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Critique de Alfaric


AMOUR. AMITIÉ. COURAGE. HONNEUR. RÉDEMPTION. Jusqu'au bout David Gemmell aura été fidèle à sa devise ! Un roman émouvant, les occasions ne manqueront pour les romantiques de verser quelques larmes.

L'entrée en matière est excellente : nous découvrons l'univers en même temps que le héros redécouvre son identité avec une structure en flashback d'une belle fluidité. Grand moment que celui où est contée la bataille de Dros Delnoch dans les ruines de ce qui fut naguère Dros Delnoch… 1000 ans se sont écoulés depuis les événements de "Légende" et Skilgannon ressuscité par Landis Khan décide de réparer l'erreur de sa 1ère vie : en voulant stopper éternelle, qu'elle qu'en soit le prix, il ignore que celle-ci a perdue sa 1ère vie en essayant de sauver la sienne… Olek et Jianna les amants maudits son de retour, et en bonne compagnie qui plus est ! Derrière un style simple mais très efficace, DG nous offre un bon vieux crossover avec plusieurs niveaux de lecture qui étendent leurs ramifications aux 11 romans du cycle "Drenaï" et au-delà.
Druss est de retour !
Decado est de retour dans une version alternative…
Zhu Cao le sorcier eunuque fashion victim est de retour…
On apprend la véritable histoire de la sorcière Hewla qui a fait tant de mal à Drenaï…
L'Aigle d'Argent a sans doute été élaboré par les survivants de "L'Echo du grand chant " à partir d'une Sipstrassi de "Jon Shannow"…
Et la boucle est bouclée puisque Skilgannon est sauvé par celui qu'il avait sauvé 1000 auparavant dans "Loup blanc" !
C'est carrément tout l'univers du cycle qui défile sous nos yeux : Egel le 1er comte de Bonze, Karnak le Lord Protecteur, Rek et Hogun les héros de Dros Delnoch, Gorben l'empereur ventrian, Jianna la Reine Sorcière, Ulric le grand conquérant, Tenaka l'Unificateur métisse, le phénix drenaï, l'aigle nadir, le bien connu Waylander l'Assassin, le mal connu Lascarin le voleur…
Niveaux personnes et événements un roman d'une densité incroyable à l'image du 3e tome de "Waylander" : 0 tirage à la ligne et aucun gras littéraire cher à certains auteurs !


Mais à travers sa quête de justice et sa défense des plus faibles, Skilgannon n'est que le fil conducteur du roman. On suit la cavale d'Askari et Stavut, la fuite de Gamal et Charis, la rébellion d'Alahir et d'Agrias, la meute de Chemise de Sang, les défections successives de Landis Khan, Decado, Memnon, le maître plan de Jianna qui a tout vouloir gagner risque bien de tout perdre…
Et au final il n'y a ni bon ni méchant, juste une humanité qui entre artha (= ambition) et dharma (= devoir) se trouve prise au piège d'un implacable karma (= destin). Entre grands espoirs et rêves brisés, l'auteur nous offre une galerie de personnage assez touchants : des 2 figures principales jusqu'aux personnages ternaires, tous les protagonistes sont à plusieurs facettes.
Ainsi Decado, présenté comme une ordure psychopathe, devient un paumé sympathique après un flashback où on nous montre qu'il n'est que ce qu'on a fait de lui, puis le crevard narcissique revient au galop avant qu'il ne comprenne que le seul moment où il a été heureux est celui où il a fait semblant d'avoir besoin d'autrui.
A l'image de l'oeuvre de Michael Moorcock, toute la bibliographie de David Gemmell aura traité d'une humanité à la poursuite d'ambitions illusoires, alors qu'il lui aurait suffi de profiter des joies simples de la vie quotidienne.

Les équilibres entre palabre et baston, intrigue et action, comédie et tragédie sont vraiment bien balancés. Ainsi le binôme Skilgannon / Druss fonctionne très bien : dans l'humour on retrouve le duo Astérix / Obélix, dans la tragédie le duo Kenshiro / Rei. de la même manière difficile de ne pas s'attacher à Chemise de Sang : d'un côté on a l'humour de Goudurix et les Normands, et d'un autre côté un pathos terrible avec l'homme qui a failli devenir une bête mourant dans les bras de la bête qui a failli devenir un homme, chacun perdant la vie en essayant de sauver celle de l'autre. Plus tragique que ça, on meurt !
Beau parallèle entre Skilgannon le guerrier amoureux de la femme qu'a été Jianna et Landis Khan l'intellectuel amoureux de la femme qu'aurait pu être Jianna. Singulier Pygmalion que cet homme rationnel, le plus brillant esprit de son temps, qui se perd dans son amour pour une chimère avant de s'accrocher à une autre chimère (la prophétie émise par une sainte pas si éloignée que cela des monstres qu'il crée pour l'Éternelle), pour mettre fin à la tyrannie qu'il a contribué à établir. Je me demande même si derrière l'Éternelle de David Gemmell ne cache pas un peu la Dame de Glen Cook.
Au fil des dialogues on aussi aborde les difficiles relations entre les hommes et les femmes, l'amour et la haine, le bien et le mal, la guerre et la paix, la vie et la mort, mais aussi les affres de l'ambition et les ravages de l'insatisfaction. L'auteur va même plus loin encore car à travers le thème du clonage il aborde des réflexions métaphysiques : d'où venons nous ? qui sommes nous ? où allons nous ? qu'y a-t-il après la mort ?

Je ne suis pas un fanboy aveugle, certains points sont encore perfectibles :
- dans sa volonté de montrer l'absurdité de l'existence, on a quelques répétitions qui désamorcent un peu le souffle épique
- le choix du roman indépendant nous offre un dénouement un peu rapide après une excellente mise en place
- quelques incohérences, aka les mystères lostiens, si on veut approfondir l'univers drenaï.
- des sentiments de déjà vu, mais difficile de savoir si c'est délibéré ou non.
- quelques naïvetés qui montrent que l'auteur anglais avait un coeur d'or.
- quelques punchlines faciles dans la droite lignée de celles des années 80
- la plus grande bataille du roman est traité hors-champ.
- et des trucs laissés en suspens, comme les liens entre Ulric et Skilgannon ou la Guerre des Jumeaux, ne verront pas leur résolution…
Certains pourraient rager en expliquant que rien ne tient debout, puisque la voyante Unie aurait du empêcher l'avènement de l'Éternelle au lieu de parier sur la possible résurrection de Skilgannon pour l'arrêter. Moi je crois que tout tient debout et qu'Ustarte avait des ambitions autrement plus élevées... Et si la finalité c'est que les amants maudits se rejoignent, se réconcilient et trouvent leur rédemption pour tenir la promesse qu'ils s'étaient fait adolescents : créer un monde meilleur pour tous et pour toujours !


Car pour ne rien gâcher la fin reste ouverte. Ultime rédemption, nouveau départ, éternel recommencement ou nouvelle ère de malheurs pour Drenaï ? Chacun apportera sa réponse en fonction de son tempérament et de sa vision de la vie.
Plus qu'un chouette roman de SFFF, une ode à la liberté, à l'égalité et à la fraternité, mais aussi un plaidoyer pour la solidarité et la tolérance.
Les histoires de l'auteur britannique donnent envie d'être meilleur et de rendre le monde meilleur. Ils font du bien, n'en déplaisent à ceux qui n'y voient qu'un auteur bourrin pour lecteurs bourrins…
Lien : http://david-gemmell.frbb.ne..
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