Avec ce manuscrit je vous rends ce qui n'a pas été. Je sais quelle serait ma souffrance si je devais vous aimer. J'y renonce.
La maison résonnait de voix de femmes. Il y avait de la joie partout ; des fleurs dans les vases, des plats dans le four, du feu dans la cheminée. J'entendais la pluie marteler les voiles, l'eau gouttait que les balcons. Toutes les fenêtres étaient fermées, tous les volets étaient clos. Dedans, il faisait bon.
Nous nous rendions de menus services qui n'engagent à rien. Je me disais qu'un gentil voisin, c'était sans doute comme un bon oreiller de plume, un téléphone sans fil, un four à micro-ondes : un confort supplémentaire.
Tu es le demi-ton. Tu es l'entre-deux, la note suspendue, l'équilibre fragile. Tu es le vacillement qui contient la chute, tu es le fa dièse qui frôle le sol, un presque sol ; tu es la défaillance retenue d'extrême justesse, tu es le bord de l'abîme. Tu es ce qui pourrait être et ce qui n'est pas, tu es un possible. Tu es cette note en mouvement obligé vers une autre, qui voudrait se confondre avec elle et ne se confond pas. Tu es l'incertitude. Tu es la note sensible.
Il s’assoupirait peut-être, je m’approcherais de lui, le visage enroulé dans son souffle tranquille. De loin, nous ressemblerions à deux amants endormis sur la plage, et dont les corps, parsemés de sable, se fondraient peu à peu dans la dune.
Vendello et moi n'avions en commun qu'une mince cloison entre deux appartements. Pour moi, son existence se résumait à un ensemble de sonorités plus ou moins fréquentes et familières. Bruits de pas, claquements de portes, robinets ouverts et fermés, rugissements d'aspirateur, choc de cintres contre la penderie, cliquetis de clés dans la serrure, déplacements de meubles, grincements de lit. Il était aussi la mélodie fredonnée dans l'escalier. Par la force des choses, nous partagions son amour du violoncelle et de Mozart.