Le roi n’a de volonté que celle que lui dicte la politique, que celle que lui impose la raison d’État.
Il n'eût plus manqué que cela, être blâmé pour avoir été moins sot qu'un autre.
Les pécheurs sont comme cela : oublieux avant, puis scrupuleux quand il est trop tard.
Charles II dégagea sa main de celle du roi, et se reculant pour le saluer avec plus de cérémonie,
— De tout mon cœur, merci, répliqua-t-il, sire, mais j’ai prié sans résultat le plus grand roi de la terre ; maintenant je vais demander un miracle à Dieu.
Et il sortit sans vouloir en entendre davantage, le front haut, la main frémissante, avec une contraction douloureuse de son noble visage, et cette sombre profondeur du regard qui, ne trouvant plus d’espoir dans le monde des hommes, semble aller au-delà en demander à des mondes inconnus.
(p. 184-185)
ATHOS
-- D'autant plus aisément, monsieur le cardinal, que j'ai vu les événements.
-- Vous ?
-- Oui, monseigneur ...
Le roi s'était rapproché involontairement du comte, le duc d'Anjou avait fait volte-face, et pressait Athos de l'autre côté.
-- Après, monsieur, après ! s'écrièrent-ils tous les deux en même temps.
( Henri :
-- Eh, eh, Zorro est arrivé
Sans s'presser
Le grand Zorro, le beau Zorro
Avec son ch'val et son grand chapeau )
Aramis n'était pas homme à rechercher une popularité inutile. Peu lui importait d'être aimé de gens qui ne lui servaient à rien.
Tant qu'un roi vit, il n'a d'autre niveau que sa conscience, d'autre juge que son désir ; mais, mort, il a la prospérité qui applaudit ou qui accuse.
— Chère Marie, est-ce donc d’aujourd’hui que vous vous apercevez que nous sommes environnés de gens intéressés à nous tromper ?
— Mais enfin, sire, ce voyage, cette alliance avec l’Espagne ! On vous marie !
Louis baissa la tête.
En même temps, l’officier put voir luire au soleil les regards de Marie de Mancini, brillant comme une dague qui jaillit du fourreau.
(p. 196)
— Sire, j’ai toujours vu que c’était dans les positions désespérées qu’éclatent tout à coup les grands revirements de fortune.
— (…) Malheureusement vos paroles, cher comte, sont comme ces remèdes que l’on dit souverains et qui cependant, ne pouvant guérir que les plaies guérissables, échouent contre la mort. (…) Là, croyez-moi, comte, tout sera bientôt fini, et la mort viendra vite ; elle est appelée si souvent par ce corps que ronge l’âme et par cette âme qui aspire aux cieux !
— Votre Majesté a une mère, une sœur, des frères, Votre Majesté est le chef de la famille, elle doit donc demander à Dieu une longue vie au lieu de lui demander une prompte mort. Votre Majesté est proscrite, fugitive, mais elle a son droit pour elle, elle doit donc aspirer aux combats, aux dangers, aux affaires, et non pas au repos des cieux.
(p. 222-223)
Quand Charles II eut bien pensé à la nouvelle défaite qu’il venait d’éprouver, quand il eut bien compris l’isolement complet dans lequel il venait de tomber en voyant fuir derrière lui sa nouvelle espérance, il fut saisi comme d’un vertige, et tomba renversé dans le large fauteuil au bord duquel il était assis.
Alors Dieu prit en pitié le malheureux prince, et lui envoya le sommeil, frère innocent de la mort.
(p. 214-215)