Citations sur Poésies, tome 2 : Chansons, Poèmes du Cante Jondo, Romanc.. (37)
“AÏE!
Le cri laisse dans le vent
une ombre de cyprès.
(Laissez moi dans ce champ,
pleurer.)
Tout s’est brisé dans le monde
il ne reste que le silence.
(Laissez moi dans ce champ,
pleurer.)
L’horizon sans lumière
est mordu de brasiers.
(Je vous ai déjà dit de me laisser
dans ce champ,
pleurer.)”
Entends, mon fils, le silence.
C'est un silence ondulé,
un silence
où glissent échos et vallées
et qui fait s'incliner les fronts
vers le sol.
Adieu
Je m'effacerai
à la croisée des chemins
pour prendre celui
de mon âme .
Réveillant souvenirs
et heures sombres,
j'arriverai au petit verger
de ma chanson blanche
et je me mettrai à trembler comme
l'étoile du matin
Ah, qu’il me coûte de peine
à te laisser partir, ô jour !
Tu t’en vas rempli de moi
et reviens sans me connaître.
Ah, qu’il me coûte de peine
à laisser sur la poitrine
les possibles réalités
de minutes impossibles !
Vers le soir un Persée
vient limer tes chaînes
et tu t’enfuis sur les monts
où tu te blesses les pieds.
Rien ne peut te séduire,
ni mon corps ni mes larmes
ni les fleuves sur lesquels
tu fais ta sieste dorée.
De l’Orient à l’Occident
je porte ta lumière ronde,
ta grande lumière que soutient
mon âme à bout de tension.
De l’Orient à l’Occident
qu’il me coûte de peine
à te porter avec tes oiseaux
et tes grands bras de vent.
(CHANSONS, Chanson du jour qui s’en va)
Dans la matinée vive
je voulais être moi.
Un cœur.
Et dans le soir tombé
je voulais être ma voix.
Rossignol.
Mon âme,
rougis comme l’orange.
Mon âme,
rougis comme l’amour !
(CHANSONS, Petit air du premier désir)
Si je meurs
laissez le balcon ouvert.
L’enfant mange des oranges.
(De mon balcon je le vois.)
Le moissonneur fauche le blé.
(De mon balcon je l’entends.)
Si je meurs,
laissez le balcon ouvert !
(CHANSONS, Adieu)
La nuit toujours paisible.
Le jour part et arrive.
La nuit morte et lointaine.
Le jour n'a plus qu'une aile.
La nuit sur miroirs plans
et le jour sous le vent.
(CHANSONS, Balance)
Ronce sauvage au tronc gris
veux-tu me donner ton fruit ?
Du sang et des épines. Viens.
Aime-moi, je serai tienne.
Laisse ton fruit de vert et d'ombre
fondre sur ma langue, ô ronce.
Mon étreinte serait infinie
dans la pénombre de mes épines.
Ronce, que t'en vas-tu chercher ?
L'amour que tu ne sais donner.
(CHANSONS, Ronce au tronc gris)
JOLI CŒUR
Joli
joli cœur
on fait chez toi brûler du thym.
Tu peux partir ou rester,
j'ai fermé ma porte à clé.
D'une clé de fin argent
attachée à un ruban.
Ce ruban porte en devise :
Mon cœur est bien loin d'ici.
Abandonne ma ruelle,
laisses-y circuler l'air !
Joli
joli cœur
on fait chez toi brûler du thym !
p.55
La chanson du collégien
Samedi,
Porte du jardin
Dimanche.
Jour gris.
Gris.
Samedi.
Voûtes bleues.
Brise.
Dimanche.
Mer et rivage.
Termes.
Samedi.
Semence
Qui frémit.
Dimanche.
(Notre amour devient tout jaune.)