Citations sur Il suffirait de presque rien (31)
Quelque chose de magique se passe. Je quitte la terre ferme, je suis dans un autre monde, entre ciel et terre, je me sens intouchable, je vogue parmi les étoiles. Devant mes yeux, un spectre apparaît. Il est lointain, presque irréel, je n'arrive pas à le saisir ; il brille, m'éblouit. J'ouvre les yeux : on dirait une comète. J'ignore tout d'elle, j'ignore ce qu'elle va faire de ma vie, mais je sais qu'en y entrant, elle va tout balayer sur son chemin, tel un tsunami.
Nous ne faisons qu'un ; un corps, une respiration, un être. Nous sommes à nous deux l'éternité réunie.
Je banalise son visage, sa voix, sa présence. Je fais de lui un être sans importance, je me persuade que même sans lui, ma vie a encore un sens, a encore du sens.
Pour moi, la vie n'est qu'espoir et pour lui désespoir. Moi au printemps, lui en hiver. Je suis le jour, lui, la nuit. Pourtant, je réalise qu'il faut peut-être les deux pour trouver un équilibre, son équilibre.
En une fraction de seconde, très rapidement, je comprends l’inévitable, je comprends que je ne peux pas sauver un homme fatigué, je ne peux pas le sauver. Je dois juste être là, moi-même, présente pour les quelques minutes, heures, années restantes. Sans le juger, je dois accepter son choix, continuer d'avancer, me reconstruire tout en réapprenant à vivre avec un membre en moins.
Je me suis promis de l'aimer, de le chérir, pour le meilleur et pour le pire. ... J'ai fait cette promesse de me lier à lui pour toujours, jusqu'à la fin des temps. Je sens son cœur entre mes mains, je le tiens, le possède, je l'ai fait mien ....
J'entre dans son grand appartement, bouteille à la main, les yeux écarquillés face à des murs gris cassés, épurés, apaisants. Je découvre l'univers de la comète, tout ce qui fait de lui cet être attirant et mystérieux. Je viens d'entrer dans son appartement en même temps que je viens d'entrer dans sa vie.
Muets face au spectacle qui s'offre à nous, nous vivons un moment magique. Côte à côte, les yeux clos, nos mains découvrent le corps de l'autre, sans précipitation, sans empressement. On laisse le temps passer, nous emporter hors du temps, hors de cette différence d'âge, de ces quelques rides. Plus rien n'existe, nous sommes seuls au monde, unis.
Tant de choses nous séparent. Je suis consciente que nos deux vies sont parallèles, se côtoient, se frôlent, mais jamais ne se toucheront. Nous avons deux visions bien différentes du monde, des passions opposées, des envies contraires. Pour moi, la vie n'est qu'espoir et pour lui que désespoir. Moi au printemps, lui en hiver. Je suis le jour, lui, la nuit. Pourtant, je réalise qu'il faut peut-être les deux pour trouver un équilibre, son équilibre.
La comète a traversé ma vie à la vitesse de la lumière, c'est à la même vitesse que je dois la remplacer, d'un trait, d'une trace, sans bruit, sans douleur, sans souffrance. Je dois malgré moi la laisser s’éloigner, l’effacer, l’oublier. Je dois juste tourner cette page et faire en sorte qu'elle reste mon plus beau souvenir.