Mamie me l'avait toujours défendu avec force et m'avais enseigné pourquoi. Quand on interdit quelque chose à un enfant ou un ado, il faut lui donner une bonne raison. Alors autant me donner la vraie.
Les livres magiques ne peuvent être consultés que par des enchanteurs de classe une, pour la bonne et simple raison qu'un Indifférent ou un enchanteur ménager mourrait en en touchant un. Ces ouvrages ont été crées pour transmettre le savoir entre génération de détenteur de la magie. Divulguer ces connaissances même à ceux qui n'ont que la magie ménagère est proscrit. Ce serait trop dangereux. Alors les livres magiques sont ensorcelés. Pas enchantés. Ensorcelés. Un enchantement n'est pas mortel. Un sort l'est.
A l'escrime, j'oubliais tout ce qui pouvait me faire du souci. Ça me faisait un bien fou, parce qu'en ces moments, seule ma lame comptait, et l'endroit où j'allais la pointer sur mon adversaire. Je n'avais pas besoin de me poser de questions. Juste à vouloir enfoncer une épée à travers quelqu'un quand ce dernier m'énervait. Ce qui était rare, mais pas impossible.
Chacun était de bonne humeur, du moins, en général, et même si l'un d'entre nous passait la porte renfrogné, il sortait avec le sourire. C'était mieux que de la magie. C'était de l'amitié. Et puis, je dois bien avouer aussi que l'humour du maître d'armes était des fois tellement bas qu'on en riait juste pour ça!
Attention, nous allons passer à une partie théorique un peu barbante, alors... Accrochez-vous, ça ne va pas durer et au pire, sautez des lignes, même si je ne vous le conseille pas. Je dois parler de choses importantes. Plante mon contexte, quoi! Et le premier qui me sort que je recrache un cours de français, je crois que je le ficelle comme un saucisson, Et que je le recouvre de poivre.
Maintenant que les choses sont claires, allons-y (enfin!).
Les mèches blanches foisonnèrent, si bien qu’un dimanche matin, en faisant toute seule le marché avec Fa, j’achetai une perruque, qui, une fois à la maison, se colora sans mon avis de la teinte exacte de mes cheveux sans mèches. Ah, pour une fois la magie me soutenait. Allez savoir pourquoi. Mais Fa et moi nous sentions un tantinet soulagé.
Cette couverture ne m’était nécessaire que lorsque nous avions des réunions familiales, ou simplement lorsque je me trouvais dans le contexte familial. Je pouvais aller tête nue au lycée, dans la rue et avec Celestino. Et puis, je ne me situais pas dans le même établissement que Cybèle, ce qui me garantissait un soupçon de paix. Je dis bien un soupçon. Comme un soupçon de muscade dans un plat. Et je ne sais même pas pourquoi je prends cette comparaison stupide.
Bon.
Je pouvais me permettre le luxe de sortir en exposant mes mèches, pour la bonne et simple raison que si je croisais des enchanteurs, aucun d’eux ne pourrait décemment croire que je possédais la magie. Bah, oui ! J’étais une Esperanza, une Maudite, donc puisque je ne portais pas de masque et que je n’allais pas à l’école de la SE, je n’étais pas une enchanteresse.
Magique, non ?
Pour une fois que ma malchance pouvait me servie à quelque chose.
Madame Esperanza avait accepté la magie, et elle est devenue un être d'exception et de Bien. Devenez comme elle.
Désormais, nous étions trois, quatre avec Fa, et rien ne serait en mesure de nous séparer. Unis face à l'adversité. Complices pour l'éternité.
– Pourtant, ma grand-mère a lu quelque chose en moi que j'ignore encore, elle devait savoir que je serais
des élus, et elle m'a confié son pouvoir avant de rejoindre mes ancêtres, apaisée, complétai-je. Alors, comme on dit… J'y suis, j'y reste. Autant essayer de lui rendre cette grâce.
Mes parents s'occupaient de mon inscription à l'école de la SE. Pensionnat.
Le rêve éveillé s'était transformé en cauchemar en à peine deux minutes. Tout ça par ma faute.
Mais qu'allais-je faire ? Une mèche blanche était la marque indéniable du pouvoir que je portais en moi !