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Citations sur La frontière, un voyage autour de la Russie de la Corée d.. (13)

Livre repris le 03 avril 2022, un soldat russe du Donbass répond sur l'Ukraine:

"- Dites-moi ce que c'est, au juste, "l'Ukraine" ? demanda Lina sans attendre de réponse. Et voilà, l'Ukraine, ça n'existe pas ! Les gens se font appeler Ukrainiens, mais en réalité, ce sont des Russes. Il y a des dialectes russes difficiles à comprendre. L'ukrainien est un dialecte de ce genre." p.423 dans le chapitre "La plus jeune république séparatiste du monde"
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Le musée des Soldats morts ne fut pas facile à trouver. Il était dissimulé dans une cour d’immeuble, et je dus traverser le bâtiment pour m’y rendre. Un gardien m’aperçut, me demanda où j’allais et m’indiqua le chemin à suivre. (…) Il dégaina son mobile et composa le numéro figurant sur le panonceau. Au bout d’un moment, deux femmes d’un certain âge vinrent déverrouiller le musée.
« Je ne suis pas vraiment bonne en russe », s’excusa l’aînée des deux en commençant à me montrer les trois petites salles d’exposition. Elle s’appelait Arpik, ses deux fils étaient morts à la guerre. Les murs du musée étaient couverts de portraits en noir et blanc de jeunes hommes graves. On avait aussi exposé des objets ayant appartenu aux soldats, offerts par les familles. Un tapis, un jeu d’hameçons ou une bouteille de vodka, voire des kalachnikovs.
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On nous conduisit alors dans une salle où nous eûmes le loisir de contempler les 144 médailles de Kim Il-Sung ; un nombre impressionnant d’entre elles avaient été frappées dans des pays arabes ou africains. (…)
Les hommes qui ne portaient pas l’uniforme étaient le plus souvent vêtus de pantalon sombre et de chemise en coton clair. Les femmes, de leur côté, portaient volontiers des jupes, des chemisiers clairs, éventuellement sous un cardigan ou un blazer assorti, et de jolies chaussures à talon bottier. (…)
Ce contrôle extrême du tourisme rend les descriptions de voyages en Corée du Nord très semblables, car tout le monde voit plus ou moins les mêmes choses, sous la houlette de guides qui ont appris par cœur les mêmes laïus. (…)
Vue d’ici, à 150 mètres au-dessus du sol, Pyongyang ressemblait à n’importe quelle ville bétonnée et sordide d’Asie. (…)
En rentrant à ma chambre, je m’aperçus que j’avais perdu mon iPhone, et je retournai sur la plage, à sa recherche. Une femme et deux garçons étaient assis dans une barque tirée à terre, ils m’observaient sans rien dire. (…)
À côté, les Japonais avaient érigé un monument assez insipide pour fêter leur sortie victorieuse de cette bataille. (…)
En quelques petites heures seulement, le train à grande vitesse me conduisit de Dalian à Harbin, à plus de 800 kilomètres plus au nord. Des centaines de groupes d’immeubles modernes, tous identiques, passaient à toute allure à l’extérieur et disparaissaient. De temps à autre des cultures, un champ de maïs. Et encore des immeubles. (…)
Je ne tins pour ma part pas plus de quelques minutes dans cette cohue, avant de ressentir le besoin de remonter à la lumière du jour et à l’air frais.
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La chambre décorée en nuances de brun empestait les moisissures et le béton humide. Une seule lampe fonctionnait, un lampadaire chancelant à l’abat-jour de guingois. Tout un bataillon de moustiques et de mites tournicotait sous le plafond. Je me postai un moment à la fenêtre pour regarder la ville. Hormis un ou deux monuments éclairés, cette grande ville était plongée dans une obscurité totale, et j’eus l’impression d’être arrivée dans une zone de guerre où le couvre-feu était décrété. Une vieille habitude me poussa à consulter mon mobile, mais il n’y avait évidemment aucune couverture. En théorie, rien n’empêchait d’acheter une carte SIM locale, mais elle coûtait 120 dollars, n’autorisait que 20 SMS et ne permettait l’appel que vers des numéros nord-coréens? Pour 90 dollars de plus, on disposait de 50 Mo pour surfer sur le Net.
Je mis le mobile en mode avion et le rangeai.
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Au fil des siècles, la taille de la Russie a été sa ­meilleure défense. Les distances sont si importantes qu’aucune armée étrangère n’a réussi à prendre le contrôle de toute cette énorme masse terrestre. Mais la taille est aussi le plus gros point faible de la Russie. L’Empire romain, l’Empire ­persan, le califat des Omayyades et l’Empire mongol ont tous fini par ­tomber, tout simplement parce qu’ils étaient devenus trop grands. Le centre finissait par ne plus pouvoir contrôler la périphérie ou protéger les frontières extérieures contre les invasions d’armées.

Quand l’Union soviétique a fini par tomber, c’était en grande partie parce que les peuples des régions péri­phé­riques se sont rebellés, et ainsi, un masque après l’autre, une république après l’autre, de la Lituanie à la ­Géorgie, ­l’empire s’est désintégré. La Russie a perdu environ 20 % de son territoire, et plus de la moitié de ses ­habitants.

Mais la Russie est toujours gigantesque. Elle est quatre fois plus grande que L’UE et presque deux fois plus grande que les États-Unis et la Chine. La frontière russe, telle qu’elle est décrite ici, sera sans doute bientôt une page de ­l’Histoire. Elle s’allongera peut-être avant de raccourcir, comme les contractions d’un serpent agonisant, mais à terme, on voit mal comment la Russie, avec ses 200 groupes ethniques et nationalités, ses 17 millions de kilomètres ­carrés et sa frontière longue de 60 000 kilomètres, peut continuer à exister en tant que tout homogène dans une génération, cent ans ou deux cents ans.

En 1991, la Russie a gagné huit voisins. Il pourrait vite y en avoir d’autres. Si Eltsine, puis Poutine, ont réprimé aussi violemment les émeutes en Tchétchénie, c’est entre autres parce que la peur de voir l’empire se fragmenter un peu plus était bien présente. À ce jour, la Tchétchénie est tenue d’une main de fer par le dictateur Ramzan Kadyrov, mais aussi bien les rideaux de fer que les mains de fer peuvent ­rouiller et se disloquer, parfois du jour au lendemain.
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ucun des pays que j’avais visités n’était dépourvu de plaies ou de cicatrices consécutives au voisinage de la ­Russie. C’était surtout le petit peuple qui, au cours des siècles, avait été broyé entre les meules, déchiré par les guerres entre grandes puissances, puis déplacé çà et là.

Les nations n’ont pas de mémoire ; les nations n’ont pas de plaies qui se referment, les nations n’ont pas de cica­trices. Les cicatrices sont portées par les individus, un ici, un là, un autre, et encore un… des millions.

Au fil des siècles, les frontières se sont modifiées une ­multitude de fois, pour la dernière fois en 2014 quand la ­Russie a annexé la Crimée. Les frontières ne sont pas ­gravées dans le marbre ; les nouvelles bornes-frontières en fibre de verre sont faciles à déplacer. Le plus grand pays du monde n’a pas une grande confiance en lui : l’économie est en perte de vitesse, la population diminue. Le besoin de ­s’affirmer n’en est que plus grand.
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ui provo­qua d’autres déportations, ainsi qu’une loi interdisant aux Abkhazes d’habiter sur le littoral ou dans les plus grandes villes d’Abkhazie. La loi fut en application jusqu’en 1907. Les ­Géorgiens, les Grecs et les Arméniens s’installèrent dans les villages abkhazes abandonnés. Au début des années 1930, le redouté Lavrenti Beria arriva au poste de ­dirigeant de la région du Sud-Caucase. Beria était mingrélien, une minorité géorgienne, et né en Abkhazie. Il favorisa l’ins­tal­la­tion d’encore plus de Géorgiens en Abkhazie. En 1939, la proportion d’Abkhazes était tombée à 18 % de la popula­tion totale, et elle resta stable jusqu’à la chute de l’Union soviétique. Près de la moitié des habitants, 45 %, étaient des ­Géorgiens.

Sous Gorbatchev, de profondes dissensions apparurent entre les Abkhazes et les Géorgiens. Tandis que ces ­derniers rêvaient d’indépendance, les Abkhazes voulaient conti­nuer à faire partie de l’Union soviétique, mais en tant que ­République soviétique et non assujettis à la Géorgie. Au prin­temps 1989, plusieurs milliers d’Abkhazes signèrent une déclaration exigeant la création d’une République socialiste soviétique abkhaze. Les Géorgiens se sentirent provoqués, et des milliers de manifestants défilèrent dans les rues de Tbilissi pour protester contre cette proposition. Les tensions montèrent, et le 9 avril, l’armée soviétique entra dans ­Tbilissi pour calmer les esprits. Vingt et une per­sonnes furent tuées, plusieurs centaines blessées. Neuf mois plus tard, les soldats soviétiques investirent Bakou et firent, là aussi, plus de mal que de bien.

En avril 1991, la Géorgie proclama son indépendance vis-à-vis de l’Union soviétique. Les Abkhazes, en revanche, ­voulaient conserver l’Union soviétique. En accordant aux Abkhazes une bonne part des sièges au Parlement abkhaze, au détriment des Arméniens et des Géorgiens, les poli­tiques de Tbilissi parvinrent à calmer le jeu un court ­instant. En février 1992, le Parlement géorgien décida pourtant de rétablir la constitution de 1921, dans laquelle les autonomies en Abkhazie, en Ossétie et en Adjarie ne sont pas évoquées du moindre mot. Les Abkhazes répondirent en ­juillet de la même année en rétablissant leur constitution de 1925, quand l’Abkhazie était encore reconnue comme république ­unionale. Autrement dit, le Parlement abkhaze avait déclaré l’indépendance vis-à-vis de la Géorgie. La réponse ne se fit pas attendre : le 14 août, des chars géorgiens entrèrent à Soukhoumi. L’armée géorgienne, en partie constituée de prisonniers récemment libérés, était indisciplinée, et les soldats massacrèrent, violèrent et pillèrent. Les ­Abkhazes de leur côté, reçurent le soutien de la Confédération des peuples du Caucase, qui rêvaient d’un Caucase libre, et béné­ficièrent petit à petit de livraisons d’armes de la ­Russie.

L’enjeu était gros pour la Géorgie. Deux cent cinquante mille ­Géorgiens ethniques vivaient en Abkhazie, et la région représentait environ la moitié du littoral national sur la mer Noire. Cette guerre dont les journaux occidentaux n’avaient pratiquement pas parlé avait été le cadre d’effrayants abus de part et d’autre et avait avancé par secousses, au rythme des fragiles accords d’armistice systématiquement ­violés. En septembre 1993, quand les forces abkhazes prirent le contrôle de Soukhoumi, les Géorgiens restants aban­don­nèrent précipitamment la ville pour échapper à cet état de non-droit.

« Nous avons quitté Soukhoumi sur un bateau de guerre ukrainien le 27 septembre, raconta le bloggeur ­Giorgi ­Jakhaia. Par la suite, nous avons appris que ­Soukhoumi était tombée. Le jour même. Tout le monde n’a pas eu notre chance, beau­coup ont dû fuir par la montagne. La neige était arrivée tôt cette année-là, et plusieurs centaines de fugitifs sont morts de froid dans le défilé. À Tbilissi, nous avons été ­hébergés dans un hôtel, l’Holiday Inn actuel. Presque tous les hôtels de Tbilissi ont été reconvertis en logements provisoires pour les réfugiés d’Abkhazie. Nous avons vécu dix ans dans cette ­chambre d’hôtel. »

Au moins 8 000 personnes perdirent la vie pendant cette guerre. Hormis quelques rares milliers de personnes qui vivaient dans la région de Gali, près de la frontière géor­gienne, tous les Géorgiens quittèrent l’Abkhazie. Par la suite, un peu moins de 50 000 Géorgiens de la région de Gali sont rentrés chez eux, tandis que 200 000 des réfugiés géorgiens vivent toujours hors d’Abkhazie. Bon nombre d’entre eux sont à ce jour parqués dans des centres provisoires pour ­réfugiés, en attendant que la vie reprenne.

« Je rêve de retourner un jour à Soukhoumi », confia ­Giorgi, qui poste souvent sur son blog des photos montrant à quoi l’Abkhazie ressemblait dans le temps. « C’est le plus bel endroit du globe. »
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Il s'appelait Alexandre, m'apprit-il ensuite, exactement comme le président, pour qui il n'avait d'ailleurs pas une affection immodérée :
"Je n'ai pas voté pour Loukachenko aux dernières élections. Dans une démocratie en bonne santé, le président devrait être remplacé au bout d'un ou deux mandats. Enfin, c'est mon avis."
Loukachenko est président de Biélorussie depuis 1994. Aux élections de 2015, il a été réélu avec 83,5% des voix.
"Au fond, je ne connais personne qui ait voté pour lui, ajouta-t-il. En Biélorussie, une blague dit : après l'élection, le plus proche collaborateur du président est allé voir Loukachenko et lui a dit : Monsieur le président, j'ai une bonne et une mauvaise nouvelle. Je t'écoute ! a répondu Loukachenko. Eh bien, la mauvaise nouvelle, c'est que personne n'a voté pour vous. La bonne nouvelle, c'est que vous êtes réélu."
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Combien d'auteurs estoniens connaissez-vous ? La Russie a Lermontov, Pouchkine, Dostoïevski, des ballets de premier ordre, des films mondialement connus, une histoire vieille de mille ans. Les Estoniens, eux, ont la souffrance et la dépression. Ils ont été occupés par les Allemands pendant sept cent ans, et par l'Union soviétique pendant cinquante ans. L'histoire estonienne est faite de traumatismes et de paradoxes ; les estoniens sont fiers de leur passé de SS - l'Estonie a été l'un des premiers pays à devenir judenfrei !
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Parmi tous ceux qui visitent la Mongolie de nos jours, personne ne peut douter de se trouver dans la patrie de Gengis Khan, ou Chinggis Khaan, comme l'épèlent les Mongols. Le voyageur arrivant en avion atterrit à l'aéroport Chinggis-Khaan. Les plus fortunés peuvent alors descendre au Chinggis Khaan Hotel, le premier à avoir décroché ses quatre étoiles en Mongolie. Le soir arrivant, vous serez peut-être tenté par une bière Chinggis Khaan au bar Chinggis Khaan, en centre-ville, où il n'est pas rare du tout de tomber sur des étudiants de l'université Chinggis Khaan. Les amateurs de boissons plus costaudes se rabattront sur un shot de vodka Chinggis Khaan, qu'on ne savoure jamais autant qu'entre deux bouffées d'une cigarette Chinggis Khaan. Le règlement se fait en tugriks, la devise locale. L'inflation étant forte, autant sortir tout de suite les coupures de 20 000. Elles sont ornées du visage pensif de Gengis Khan, bien qu'on n'ait pas la moindre trace historique indiquant à quoi il ressemblait véritablement.
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