(Pour moi, en fabriquant un livre, c'est souvent quand le récit prend l'allure d'un journal qu'il est le plus fictionnel.)
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Je lis (seulement aujourd'hui, comme par hasard) que le DHPJ, l'antiviral qu'on me perfuse tous les jours, bloque à jamais la reproduction du sperme, mais qu'est-ce que j'en ai à foutre du foutre à présent ?
Avidité de la lecture, mais effroyable isolement de la lecture.
La maladie d’avoir toujours à dire quelque chose de quelque chose, à écrire comme pour ne rien perdre (une maladie de la mesquinerie ou de la postérité?). Le risque aussi, à un moment de l’écriture, d’un empoisonnement subi, inconscient, peut-être pire que la perte totale [...].
Le pire est vécu dans les rêves pour amoindrir le pire de la vie.
Quand tes fenêtres sont noires je veille sur ton sommeil, et je te protégerai bien de la mort, je tendrai d’invisibles filets sous ton balcon…
Et cette banalité ne me déplaît pas (aimer comme tout le monde).
Tu es mon seul correspondant, c’est à dire : tu me correspond…
Réduit à respirer mon sperme pour avoir une idée de sexualité.
Je me couchais frustré et sans imagination, et je pensai : mon rêve va bien pourvoir à ce manque, mais mon rêve ne sécrétait plus aucune créature de rêve, seulement des métaphores de frustration.