AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de deficritique


Grâce et dénuement est un roman qui retrace l'histoire d'une tribu de Gitans dont Angeline est la doyenne, mère d'Angelo, célibataire, de Simon marié à Héléna, de Lulu, marié à Misia, de Moustique, marié à Miléna et d'Antonio marié à Nadia. Esther, une « gadjé » bibliothécaire va venir faire la lecture aux enfants de ces couples et de cet événement partira notre histoire.

Alice Ferney, auteure du XX ème siècle, a été récompensée pour son roman Grâce et dénuement, publié en 1997, par le prix « Culture et bibliothèque pour tous ». Elle a choisi son pseudonyme pour son fanatisme du philosophe Voltaire, qui a passé la fin de sa vie en Suisse, à Ferney. Elle aussi écrit L'élégance des veuves (1995), La conversation amoureuse (2000)... Dans sa vie l'importance se place dans la relation amoureuse, la maternité, la transmission du savoir, idéologie que l'on retrouve dans le comportement d'une tribu Gitane, notamment celle du roman.
Grâce et dénuement est une fiction, fruit d'une compilation d'ouvrages, coupures de presse et témoignages consacrés à la vie des gitans.

J'ai beaucoup apprécié la lecture de Grâce et dénuement.
Premièrement, le roman nous permet de découvrir un autre monde, une autre culture que celle que nous côtoyons au quotidien, mais aussi différente de tout ce que l'on peut apprendre à connaître grâce aux médias, car on entend très peu parler des Gitans, que ça soit à la télévision ou dans les journaux. Par exemple, les Gitans peuvent avoir certaines croyances comme c'est ici le cas pour la tribu d'Angeline qui consulte « Ysoris » à chaque naissance d'un nouvel enfant. de plus, on comprend très vite que les Gitans sont méfiants vis-à-vis des étrangers à leur tribu. Tout au long du roman ils appellent Esther « gadjé » qui signifie qu'elle n'est pas Gitane et ils mettent du temps avant de l'inviter dans leurs caravanes.
Deuxièmement, je trouve que ce roman effectue la chronique très objective du mode de vie des Gitans. On ne cherche pas à nous cacher les points négatifs de leur comportement, on nous met au courant de leur trafic, des cambriolages, des vols même si tout n'est pas dit dans le détail. On aborde aussi ouvertement les violences conjugales avec Simon qui bat sa femme Héléna, qui le quittera d'ailleurs pour cette raison, ainsi que les violences faites aux enfants quand ils désobéissent (claques, coups...).
En parallèle, on découvre également leur générosité mais aussi toute l'horreur de leur situation. le camp de Gitans invite avec eux les sans-abris à passer Noël, car il faut toujours partager avec les plus démunis que soit. Pour ce qui est de la difficulté de leur quotidien on s'en rend compte avec la promiscuité de la vie commune dans les caravanes ou quand Nadia fait une fausse couche sans assistance médicale « Elle [Angeline] s'occupa d'enlever la culotte pleine de l'enfant perdu. » (p.155 ; l. 170-171), le lecteur n'est pas ménagé, les détails sont donnés crus et ce qui prouve la réalité de cette scène comme des autres.
De plus, le réalisme de cette fiction permet de démontrer les méfaits des préjugés de la société sur les gitans. Au moment de la naissance de Djumbo, le fils de Misia et de Lulu, au début du roman, on est témoin du manque de considération du service médical devant l'arrivée de gitans, mal habillés, sales, mais qui demandent de l'aide pour faire naître un enfant. le personnel les ignore et sans l'aide d'un généreux interne, ils manquent de ne pas être pris en charge. Lulu est tout de même privé du spectacle de la mise au monde de son enfant sous prétexte que ce n'est « pas autorisé ». On retrouve ces difficultés à la mort d'un des membres de la tribu qui sera traité d'une façon intolérable à l'hôpital vis-à-vis de la prévention de la famille... Il y a aussi le cas de la scolarisation d'Anita, l'aînée des enfants de la tribu, soeur de Sandro et de Djumbo. Aucune école ne veut l'accepter en son sein avec l'excuse du manque de certains papiers, formulaires... Esther réussira à l'inscrire dans une école en usant des sentiments de la directrice.
En effet, on nous donne quelques preuves qui expliquent la difficulté d'intégration des Gitans au reste de la société. Nous sommes avertis de leur manque d'éducation « Les Gitans ne comprennent rien. Ils ne peuvent pas se défendre. » (p.126 ; l.60-61). de plus, à la page 147, la petite Anita, scolarisée depuis peu se plaint d'être rejetée à cause de sa coiffure. Elle a les cheveux sales et emmêlés alors que les autres fillettes portent des couettes, des tresses, des queues de cheval aux cheveux propres. L'apparence est un facteur de socialisation qui empêche l'intégration des Gitans.
Pour continuer, on observe dans ce roman, la possibilité de croiser deux groupes sociaux très distincts, la preuve à travers l'amitié que noue Esther, une « gadjé » bibliothécaire, au fil du temps, avec ce camp de Gitans et tout ce qu'elle réussit à leur apporter comme culture littéraire, notamment aux enfants ainsi que les échanges d'idées et de convictions qu'elle effectue avec les adultes en discutant avec la vieille Angeline autour du feu, avec les mères...
Pour finir, ce roman délivre une très belle morale qui fait image à l'idéologie de l'auteur. Ici, rien n'est plus important que la famille, l'amour, la maternité. Comme cité dans le dénouement du livre « Ça j'oserais jamais la prendre la pilule, disait-elle en mettant la bouche dans ses mains. » (p.195 ; l.15-16), la reproduction est quelque chose de très respecté chez les Gitans, elle ne doit en aucun cas être refoulée. On doit être fière de tomber enceinte et de fonder une famille.
Commenter  J’apprécie          00







{* *}