Le luxe d’un côté, une vie honorable de l’autre. Le caviar contre l’oignon. La décapotable contre le métro. Le Pétrus contre un Coca. On se demande qui est gagnant.
J’y suis restée deux jours. Ce que j’ai vécu dans cet appartement, jamais je ne l’oublierai. Je me cachais pour vomir. Je tenais bon. La nuit tandis qu’ils dormaient à mes côtés, sur le dos, comme deux insectes à la carapace dure, aux antennes tranchantes, je songeais à ma fille. Ma fille dont j’ignorais jusqu’à l’odeur, jusqu’au sourire. Ma fille était-elle passée par ici ? Avait-elle laissé dans ces lieux sombres, au luxe froid, une trace quelconque ? Un petit caillou qui brillerait sous les rayons de la Lune ? Il n’y a pas que les petits cailloux qui brillent dans la nuit, il y a aussi la violence des hommes.
Voyons, mon cher d’Aublay, il faut rester optimiste somme toute, votre bilan est positif : le déficit budgétaire a été limité, l’inflation reste stable, nos entreprises redeviennent compétitives et la sécurité sociale reprend des couleurs. Certes, vous ne l’avez pas fait exprès. Mais vous avez su bénéficier de circonstances particulièrement favorables. Le vent tournait dans le bon sens, et vous ne lui avez pas tourné le dos. C’est remarquable, même pour un ministre. Vous avez peu ménagé, dans vos propos, les cercles politco-journalistiques, mon cher. On vous reproche aussi de faire trop d’économisme aux dépens du social. Les chiffres à la place des hommes, c’est ce que j’appelle un souffle au cœur affectif. C’est vrai que vous n’êtes guère populaire.
Chaque réseau est constitué de relais et de fusibles. Les relais gèrent la marchandise, prennent les contacts. Les fusibles, eux, ignorent tout du système qui les emploie. Dès que surgit un problème, les relais ferment et les fusibles se retrouvent dans la nature. Jusqu’à ce que l’un d’eux saute.
Là tout était calme et discrétion. Jusqu’à la terre fraîchement remuée au fond du jardin.
Vous buvez pas, vous fumez pas. Le reste est l’avenant ?
Je le sais, moi, ce qui arrive. C’est le sang qui est mauvais… Mon sang… Mon passé… Ce que je suis devenue. Sans regret. Aucun. Parce que le cœur reste froid, même si la peau est douce. Mais il n’y a que la peau qui les intéresse. Personne n’écoute les battements d’un cœur. Et ainsi, il faut reprendre la comédie qui mène le monde aux sentiments.
Oleg Kozca est un homme d’affaires. Les hommes d’affaires aiment l’ordre. Même si cet ordre amène le désordre. Et les sacs bleus amènent toujours le désordre.
J’organise des spectacles, des rencontres privées, où l’organisation des corps ne laisse rien au hasard. J’ai affaire à des regards blasés, à des imaginaires corrompus par la satiété. Ne vous y fiez pas cependant : c’est un monde cruel où chacun guette les failles de son voisin. Rien ne s’oublie, rien ne se pardonne. Et la faille s’élargit. Je reste donc vigilante. J’interviens parfois. Je me donne rarement. Il faut me mériter. Oleg Kozca jouit de ce privilège : me tenir contre son corps, me déshabiller parfois. Me posséder si l’envie lui en prend. Il n’a jamais réussi à me faire jouir. Aucun homme ne réussit à me faire jouir. Mais je crée l’illusion. C’est mon métier l’illusion. J’y suis incomparable. C’est pour cela que mademoiselle H. m’a engagée. Je suis une fille obéissante, en apparence. Cela demande un long travail, l’apparence. Mais j’y suis arrivée. Je donne le change. C’est tout ce que je donne d’ailleurs. Les hommes croient que je m’occupe d’eux. En fait, j’actionne de mécanismes, des mécanismes sans surprises. C’est ce que les hommes sont, ni plus ni moins : des mécanismes. Ils croient rugir, c’est simplement une bielle qui s’affole. Ainsi, je croyais dominer le monde quand soudain, cette nuit-là…
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