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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Né à Vienne en 1905, le psychiatre et philosophe Viktor Frankl a 37 ans lorsqu'il est déporté à Theresienstadt avec toute sa famille puis à Auschwitz où sa femme meurt le jour de son arrivée, mais sans qu'il ne le sache.

Sur une centaine de pages d'une grande pudeur, il raconte de manière quasi clinique les conditions de vie d'un déporté. Tout d'abord, l'anéantissement de l'état-civil des détenus : de personnes avec un nom et un passé, ils sont réduits à de simples numéros de matricule sans passé ni avenir. Seul le présent compte et il signifie travailler au-delà de ses forces pour éviter d'être considéré comme « inutile » et donc gazé.

Au camp, la nourriture est sciemment insuffisante de même que les soins médicaux. D'ailleurs, ses collègues qui sont reçus à l'infirmerie reçoivent encore moins de nourriture pour les motiver à retourner travailler...

Évidemment, beaucoup décident d'en finir en arrêtant de s'alimenter puis en se jetant contre les barbelés électrifiés. Viktor, comme des centaines d'autres se refuse au suicide. Et c'est là tout l'intérêt de ce témoignage écrit en neuf jours, quelques mois après sa libération.

En effet, lors de son arrestation en 1942, il était en train de terminer un ouvrage scientifique sur « le vide existentiel » qui accablait certains de ses patients. Il y était question de la (re) découverte du sens de la vie.

Bien que son précieux manuscrit lui ait été arraché par les SS dès son arrivée au camp, il n'a eu de cesse d'y penser durant toute sa détention avec la folle volonté de le publier s'il en sortait. Or, il observe parmi ses compagnons d'infortune (le mot est faible) que ceux qui survivent le plus longtemps ne sont pas nécessairement les plus costauds. Non, ce sont plutôt les détenus capables d'invoquer des valeurs nobles (comme la dignité) et de les vivre le plus possible au quotidien.

Il explique que « tout homme peut, même dans des circonstances particulièrement pénibles, choisir ce qu'il deviendra — moralement et spirituellement. Et de conclure : on peut garder sa dignité dans un camp de concentration. Autrement dit, on ne peut enlever à un être humain sa liberté intérieure. »

Ce qu'il découvre à Auschwitz, c'est « qu'il est également possible de poursuivre un but même si l'on n'éprouve aucun plaisir à vivre et qu'on ne peut aucunement développer sa créativité (...) Car, si l'existence à un sens, il faut qu'il y ait un sens à la souffrance. Celle-ci, comme la mort, fait partie de notre destinée. »

Pour Frankl, c'est justement « la manière dont un être humain accepte son sort et tous les tourments qu'il implique » qu'il aura l'occasion de trouver un but plus profond à sa vie. Il peut alors agir avec dignité, courage et désintéressement. »

Heureusement aimerait-on dire, il reconnaît que « seuls quelques prisonniers surent préserver leur liberté spirituelle. Mais, ces exemples suffisent à démontrer que l'être humain peut transcender un sort contraire. »

En l'occurrence, pour lui cela signifiait « transformer les expériences vécues en triomphe » : par exemple, aujourd'hui malgré le froid, la neige et l'épuisement qui m'ont accablé, je n'ai pas abdiqué en me laissant mourir derrière un arbre.

Une autre manière de contrer le désespoir était de se projeter dans une réalité parallèle : il s'imaginait parfois donnant une conférence sur la psychologie des déportés à un parterre de scientifiques bien nourris et vêtus avec classe !

A l'inverse, ses collègues qui se rappelaient le passé idéalisé finissaient toujours par déprimer encore plus, tant la comparaison avec le réel qu'ils vivaient était douloureuse. Souvent, ils finissaient par se dire que leur vie au camp n'en valait pas la peine et ils se laissaient dépérir...

C'est pourquoi, lorsqu'il décelait les symptômes avant-coureurs de la dépression chez un détenu, il essayait de lui suggérer un but quelconque : « dehors, ta famille t'attend et elle compte sur ton retour » ou « tu t'apprêtais à terminer ce magnifique projet en arrivant ici, il te faut t'accrocher pour pouvoir finir » ou « que dirait ta mère si elle te voyait te laisser aller de la sorte ? »

Et de reconnaître que « ces tâches, qui donnent un azimut à la vie, sont différentes pour chaque homme et à chaque moment. Il est donc impossible de définir le sens de l'existence d'une manière générale. » Ce qui n'empêchait pas les plus courageux de reconnaître que dans leur situation désespérée, leur unique défi consistait à accepter et endurer la souffrance quotidienne « avec fierté ».

Alors, après son retour à la civilisation en 1945, Krankl a créé un troisième courant thérapeutique autrichien appelé la logothérapie. Il s'agit d'une psychothérapie devant aider le patient à découvrir un fil rouge à sa vie. le postulat de départ est le suivant : chaque individu a une raison de vivre qui n'est révélée qu'à lui seul. S'il fait l'effort pour la cerner, il aura la possibilité de lutter pour la conquérir... ce qui lui fournira un but à atteindre !

En effet, « ce dont l'humain a besoin, c'est de se sentir appelé à accomplir quelque chose. » le rôle du logothérapeute est alors de créer « l'électrochoc » qui réveillera l'esprit de combat de son client qui lui donnera l'énergie nécessaire pour sortir de la nasse dans laquelle il s'était laissé tomber.

Car, pour Frank cela ne fait aucun doute : « l'homme ne cherche pas avant tout le plaisir ou la souffrance, mais plutôt une raison de vivre. Voilà pourquoi l'homme est prêt à souffrir s'il le faut, mais à la condition, bien sûr, que sa souffrance ait un sens. Eurêka ! et CQFD :-)
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C'est un ouvrage très inspirant, qui ne peut laisser indifférent par la dureté de l'expérience racontée et l'humilité de l'auteur. Ses propos résonnent énormément tant ils sont au plus prés de la réalité et du vécu de chacun. Il décrit bien ce que l'on ressent face à ce vide existentiel, à quel point c'est normal et les voies qui peuvent permettre à chacun de trouver du sens à sa vie au lieu de nous dire qu'il faut faire sans et que cela ne devrait pas nous affecter.
Je l'ai lu deux fois de suite, et ai pris beaucoup de notes.

La seule chose qui me dérange est une contradiction. L'auteur fait l'apologie de très hautes valeurs morales qui sont possibles selon lui, dans un milieu aussi extrême et indispensable à faire du sens donc à avoir une raison de vivre qui augmenterait les chances de survie, comme cela a été son cas et en même temps reconnait au début de son récit que les meilleurs d'entre eux, à cet égard n'en sont pas revenus. Alors, je pose la question. A quoi bon garder de très hautes valeurs morales quand celles-ci nous empêchent de survivre? A quoi bon survivre quand on a renié ses valeurs morales et ses scrupules.

"Généralement, seuls se maintenaient en vie les prisonniers qui, ayant passé d'un camp à un autre pendant plusieurs années, avaient abandonné tous leurs scrupules et qui pour sauver leur peau, étaient prêts à employer tous les moyens, même la force brutale, le vol, la trahison. Nous qui sommes revenus des camps par chance ou par miracle-appelez-ça comme vous voudrez-nous savons: les meilleurs d'entre nous y sont morts"

"L'Homme n'est-il que le produit de son milieu? Dans ce milieu si extrême, l'Homme peut-il encore choisir?
Ses expériences prouvent qu'il peut choisir
On pourrait citer de nombreux comportements, souvent de nature heroïque, qui démontrent que le prisonnier pouvait surmonter son indifférence et contenir sa colère"

"Ceux qui ont vécu dans les camps se souviennent de ces prisonniers qui allaient, de baraque en baraque, consoler leurs semblables, leurs offrant les derniers morceaux de pain qui leurs restaient"

"Tout homme peut, même dans des circonstances particulièrement pénibles, choisir ce qu'il deviendra moralement et spirituellement"

"C'est cette liberté spirituelle qu'on ne peut nous enlever qui donne un sens à la vie"

On pourrait croire que ces considérations sont peu réalistes et trop distanciées de la vie de tous les jours, et il est vrai que très peu de gens sont capables d'épouser de hautes valeurs morales. Seuls quelques prisonniers surent préserver leur liberté spirituelle, seule une poignée d'hommes s'élevèrent jusqu'à ces valeurs que leurs souffrances leurs permettaient d'atteindre, mais ces seuls exemples suffisent à démontrer que l'être humain peut transcender un sort contraire"

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Je n'ai pas réellement l'impression que la logothérapie soit quelque chose de tout à fait différent. Ca emprunte à beaucoup de philosophies et de penseurs. La question de donner un sens à sa vie pour bien la vivre, avancer, cheminer, ça n'a rien de neuf.
Toutefois dans ce livre, Frankl donne un certain corps et une certaine substance à travers son propre exemple (il n'y a jamais rien de plus parlant que les exemples personnels, rien de plus édifiant...). Ce qui fait qu'on aime ce livre, on aime Frankl et on a envie de promouvoir aussi cette logothérapie.
Personnellement je pense exploiter, à ma manière, cette question du sens, dans mon travail de thérapeute et ce livre, que j'ai lu il y a longtemps dans une période plus sombre de ma vie, m'y a gentiment amené.

Un extrait de la postface Postface à l'édition de 1984 :
"Pour un optimisme tragique"
… cette expression signifie que l'on reste optimiste en dépit de la « triade tragique », formée des aspects suivants de l'existence humaine : 1) la souffrance ; 2) le sentiment de culpabilité ; et 3) la mort. […] la vie peut-elle conserver son sens en dépit de tous ses aspects tragiques ?
[…] aptitude de l'homme qui, lorsqu'il est en accord avec lui-même, peut : 1) transformer la souffrance en réalisation humaine ; 2) trouver dans son sentiment de culpabilité l'occasion de s'améliorer ; et 3) agir de façon responsable face au caractère transitoire de la vie.
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Ce texte se divise en 2 parties : les souvenirs de Frankl sur sa détention à Auschwitz et un résumé de la méthode qu'il a créée, la logothérapie.
Comme tout témoignage de rescapé de l'horreur nazie, la première moitié est bouleversante, dans tous les sens du terme : révoltante par rapport aux atrocités commise, émouvante face aux gestes et paroles d'humanité des déportés, source d'incompréhension devant l'attitude des bourreaux et d'admiration pour le courage et la force d'âme des survivants.
Évidemment cette lecture m'a ramené au livre de Primo Levi, lecture la plus marquante de toute ma vie de lecteur. Frankl entre moins dans le détail (son texte est plus court) et présente son travail avec l'oeil du médecin psychiatre. Ainsi, Levi exposait les motivations et les choix qui l'ont aidé à survivre (le principal étant de regarder chaque autre déporté comme un homme, pour s'opposer à l'objectif des nazis de les transformer en objets, en outils, numérotés comme pour faciliter l'inventaire, exploitables jusqu'à la "panne" définitive et jetables quand il ne "fonctionnent" plus). Frankl, lui, décrit plutôt en observateur extérieur les différents stades psychologiques par lesquels peuvent passer les personnes enfermées dans les camps de concentration. La sidération, la détermination pour survivre ou la résignation et la perte de toute volonté et l'abandon à la mort. Il décrit son propre vécu, les idées, réflexions, actions auxquelles il s'est accroché. Il évoque aussi les paroles qu'il a prononcées face à des désespérés. Mais le plus souvent, il parle des autres, de leur attitude, à l'entrée dans le camp, au fil des mois, au moment de la libération et durant la période du retour chez soi. Chacune de ces étapes est analysée du point de vue psychologique et permet à Frankl, en tant que médecin, de tracer les grandes lignes d'une psychologie de l'enfermement, dont il ajoute même des exemples venus d'autres types de prisonniers, retenus dans d'autres pays en guerre, dans des conditions différentes des camps de concentration.
Ce travail d'observation a permis à l'auteur de bâtir une méthode d'aide psychologique, la logothérapie, dont le moteur principal est la recherche d'un but.
S'opposant à ses prédécesseurs, Freud et Adler, dont il fut proche avant de rejeter leurs conceptions, il ne promeut pas un retour sur le passé, long, parfois douloureux, mais une projection vers l'avenir. Il parle d'intention, qui peut être réfléchie et constructive ou au contraire excessive et contreproductive, dans le sens où le fait de s'accrocher à un objectif jusqu'à en faire une obsession peut conduire à l'échec. Il suggère même, pour atteindre son but, de rompre avec l'habitude de le fixer un but de cette façon anxieuse, mais plutôt de faire preuve de détachement et de laisser venir. Cela n'est sans doute pas applicable tout le temps, mais il donne notamment comme exemple les difficultés d'endormissement : plus on se dit qu'il faut dormir, moins on y arrive ; s'occuper l'esprit autrement, jusqu'à ce que le sommeil arrive sera beaucoup plus efficace. C'est un exemple simple, voire simpliste présenté ainsi, mais qui a l'avantage d'être parlant (surtout pour moi).
Cette lecture a donc été intéressante, pour ses 2 parties. le seul défaut de ce livre est qu'il est trop court et le témoignage comme la théorie exposée ensuite manquent d'approfondissement. Ils donnent alors l'envie d'aller plus loin en lisant les autres oeuvres de Viktor Frankl.
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Je pensais que ça allait être un livre un peu cucul de psychologie mais au final j'ai bcp aimé le fait que les ¾ du livre sont basés sur son expérience dans les camps de concentration et que la psychologie de sa méthode se résume à la fin en quelques pages. J'ai bien aimé ce témoignage plutôt cash et très factuel. A prendre comme il est et ce qu'il y a de bien, même si je n'ai pas tout compris la philosophie.
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Viktor Frankl nous permets de prendre conscience que nous sommes les seuls « maître » de notre vie même lorsque nous perdons tout espoir.
le but étant de donner « sens » en toutes choses.
cette vision de la vie est une ouverture au monde, à soi, aux autres.

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L'auteur décrit son expérience des camps de concentration et l'attitude humaine face à l horreur. Comment les gens ont réagi en fonction de leur être profond : bon ou mauvais. Il en a élaboré la logothérapie qui met l'accent sur la recherche du sens de sa vie. On se sort d'une expérience comme les camps quand on a un objectif quand sa vie a un sens. C'est vrai également dans la vie de tous les jours. Les gens sont dans la société actuelle dans un vide existentiel. d'où les nombreuses névroses. Quand on trouve un sens à sa vie tout s'éclaire.
Livre très intéressant parfois un peu ardu dans l'analyse thérapeutique et dur dans le témoignage des camps.
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