"Comment l'Empire romain s'est effondré", une question qui a suscité débats et controverses chez les historiens depuis très longtemps déjà. Auparavant, les facteurs politiques, militaires et économiques prédominaient dans l'analyse des faits. Depuis une quinzaine d'années, les progrès fantastiques de l'archéologie alliés à une approche pluridisciplinaire, permettent d'analyser un faisceau d'éléments qui ne pouvaient l'être auparavant. Kyle Harper est professeur d'histoire à l'université d'Oklahoma (États-Unis) et il nous convie à une nouvelle histoire de la chute de l'Empire le plus puissant jamais constitué. Kyle Harper rajoute aux facteurs traditionnels, celui du climat, des éruptions et des maladies, des bactéries. L'Empire tardif a vu un changement décisif : la fin de l'OCR ou Optimum climatique romain, qui plus humide avait favorisé le développement des cultures notamment celle des céréales. de façon concomitante, des germes ont muté comme celui de la peste bubonique transmise par le biais des puces. Les égouts qui stagnaient en ville, les bains publics, les greniers à blé étaient autant de facteurs susceptibles de provoquer des épidémies catastrophiques sur le plan démographique. Les rats étaient parmi les vecteurs principaux eux aussi de pandémies au niveau encore jamais atteint jusque là. Cette réflexion alliant analyse du climat et des maladies est passionnante et érudite. C'est une somme bien écrite sur un sujet dont on pensait connaître les tenants et les aboutissants. Force est de reconnaître que ce que l'on nous enseignait en fac d'histoire il y a quinze - vingt ans doit être sérieusement compléter par ces nouvelles avancées de la recherche. Mais il y a un mais.. Kyle Harper m'a paru pousser un peu trop loin sa théorie de l'impact du changement climatique et des maladies lorsqu'il aborde dans sa dernière partie sur les VIème et VIIème siècle, la question des religions. En effet, il y défend l'idée que face aux catastrophes qui se multipliaient, les habitants de l'Empire, croyant la fin du monde approchée à grand pas, se seraient réfugiés dans le christianisme et l'islam parce qu'elles sont des religions eschatologiques. C'est oublié le lent processus qui a permis la conversion de l'empereur Constantin et des élites à la religion chrétienne pour des raisons multiples et complexes magnifiquement expliquées par Marie Françoise Baslez. C'est ma seule réserve sur ce livre qui par ailleurs se lit très bien. Si vous aimez les approches différentes sur ce sujet, je ne peux que vous inviter à lire le dernier livre de Kyle Harper qui a le mérite de susciter le débat.
Commenter  J’apprécie         3312
On écrit l'histoire avec ce qu'on est, ce qui occupe notre époque. Il n'est donc pas si étonnant de relire l'histoire romaine à l'aune des changements climatiques et des pandémies aujourd'hui, surtout que le matériel archéologique permet de nouvelles approches de ces périodes. Après l'optimum climatique des débuts de l'empire, qui a favorisé le long règne d'Auguste, les siècles suivants seront moins propices. La peste antonine et les germes qui circulent d'un bout à l'autre de l'empire sont un premier frein. Petit âge glaciaire, peste noire, les plaies s'abattent, faisant baisser la démographie jusqu'au 6e siècle. Cette relecture de la "chute" de l'empire romain, expliquant les mouvements des populations "barbares", les changements monétaires, les troubles militaires avec ces éléments complémentaire, est tout à fait passionnante. C'est clair et facile à lire.
Commenter  J’apprécie         21
Une synthèse dense de plusieurs données historiques et scientifiques, d'interprétations, qui couvre plusieurs siècles pour expliquer que la fin de l'Empire romain est due à un concours de circonstances humaines mais aussi environnementales. Un livre intéressant, bien écrit, bien documenté. Seuls les détails historiques un peu trop poussés quelques fois font qu'on peut décrocher de temps en temps pendant la lecture. Intéressant.
Commenter  J’apprécie         10
Une comparaison avec la situation actuelle est riche d'enseignement.
Une réflexion profondément écologique sur l'humanité.
Dommage que la société actuelle soit aussi amnésique.
La pertinence du débat excuse le style plutôt alambiqué d'un discours parfois très universitaire, à moins qu'il ne s'agisse d'une traduction inadaptée.
Commenter  J’apprécie         00