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Critique de BazaR


Non, je ne suis pas un monstre.
Je n'aime pas la guerre et les massacres. Pourtant, paradoxalement, j'aime les récits qui en parlent.
Et cette guerre du Péloponnèse là est, dans le genre, somptueux et extrêmement éclairant.

Victor Davis Hanson est un spécialiste de la période. Il connaît l'histoire grecque antique comme sa poche. S'appuyant avant tout sur Thucydide – ce livre pourrait presque en être une exégèse – mais aussi sur Xénophon, Diodore de Sicile et Plutarque, il nous propose non pas une chronique des événements mais une approche thématique de cette interminable guerre entre la puissance maritime Athènes et la puissance continentale Sparte qui eut lieu entre 431 et 404 av. J-C. Chaque chapitre attaque le sujet à partir d'un thème déterminé : la peste, les sièges, les batailles d'hoplites, la guerre en mer, etc. Se faisant les événements se mettent en place par touche, sont interprétés de plusieurs points de vue et finissent par former un tableau clair… et macabre.
Le procédé est contrôlé, pas aléatoire. Hanson, en plaçant astucieusement ses thèmes dans son récit, commence par le début de la guerre et termine par la fin, ce qui n'est pas forcément garanti dans une approche thématique.

Le résultat est éclairant, disais-je. Je ne savais pas cette guerre si longue et si complexe. Ce mélange de conflit idéologique et de realpolitik pourrait donner des complexes à la géopolitique moderne. Imaginez pour l'exemple qu'Athènes est le défenseur des régimes démocratiques tout en étant le maître d'un empire dont elle maintient les chaines souvent sans scrupules (Athènes détruira des cités « amies » qui risquaient de quitter sa ligue) alors que Sparte favorise les régimes oligarques forts tout étant considérée par beaucoup comme le libérateur de la Grèce.
Hanson nous montre rapidement que notre image d'Épinal de la bataille entre phalanges d'hoplites n'est pas le type de combat le plus meurtrier ni le plus répandu dans cette guerre. La cavalerie a un rôle important, les techniques de guérilla à la Laurence d'Arabie aussi, sans parler des combats en mer. On retient surtout l'importance des carnages, les milliers de prisonniers massacrés, les villes réduites en cendre, l'effroyable peste à Athènes. Mais aussi les incroyables retournements de situation, quand l'espoir change de camp.

Un autre aspect éclairant est la relecture que ce livre permet des tragédies de Sophocle et d'Euripide et des comédies d'Aristophane. Je ne connais pas encore l'oeuvre de ce dernier, mais j'ai déjà beaucoup lu les deux tragédiens, et j'ai toujours analysées leurs pièces selon un angle moral ou mythologique. Hanson nous dit qu'elles contiennent en fait beaucoup des événements terribles qui avaient lieu pendant qu'elles étaient représentées. Qu'on pense à Hécube qui raconte le sort de la famille royale de Troie assassinée ou réduite en esclavage, et qui se veut aussi un cri porté contre l'attitude d'Athènes à l'égard des cités alliées qu'elle détruit sans vergogne. Assurément, j'aurai cela à l'esprit lors de mes prochaines lectures de ces auteurs.

Difficile de résumer un livre aussi foisonnant. Je n'ai fait que l'effleurer jusqu'ici. Au lieu de vous endormir par des longueurs sans intérêt, je ne peux que vous conseiller de lire ce livre si la Grèce antique vous intéresse.
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