Nous n’allons pas remuer des pierres.
Nous allons bâtir des montagnes.
(...)
C’est plus qu’une revendication.
C’est une promesse.
Jusqu’au.
Retour.
À la normale.
Nous répétons, une incantation
Pour invoquer l’Avant.
Nous sommes
Arborescents -
Ce qui demeure
Invisible
Est à la racine même
De nos êtres.
Les vies noires comptent,
Quoi qu'il arrive.
Les vies noires sont dignes d'être vécues,
Sont dignes d'être défendues,
Sont dignes de chaque combat.
A ceux qui sont tombés nous devons cette lutte,
Mais c'est à nous-mêmes que nous devons de ne jamais rester à genoux
Quand l'instant nous appelle à résister.
(extrait de "La fureur & la Loi")
Nous sommes principalement façonnés par ce que nous imaginons.
Nous savons seulement que nous sommes si loin
De ce que nous savons
Que sommes-nous sinon la curiosité d'ouvrir les cercueils que nous portons, qui sommes-nous sinon toutes les choses que nous libérons.
Nous ne sommes peut-être pas totalement sûrs de ce que nous sommes.
& Nous avons pourtant enduré tout ce que nous étions.
LE MANIFESTE DU NAVIRE
Le pire serait derrière nous, parait-il.
Pourtant, nous demeurons tapis à l'orée de demain,
Figes dans nos foyers tels des fantômes acéphales,
Attendant de nous rappeler exactement
Ce que nous sommes censés faire.
& nous sommes censés faire quoi, exactement ?
Écrire une lettre au monde en tant que fille du monde.
Nous écrivons tandis que le sens s'évanouit,
Nos mots sont de l'eau qui coule sur un parebrise.
Le diagnostic du poète est que notre vécu
S'est déjà formé en un rêve fiévreux,
Aux contours arrachés à la boue de l'esprit.
Pour répondre de ses actes il faut les rapporter :
Non ce qui a été dit, mais ce que cela voulait dire.
Non pas les faits, mais ce qui a été ressenti.
Ce qui était su, même sans être nommé.
Notre plus grande épreuve sera
Notre témoignage.
Ce livre est une bouteille à la mer.
Ce livre est une lettre.
Ce livre est sans concession.
Ce livre est éveillé.
Ce livre est une veillée.
Car qu'est donc une archive sinon un jugement ?
La capsule capturée ?
Un dépositaire,
Une arche articulée ?
&le poète, le gardien
Des fantômes & des gains,
De nos démons & de nos rêves,
De nos hantises & de nos espoirs,
À la préservation
D'une lumière si terrible.
Ce n'est que quelque part dans la perte que nous trouvons la grâce de lever les yeux & de poser notre regard hors de nous-mêmes.