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Citations sur Appelez-moi Thérèse (9)

Mes grands-parents Escoube habitaient Bordeaux dans une autre grande maison sombre du quartier des Chartrons. Ils habitaient les Chartrons, mais ils n'étaient pas des Chartrons. Ils n'avaient jamais été vraiment admis par la vieille aristocratie danoise, allemande, anglaise dont le déclin accompagnait le leur, mais sans compromissions ni mélanges. Les Chartronais véritables étaient protestants. Les Escoubes étaient d'autant plus catholiques.
Ma mère a toujours été d'une piété ostentatoire.
- N'en remets pas trop, Emilie, lui disait oncle Armand. N'oublie pas que les terres des Escoubes sont des biens du clergé acquis à bas pris sous la Révolution.
Elle le traitait de franc-maçon, de communiste. C'était une sorte de jeu entre frère et sœur, mais il venait un moment où Emilie crachait son venin. Oncle Armand haussait les épaules et s'en allait en mâchonnant son cigare parler de chasse avec mon père.
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- Tu disais qu'à force d'attendre la liberté, on finit par être sévère pour elle.
- Oui, mais quand elle arrive, elle est si belle qu'on lui pardonne. C'est comme une femme.
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Excuse-moi de ne t'avoir laissé que de l'argent et des terres. Je ne sais même pas si tu en voudras. J'aurais voulu te laisser de l'amour, mais quand on est, comme moi, dans l'enseignement depuis bientôt quarante ans, on ne se fait aucune illusion sur la dévaluation des sentiments qu'on peut offrir aux jeunes.
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Le reste du temps, on vivait modestement à Mazères, presque chichement. Les repas de tous les jours étaient frugaux. Quand on recevait, un beau poulet devait "faire" au moins pour six personnes et laisser assez d'abattis pour une sauce en famille le lendemain. Mais on mangeait dans de la vieille faïence bordelaise de David Johnston, dont chaque pièce était un trésor.
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Le notaire bâille intérieurement et songe à son bateau qui l'attend à Piraillan. Si cette visiteuse s'éternise, elle va lui faire manquer la marée. Tout en hochant la tête d'un air attentif, il fait des calculs : vingt minutes pour atteindre la barrière Judaïque, peut-être un quart d'heure si les feux rouges sont bons, quarante minutes au maximum jusqu'à Arès, et ensuite cela dépendra de l'encombrement sur la route du cap Ferret. Il y a de plus en plus de gens qui partent le vendredi après-midi.
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Appelez-moi Thérèse. C'est le nom que je me donne dans la forêt, quand j'écrase sous mes pas le bois mort et la fougère vive au long des ruisseaux insoupçonnés, parmi la brande et la callune.
Appelez-moi Thérèse, car Thérèse me hante depuis que j'ai découvert son visage. Je connaissais son nom et son histoire, mais je ne savais pas qui elle était. J'aurais dû. Oncle Armand disait de moi que j'avais une bonne culture générale. Sur les rayons de ma chambre, à Mazères, il y avait tous les livres qu'il fallait avoir lus et quelques-uns de Mauriac en particulier.
(incipit)
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Sans l'appui d'oncle Armand, mon père n'aurait pas pesé bien lourd devant ma mère. Il a toujours vécu à Mazères, plus ou moins aux crochets de mon grand-père qui avait une belle clientèle et le laissait s'occuper des terres - une petite vigne dans le Bazadais et quelques pins du côté de Villandraut. Depuis qu'il est marié, il gère ou fait semblant de gérer ce qui est revenu à ma mère de la fortune des Escoubes.
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Les Escoubes, c'était la grande bourgeoisie terrienne qui avait dominé le pays depuis des générations et l'avait écrasé sous le poids de ses hectares de vignes et de pins. Nous ne fréquentions guère mes grands-parents maternels, mais nous allions parfois les voir l'été dans leur grande maison du vignoble, aux limites de Preignac. Les volets étaient toujours mi-clos et les murs portaient les taches vénéneuses du sulfate de cuivre dont on pulvérisait la treille. Des palmiers velus et des bananiers d'un vert malade poussaient dans l'ombre du parc qui isolait le domaine des maîtres de ce qu'on appelait, avec une majuscule perceptible, "la Propriété".
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Cette année-là, les Duprat annulèrent la croisière au cap Nord qu'ils avaient prévue. Le voyage de la fin juin - avant les tarifs de la haute saison - faisait partie du rituel de l'année. Tantôt c'était la Grèce ou le Maroc, tantôt les Açores ou les capitales nordiques. L'essentiel était que cela se fît en classe de luxe afin que Gaston pût se créer des relations intéressantes parmi ses partenaires de bridge, tandis qu'Emilie montrait ses toilettes.
Elle les faisait faire à bon compte par une vieille couturière, ancienne première main de chez Dior, retirée à Bazas, avec des tissus qu'elle achetait dans un magasin de soldes au pied de Montmartre lors des voyages bisannuels que les Duprat faisaient à Paris.
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