lorsque mon père téléphona.
« Je déménage, Carina, m’annonçait-il. J’ai revendu mon appartement. Mes affaires seront transportées par bateau. Ça va me coûter cher mais j’ai comparé les prix. J’ai calculé. Tout est réglé. Je pars vivre à Marrakech. Je quitte la France. Tu prendras l’avion pour venir me voir. Il y a régulièrement des promotions sur les vols. Ce ne sera pas compliqué. »
Il avait détaillé sa décision comme on évoque une escapade anecdotique, des petites vacances.
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« Shakespeare pouvait-il être plus explicite ? Dans Le Roi Lear comme dans toute existence : l’enfant mal aimé souffre. Quels que soient les biens matériels qu’il reçoit, un château, la moitié d’un royaume, tout un trésor d’argent, l’enfant mal aimé souffre. Et c’est cette souffrance qui, à défaut de ressources protectrices, menace de l’engouffrer dans la carrière du mal. 
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« Oren croyait en moi, même quand je lui avouais que je n’y parvenais pas, que mon écriture n’aboutissait à rien, que j’étais perdue, enterrée sous des ossements de mots »
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p. 67
Mais mon père avait menti.
C’était comme si son mensonge avait érigé une barrière, m’empêchant d’entrer dans la justesse de l’espace de mon roman.
Comme si je craignais que mon roman ne soit contaminé par cette fausseté.
Mon père avait menti. Il avait vernissé mon enfance, notre enfance à mes frères et à moi, une enfance qui, entre ses lèvres, s’était convertie en une imagerie laquée, un mirage de protection, d’abondance, avec ses fêtes de Noël et ses innombrables poulets dorés.
Mon père avait menti.
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