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Citations sur Jeanne des falaises (24)

Adulte majeure tu ne deviendras pas. Tu resteras mineure, Jeanne, orpheline de père "mort pour la France" que la Grande Guerre a porté bas. Grande on ne sait toujours pas de quoi.
J'appartiens à ma mère.
Reste à ta place pour les anciens qui te gouvernent, c'est ne pas te montrer, ni aux voisins, ni aux étrangers, ne pas se mettre en avant, rester poussière et redevenir poussière.
Ne pas tenir le monde dans le creux de sa main, le frôler seulement.
Reste à ta place, soumets-toi. Pratique encore, puisque je n'ai jamais reçu de salaire, je vis de façon monacale, sans bruit, je suis la femme qui dit oui. Tout autour de moi les éléments se déchaînent.
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Aux champs tu es née, aux champs tu resteras. Je préfère aux falaises tu es née, aux falaises tu resteras. Il y a plus de hauteur et de résistance à être adoptée par elles.
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Les amours contrariées de la littérature me touchent et me rappellent que l'on ne naît pas libre, même si l'on marche sans chaînes. Moi, la terreuse, j'ai sûrement trop aimé ma terre, je n'ai pas su mener ma guerre pour avoir le droit d'aimer l'homme qui souhaitait partager avec moi, près de moi, un peu de temps qui nous est alloué.
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_ Y t'a vue t'angoulêmer avec lui!
Je me défends timidement, on n'accuse que les suspects. Ce cantonnier, cet "écoute aux portes", je vais l'éviter désormais.
_ Oui, j'ai embrassé Germain. C'est pas un crime!
_ Tu vois, t'avoues. Mais t'as pas honte, mais t'as pas honte!
Je reste silencieuse devant sa colère.
Non, je n'ai pas honte d'un baiser de rien du tout; dans mes livres, les héros vont beaucoup plus loin qu'un baiser, ils enlacent leurs corps pour ne devenir qu'un.
Comment? A cette époque, je l'ignore encore!
Impossible de raconter à ma mère nos deux visages l'un contre l'autre, mon impression d'invincibilité quand mes lèvres ont touché les siennes, cette soif que m'a procurée son baiser. J'ai vu de près Germain, son visage si grand, le paysage de ses yeux, celui de son iris orné de fils d'or, couleur des ajoncs des landes, en forme d'étoile. Ce dessin d'iris commun à nous tous ici, qui caractérise les yeux des Celtes.
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J'ai dispersé mes doutes, pour rester, survivre à tous, le plus longtemps possible avec mon grand amour.
Est-ce la guerre qui m'a permis de devenir centenaire?
Je ne veux pas céder à la mort et lui chercher gribouille.
Je vis longtemps pour elle, non pas contre elle. J'ai un secret, ma grande histoire à moi, si dérisoire à l'échelle humaine. Elle se résume à un prénom, ce prénom me tient aux falaises et à ma terre, le vide n'est rien à côté du plein de ce que je vis en aimant à ma manière Germain.
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La douleur dans la chambre d'à côté monte d'un ton. Au moindre répit, je pense qu'elle va s'arrêter, s'éloigner. Devant son intensité, ma gorge se noue. Impossible de penser à autre chose. "Tu enfanteras dans la douleur", la passion du Christ à revivre pour expier le péché d'Eve, "la première femme". Souffrir "avec joie". La question "d'où vient l'enfant?" se transforme en "d'où je viens, moi?", Jeanne, orpheline de père. Ma mère a-t-elle eu aussi mal que Juliette à ma venue au monde? Est-ce peut-être pour cela que parfois elle est impatiente avec moi? Jamais personne ne m'a informée qu'accoucher fait mal, jamais je ne l'ai lu. Ce secret, les femmes qui ont déjà enfantée le gardent ardemment, elles ont combattu cette douleur, sont revenues de ce combat vivante ou morte. Dans les deux cas, motus et bouche cousue. Comme les hommes revenus des tranchées, elles ont "tenu le coup" et accèdent à une certaine marque de respect ensuite.
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Je prends mon carnet de pensées qui ne me quitte jamais, sors mon couteau de poche, taille la mine de mon crayon et me mets à écrire pour garder mon sang-froid. Je ne connais pas meilleure solution pour passer le temps et reprendre mon calme. Mes lettres, en prolongement de mon corps affolé, tempèrent mes émotions. Mouvement de va-et-vient entre moi et ce qui se passe alentour.
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Dès lors, je n'ai qu'une crainte, c'est être vendue comme domestique de ferme pour le salaire d'un pain par jour, livrée aux diables, mise enceinte et subir le déshonneur. La maltraitance. Devenir une chose plus qu'une âme. On maintient l'enfant qui est en nous pour dominer son destin. Décidément, les affreux ne sont pas dans les puits des six cheminées, mais au-dehors.
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Au fur et à mesure de l'obtention du certificat d'études des uns et des autres, le groupe diminue jusqu'à ne plus exister. Nous perdons notre statut d'enfant pour partir en apprentissage, avec deux seuls jours de repos par an en plus des dimanches. Nous quittons l'enfance sans acquérir ce qui vient après: la liberté de choisir pour nous-mêmes. La terre avec sa meilleure volonté nous retient à ses barrières: quelques planches rabotées minutieusement les soirées d'hiver à l'aide d'outils ancestraux, soigneusement cloutées et arrimées par un trou à de grosses poutres de granit du pays.
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Il me vient à l'esprit qu'en mourant mon père nous a emportés avec lui, dans le chagrin de son épouse chérie. Elle n'est jamais revenue à la vie, et le mot "bonheur" est devenu un mot inacceptable à prononcer et à vivre, pour elle et pour nous. J'ai retenu les souffles. Parfois j'ai été en colère. J'ai enfoui, caché ma peur dans mes rires, avec bonne humeur mais finalement une solitude intérieure.
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