AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de MarcelP


Dans le vieux Sud féodal de Faulkner, rongé de culpabilité, les jeunes gens de bonne famille se suicident cependant que leurs soeurs s'avilissent... Something is rotten in the State of Yoknapatawpha!

Dans "The Hamlet" (tiens, tiens...), les Érinyes (la Haine, la Vengeance et l'Implacable) s'en mêlent. Sartre imaginait Argos envahie de mouches, Faulkner lâche de gras asticots livides à la conquête de son Comté : les Snopes avant d'être une engeance sont une malédiction.

Patchwork efficace - l'auteur y a cousu une demi-douzaine de nouvelles - le Hameau nous conte la propagation d'une smala de pauvres blancs (des Po'White) sur les terres désormais mythiques du grand Bill.

Le roman s'ouvre sur le patriarche Abner Snopes qui par son incroyable inertie contraint le vieux Will Varner, effrayé par ses talents d'incendiaire, à accueillir dans sa maison, son magasin puis sa famille son fils Flem. Flem Snopes, monolithe à noeud papillon, mutique crapule, pratique l'usure, spolie les plus pauvres et gruge sans état d'âme le moindre péquenot. Bien vite bombine "autour des puanteurs cruelles" du hameau un essaim de Snopes : Lump, le rapace couard, I.O., le polygame flegmatique, Ike l'idiot baveux -un cliché faulknérien- ou, parmi une nuée d'autres, Mink, le criminel besogneux.

Entre truculence et pathétique, le lecteur est brinquebalé de la vente aux enchères d'étalons sauvages à l'hystérique recherche d'un chimérique trésor. Mais le talent de Faulkner n'est jamais aussi éclatant que dans trois épisodes inoubliables :

Celui consacré à Eula Varner, tout d'abord, placide génisse, bouddha féminin qui attend impassible son inséminateur. Grosse des oeuvres d'un paltoquet qui prend aussitôt ses jambes à son cou, elle sera vendue (avec son héritage) à Flem Snopes qui endossera cette paternité intéressée avec plaisir.

Celui qui, ensuite, nous conte les amours bovines d'Ike, le retardé morveux, qui poursuit de ses assiduités une brave vache qui n'en demandait pas tant. Malgré le rire qui menace, Faulkner poétise cette passion bestiale (et l'on pense au Paradou de Zola).

Celui enfin où Mink, le paysan borné, se venge de l'homme qui l'a humilié, et les interminables nuits où ce piètre meurtrier lutte contre le chien de sa victime qui hurle son chagrin aux pieds du cadavre escamoté dans le tronc d'un arbre.

Une mosaïque très réussie donc dans laquelle le style de Faulkner se fait tour à tour lyrique, métaphysique ou picaresque. Complexe, ce faux "roman mineur" est un alcool fort, une gnôle qui frappe dru!
Lien : http://lavieerrante.over-blo..
Commenter  J’apprécie          100



Ont apprécié cette critique (5)voir plus




{* *}