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Critique de ATOS



Je ne suis pas adepte des vide-greniers. Pourtant parfois chemin venant, je me retrouve parfois à fouiller dans des caisses de livres comme une enfant penchée sur des malles recelant des trésors oubliés. Trésors qui sont bien rares, mais quelques lectures que j'avais innocemment négligées viennent d'un passé me confier certaines pensées.
Guy de Maupassant, du collège au lycée il fait classiquement partie de notre héritage...
…. « Select-collection » , 1 franc 75, 26 rue Racine E.Flammarion.
Les pages craquent, s'effritent déjà, une odeur de papier asséché laisse l'empreinte d'une époque qu'aucun maître d'école n'est jamais venu me raconter.
« La main gauche », le titre sous lequel sont regroupées plusieurs nouvelles m'avait intrigué. Convenons en, il faut pour entendre une époque ouvrir les livres qu'elle a pu engendrer.
J'étais loin d'imaginer qu'une des nouvelles, « Allouma », pour la citer, allait provoquer un tel rejet, disons le mon effroi.
Mais j'ai tenu à la lire entièrement.
Tout en lisant je m'entendant penser «  ce n'est pas possible d'écrire cela », «  ce n'est pas possible de porter ces mots là ».
Mais que contient donc cette nouvelle ?
Du pur jus de la pensée colonialiste. Paternaliste, misogyne, raciste. Rien que cela.
Il est d'usage de parler de « littérature coloniale »….
Un regard méprisant, des termes redoutables, une vision épouvantable de l'autre .
Bien sure je ne mettrai pas d'extrait en ligne. Impossible. Alors je me suis un peu intéressée à la vision de ce monde que Maupassant décrit, écrit.
Oui, ce 19e siècle ,annonçait, portait une pensée qui explique bien des choses qui ont pu tranquillement se dérouler . Comme lentement on déroule des fils barbelés.
« Le temps des colonies », où l'on nomme étranger celui que l'on dépossède.
A voir la couverture de ce livret, et le quatrième de couverture, on sait que l'exposition coloniale de 1931 devait être l'enfant de ces visions. 
« Il n'y a pas de limite à la mélancolie humaine
Il y a toujours une pierre à placer sur la pyramide des larmes » écrivait Aragon dans son recueil « Persécuté Persécuteur ».
Je ne jette pas la pierre à Maupassant.
Il était homme de son temps…. Aragon également.
Voilà qui nous laisse méditer sur les grandes phrases qu'aujourd'hui on se voudrait utiliser.
Être de son temps... qu'est ce que cela veut dire si l'on a pas la capacité de se mettre hors champ de ce temps, si l'on en accepte l'air sans en dénoncé le caractère vicié, dégénéré.
Être de son temps ce n'est pas s'y soumettre, c'est être en capacité de le changer.
Je ne jette pas la pierre à Maupassant, mais je m'interroge. Je m'interroge sur le contenu des oeuvres que l'on demande à des millions d'élèves d'étudier. J'ai lu Maupassant, j'ai commenté, résumé, analysé bien des textes De Maupassant durant mon petit cursus scolaire. Mais force est de constater que l'on ne m'a pas présenté tout Maupassant. On ne m'a pas enseigné que son exotisme littéraire n'était que pure « littérature coloniale ».
Je pensai sagement ... « fermage normand », croyant entendre une France que l'on voudrait profonde.., profonde oui, profondément enracinée, plantée dans la chair d'un verbe comme une dague plantée au coeur des avenirs de notre humanité.
Je vais trop loin ?
Alors lisez « Allouma », vous la trouverez en ligne gratuitement, et dites moi si l'on peut être fier de cette littérature là.
Il décrivait me direz vous…
homme de son temps nous le faisons à présent témoin de son temps.
De quel réalisme, de quel naturalisme parle t on lorsqu'on ne tient compte que de sa propre fiction, que l'on décrit une terre, des hommes, et leurs usages en les méconnaissant totalement et que sur ce que l'on ne connaît pas on se permet d'accrocher de terribles fables ?


Alors non je ne suis pas fière de cette littérature qui porte en elle l'irresponsabilité de tout ce qu'elle ose laisser supposer.
On porte toujours la responsabilité de son écrit, même et surtout lorsqu'on a l'immense talent que possède Maupassant.

Astrid Shriqui Garain
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