Cela faisait longtemps que je voulais m'atteler à la lecture de
L'Affreux pastis de la rue des Merles (1957) de
Carlo-Emilio Gadda (1893-1993) mais jamais je n'avais encore trouvé le courage de l'aborder. Entre temps, le pastis est devenu l'embrouille et la rue a retrouvé son nom italien. Et là, à l'occasion de mon giro de la littérature italienne, je m'y suis collée.
Et alors ?
C'est encore pire que je l'imaginais. Cette lecture, mes chers amis, est une épreuve physique et mentale, un col hors-catégorie réservé à une élite italianiste et érudite.
De quoi qu' ça cause ?
A priori il s'agit d'une double affaire policière. Dans un immeuble bourgeois de la via Merulana à Rome, un vol de bijoux puis un meurtre horrible ont été commis. le livre suit fidèlement le déroulement chronologique de l'enquête. On se retrouve dans tous les milieux, chez les bourgeois, dans les bas-fonds et même à la campagne. L'enquête sur le meurtrie de la belle Liliane Balducci, qui adoptait ses nièces pour pallier le désespoir causé par sa stérilité, ne sera pas élucidé. le policier n'est qu'un prétexte.
De quoi qu' ça cause donc ?
Heu…..
Pourquoi qu' c'est dur à piger ?
Au lieu d'aller droit au but, d'éclaircir la réalité logiquement , le langage utilisé complexifie l'histoire ligne après ligne et fabrique une affreuse pelote embrouillée. Ce pasticciaccio est farci jusqu'à saturation d'odeurs, de puanteurs, de méchancetés, diverses et variées rapportées dans différents dialectes, idiomes ou niveaux de langue par l'ensemble des protagonistes. Au départ c'est « truculent », « gouailleur »mais bien vite ça devient très pénible à lire, roboratif, lourdingue, indigeste. On étouffe !
Pourquoi qu' c'et'i donc lelitiste ?
Parce qu'il faut avoir le palais éduqué pour savourer le "pasticciaccio". Parler italien pour comprendre les jeux de mots, les inventions verbales et rire vraiment. Connaître la vie quotidienne à Rome durant les années fascistes. Il est souhaitable de posséder une connaissance populaire et intime de la langue italienne transmise par un aïeul par exemple mais aussi une connaissance érudite, historique et philosophique. On trouve également pas mal de références savantes à l'Antiquité romaine. Je n'ai pas compris la plupart des allusions, des parodies, des pastiches et mélanges. Sans ces références, c'est difficile de prendre plaisir à lire ce livre.
Gaddin.